Mme Elsa Faucillon interroge M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur les positions de la France dans les négociations relative au traité sur la haute mer. Les océans procurent 50 % de l'oxygène que l'on respire. Malgré sa vitalité pour l'homme, la bonne santé des océans est en péril, avec plus de 90 % des stocks de pêche surexploités ou à la limite de la surexploitation et 66 % des écosystèmes marins significativement impactés par les activités humaines. Ce sont chaque année 13 millions de tonnes de plastique qui se retrouvent dans les océans, avec de graves conséquences sur 100 % des mammifères marins. C'est une situation catastrophique. Elle est liée au manque gravissime et répétitif de volonté d'action politique des États, dont la France, 2e domaine maritime mondial, doit absolument se distinguer en se montrant exemplaire. Actuellement un traité sur la haute mer est en discussion dans le cadre de l'ONU. 190 États participent aux négociations. C'est une occasion historique d'offrir enfin aux océans et aux mers une gouvernance adaptée et une protection réelle et durable. Parmi les points en discussions se trouve notamment la création de nouvelles réserves marines protégées dont Greenpeace, en lien avec la communauté scientifique, alerte qu'elles doivent couvrir au moins 30 % des océans d'ici à 2030 pour garantir cette protection vitale. D'autres questions doivent être abordées, et faire l'objet d'engagements ambitieux et contraignants en particulier celles de la surpêche et de la pollution des eaux liée aux déchets plastiques. Elle lui demande quelles positions il compte défendre, au nom de la France, pour que ces négociations ne soient pas un nouvel échec dans la révolution écologique mondiale qui est indispensable.
Les services du ministère de l'Europe et des affaires étrangères ont été mobilisés, dès les premières discussions au sein des Nations unies et de l'Union européenne en 2006, sur l'importance des négociations multilatérales actuellement en cours aux Nations unies en vue de l'élaboration d'un instrument juridiquement contraignant portant sur la conservation et l'utilisation durable de la biodiversité marine en haute mer (processus BBNJ, pour "Biodiversity beyond national jurisdiction"). La collaboration avec les autres administrations françaises traitant des questions marines et maritimes est active sur ce thème, en particulier avec le ministère de la transition écologique et solidaire. La France est une grande nation maritime. Dans ce contexte, elle se doit de participer activement à la négociation BBNJ. Sous l'impulsion du ministère de l'Europe et des affaires étrangères, cette négociation a fait l'objet de plusieurs décisions du Comité interministériel de la mer (CIMER) ces trois dernières années pour assurer une organisation régulière du dialogue avec la société civile dans son ensemble ainsi qu'une organisation adaptée, au sein de l'administration, pour faire face aux multiples échéances de la négociation. Celle-ci est d'ailleurs entrée dans une phase décisive depuis la décision de l'Assemblée générale des Nations unies de convoquer une conférence intergouvernementale chargée d'élaborer le traité. Sur les quatre sessions de négociation budgétairement prévues par l'Assemblée générale, trois se sont déjà tenues. La quatrième conférence se réunira au mois de mars 2020. La France prend toute sa part dans le cadre européen. C'est en effet à Bruxelles que s'élaborent entre les 28 Etats membres et la Commission européenne les positions que l'Union européenne défend au siège des Nations unies. La France promeut également les positions européennes auprès des Etats francophones d'Afrique ou des Etats du Pacifique. De même, le dialogue de la France est permanent avec certains Etats industrialisés pour les amener à une attitude positive et constructive dans cet exercice (Japon, Corée, Etats-Unis, Canada etc.). Ces activités de négociations nécessitent l'implication du réseau diplomatique, celle des services centraux des ministères en particulier celui des directions du ministère de l'Europe et des affaires étrangères et de notre Ambassadeur chargé des océans. La France est active pour que la prochaine session de négociation permette la conclusion d'un accord. Mais elle souhaite un accord qui soit véritablement protecteur de la biodiversité en haute mer, qui soit novateur dans son approche écosystémique de l'Océan et qui veille à l'équilibre entre "conservation"et"utilisation durable" de la biodiversité. La France veut également que le plus grand nombre d'Etats puisse signer et ratifier cet accord afin que son application représente une véritable valeur ajoutée dans la protection de la biodiversité marine. A cet égard, la France défend la conclusion d'un accord solide et ambitieux, qui permette en particulier la création d'aires marines protégées en haute mer par le futur organe décisionnel du traité. Sur le thème des ressources génétiques marines, la France défend une position allante et équilibrée qui permette la mise en place d'un partage des avantages non monétaires de l'exploitation scientifique de ces ressources. Bien que des divergences persistent encore au sein de l'Union européenne sur cette question, la France estime souhaitable d'explorer également la voie d'un partage des avantages monétaires de l'exploitation commerciale des ressources génétiques marines mais uniquement sur une base volontaire car un tel partage sera le fait des entreprises privées. Il s'agit là d'une négociation difficile, souvent technique, dans laquelle tous les sujets sont liés et à laquelle la société civile doit pouvoir largement participer. Tous les Etats ne partagent pas les ambitions françaises et européennes pour cet accord et les efforts de la France pour convaincre sont essentiels pour aboutir à un succès. Dans cette tâche, le ministère de l'Europe et des affaires étrangères est totalement mobilisé.
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