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Dimitri Houbron
Question N° 24574 au Ministère auprès de la ministre de la transition écologique


Question soumise le 19 novembre 2019

M. Dimitri Houbron interroge M. le secrétaire d'État, auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports, sur la réglementation relative aux conditions d'accès à certains métiers dans le domaine des transports pour des personnes diabétiques. Il rappelle que les personnes atteintes de diabète sont exposées à des incidences sur leur vie professionnelle au regard des contraintes du traitement et des risques d'hypoglycémie pour le patient. Il rappelle, à cet effet, que l'accès à certaines professions (métiers de l'armée, de la sécurité, de l'aviation civile et commerciale, de la marine marchande...) et écoles notamment militaires (Polytechnique, Saint Cyr, École de l'air, École navale...) est refusé à ces personnes diabétiques. Il constate, cependant, que ces mesures exceptionnelles n'ont jamais connu d'évolution, plus de 30 ans après leur édiction. Il s'étonne de la persistance de cette rigidité des conditions d'accès compte tenu des progrès médicaux qui permettent à des personnes atteintes de diabète « de type 1 » d'avoir des conditions de vie moins atteignables qu'auparavant et de mieux contrôler leur métabolisme. Il rappelle que des pays, notamment européens et comme c'est le cas de l'Espagne depuis le 30 novembre 2018, ont mis fin à ces mesures de discriminations a priori visant des personnes atteintes de maladies chroniques dans l'accès à certains métiers de la fonction publique. Il souligne que la réglementation est appliquée dans des ministères et ses administrations par la prise de décrets et d'arrêtés qui précisent ou limitent la portée du règlement précité. Il cite, à titre d'exemple, la réglementation relative aux gens de mer comme l'arrêté du 3 août 2017 relatif aux normes d'aptitude médicale à la navigation des gens de mer, le décret n° 2015-1575 du 3 décembre 2015 relatif à la santé et à l'aptitude médicale à la navigation, l'arrêté du 28 septembre 2007 relatif au permis de conduire des bateaux de plaisance à moteur, à l'agrément des établissements de formation et à la délivrance des autorisations d'enseigner, et l'arrêté du 26 mars 2004 fixant les conditions d'aptitude physique des contrôleurs des affaires maritimes et des syndics des gens de mer à l'exercice des fonctions de la spécialité navigation et sécurité ; à la Société nationale des chemins de fer (SNCF) comme l'arrêté du 7 mai 2015 relatif aux tâches essentielles pour la sécurité ferroviaire autres que la conduite de trains, pris en application des articles 6 et 26 du décret n° 2006-1279 du 19 octobre 2006 modifié relatif à la sécurité des circulations ferroviaires et à l'interopérabilité du système ferroviaire, et l'arrêté du 6 août 2010 relatif à la certification des conducteurs de train ; et à l'aviation civile avec l'arrêté du 27 janvier 2005 approuvant le plan de servitudes aéronautiques de dégagement d'un aérodrome. Il en déduit que cet arsenal réglementaire est de nature à aggraver les difficultés d'insertion professionnelle rencontrées par les diabétiques « de type 1 ». Il préconise, à l'appui de ce constat, une révision des conditions d'accès sur aptitudes physiques, et la prévision d'un mécanisme de revue périodique au regard des avancées scientifiques et médicales sur l'ensemble de ces textes administratifs. Il propose, par exemple, que certains métiers soient accessibles ou fassent l'objet d'une plus grande ouverture sous conditions, soit du fait de l'évolution des traitements, soit avec l'autorisation au cas par cas, ou soit avec la fin des interdictions. Ainsi, il le remercie de lui faire part de ses avis et de ses orientations sur une évolution de la réglementation, relative aux gens de mer, à la SNCF et à l'aviation civile, afin de permettre un meilleur accès au marché du travail pour les personnes atteintes de diabète « de type 1 », dans un objectif de justice et d'égalité républicaine.

Réponse émise le 11 janvier 2022

Empêcher les discriminations professionnelles subies par les malades chroniques est une préoccupation du Gouvernement. S'agissant du métier de marin, celui-ci est soumis à des conditions d'accès notamment d'aptitude médicale. Ceci découle de conventions internationales : convention internationale sur les normes de formation des gens de mer, de délivrance des brevets et de veille (STCW) et convention de travail maritime de 2006 pour la marine marchande, STCW-pêche et convention n° 188 pour le secteur de la pêche. Un arrêté du 5 juillet 2019 a ouvert l'exercice de certains métiers des gens de mer, notamment les postes en contact avec le public sur les navires à passagers aux diabétiques insulino-dépendants ou insulino-requérants. Compte-tenu des impératifs du traitement et des complications potentielles de cette maladie, ces postes ainsi que l'éloignement en mer sont limités. Une étude prospective sera menée par le Service de santé des gens de mer afin d'envisager un nouvel élargissement des normes médicales. S'agissant des conducteurs de train, les conditions d'aptitude médicale sont régies par l'arrêté du 6 août 2010 et le décret n° 2010-708 du 29 juin 2010, qui transpose en droit français la directive 2007/59 du 23 octobre 2007. Les conditions d'aptitude médicale pour les personnels exerçant des tâches essentielles pour la sécurité ferroviaire autres que la conduite des trains sont quant à elles définies par l'arrêté du 7 mai 2015 qui reprend la réglementation européenne. Ce corpus réglementaire ne comprend pas d'interdiction de principe d'accès à l'exercice du métier de conducteur ou des missions relevant des personnels exerçant des tâches essentielles pour la sécurité ferroviaire autres que la conduite des trains. En effet, il est prévu que pour vérifier l'aptitude physique des candidats à l'exercice de ces deux types de profession, le médecin se prononce, à l'issue d'un examen, au cas par cas en fonction de l'état de santé de l'agent, des progrès de la thérapeutique et, au besoin, après avis spécialisé. La réglementation actuelle répond donc aux préoccupations exprimées en articulant de façon juste et pragmatique le principe de non-discrimination et les motifs impérieux de sécurité des personnes concernées, de leurs collègues ou des tiers intervenant dans leur environnement de travail. Dans le domaine de l'aviation civile, les licences des pilotes professionnels et des contrôleurs aériens sont délivrées sous conditions d'aptitude médicale. Ces conditions d'aptitude médicale visent un objectif de sécurité des passagers transportés ainsi que des tiers au sol et dans les airs, au même titre que la certification des aéronefs. Elles sont fixées dans des règlements européens : règlement (UE) n° 1178/2011 de la Commission du 3 novembre 2011 déterminant les exigences techniques et les procédures administratives applicables au personnel navigant de l'aviation civile et règlement (UE) n° 2015/340 de la Commission du 20 février 2015 déterminant les exigences techniques et les procédures administratives applicables aux licences et certificats de contrôleur de la circulation aérienne. Pour les pilotes professionnels et les contrôleurs aériens, le diabète insulino-dépendant est une cause d'inaptitude. Pour les diabétiques non insulino-dépendants, l'aptitude est possible sous réserve que le diabète soit stabilisé avec un traitement évitant tout risque d'hypoglycémie, cause d'incapacité subite. Pour les pilotes professionnels avec un diabète insulino-dépendant, le règlement européen n° 1178/2011 ouvre la possibilité de mettre en place des protocoles expérimentaux, nécessitant la participation conjointe d'au moins deux États membres. Cependant, le consensus médical autour de ces protocoles n'est pas aujourd'hui atteint en Europe. Pour les personnels navigants commerciaux, l'aptitude est possible avec un diabète insulino-dépendant sous certaines réserves. Dans ce cas, des limitations opérationnelles sont appliquées comme moyen de réduction de risque. Elles portent au moins sur l'obligation d'exercer en équipage à plusieurs personnels de cabine. En 2017, en 2018 et en 2019, dans le cadre des états généraux du diabète, la direction générale de l'aviation civile (DGAC) a rencontré la fédération française des diabétiques. Un rapport, demandé au Conseil médical de l'aviation civile en 2017, a été remis début 2019. Il valide la possibilité de maintenir une aptitude en aviation de loisir en cas de diabète insulino-dépendant sous condition de mise en œuvre d'un protocole spécifique. De telles dispositions particulières ont été notifiées par la DGAC en 2019 à l'Agence de l'Union européenne pour la sécurité aérienne. La loi du 6 décembre 2021 relative aux restrictions d'accès à certaines professions en raison de l'état de santé a permis de lever plusieurs freins. Elle acte la création d'un comité d'évaluation des textes encadrant l'accès au marché du travail des personnes atteintes de maladies chroniques. Ce comité vise à favoriser l'égal accès au marché du travail et aux formations professionnelles de toute personne, quel que soit son état de santé. Il veille à ce que les personnes atteintes de maladies chroniques aient, en l'absence de motif impérieux de sécurité et de risque pour leur santé, accès à toutes les professions. La loi relative aux restrictions d'accès à certaines professions en raison de l'état de santé rappelle également que la restriction d'accès à un emploi sur la base de conditions de santé particulières doit être strictement proportionnée aux risques pour la personne et les tiers dans les fonctions accessibles. Elle précise également que l'évaluation de la satisfaction du candidat à ces conditions se fait de manière individuelle en tenant compte des possibilités de traitement ou de compensation du handicap.  Enfin, la loi du 6 décembre 2021 prévoit une actualisation régulière des restrictions d'accès en fonction des modifications éventuellement menées dans les modalités d'exercice des fonctions mais aussi d'éventuels nouveaux traitements disponibles.

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