Mme Marie-Pierre Rixain attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur l'importance d'une politique intégrée, coordonnée et efficace de lutte contre l'illettrisme. Ce fléau concerne aujourd'hui en France 2,5 millions de personnes qui, selon la définition donnée par l'Agence nationale de lutte contre l'illettrisme, n'ont pas acquis une maîtrise suffisante de la lecture, de l'écriture, du calcul et des compétences de bases pour être autonomes dans les situations simples de la vie courante. Par ailleurs, ce constat déjà alarmant peut être complété par le fait que sans être stricto sensu illettrés, 20 % des Français possèdent un faible niveau de lecture et d'écriture. L'illettrisme impacte ainsi fortement la vie quotidienne des personnes concernées, mais également leur vie sociale et professionnelle. 40 % des personnes illettrées France sont sans emploi et celles qui en occupent un doivent souvent développer des stratégies d'adaptation pour se protéger du regard que la société porte sur ce qui peut être vécu comme un handicap et perçu comme une honte. Les causes de l'illettrisme sont multiples, combinatoires et inhérentes au vécu des individus. Parmi elles, le facteur éducatif est essentiel et le système scolaire français doit replacer au cœur de son projet l'apprentissage et la maîtrise des fondamentaux, à savoir lire, écrire, compter et respecter autrui, et telle a été la feuille de route de M. le ministre pour cette rentrée 2017. Mais l'école n'est pas l'unique responsable et il est important que le combat contre l'illettrisme associe à la question éducative les aspects sociaux, familiaux, territoriaux et de santé pour à la fois prévenir l'illettrisme mais aussi y remédier pour ceux qui le vivent déjà au quotidien. Aussi, elle l'interroge sur les mesures qu'il envisage de prendre afin de lutter spécifiquement contre l'illettrisme à l'école et sur la possibilité d'engager un grand plan interministériel et systémique de lutte contre l'illettrisme.
En donnant la priorité à l'école primaire et à la maîtrise des savoirs fondamentaux - lire, écrire, compter, respecter autrui - à l'issue de la scolarité primaire, le Gouvernement a mis au cœur de son action éducative, dès son installation, la lutte contre les diificultés scolaires et la prévention de l'illettrisme. Cette lutte passe, d'abord et avant tout, par l'apprentissage du français qui permet à tous d'acquérir une maîtrise suffisante et durable de la lecture et de l'écriture. Ainsi, le dédoublement des classes de CP (cours préparatoire) dans les écoles de REP+ depuis la rentrée 2017 est une réforme structurelle qui permet, dès à présent, un meilleur accompagnement des élèves les plus fragiles au moment délicat et crucial de l'entrée dans la lecture et dans l'écriture afin d'atteindre l'objectif de 100 % de réussite dans la maîtrise de ces fondamentaux. Cette disposition sera étendue à la rentrée 2018 aux classes de CE1 de REP+ et aux classes de CP de REP, puis en 2019 aux classes de CE1 de REP. En parallèle, le ministère met en place une véritable mobilisation pédagogique en faveur de l'apprentissage de la lecture et de l'écriture et de la maîtrise du français. L'école maternelle fera l'objet dans les prochains mois d'une attention particulière pour en faire, plus encore qu'aujourd'hui, une véritable école du langage, par un travail régulier sur l'acquisition du vocabulaire et la découverte du principe alphabétique ainsi que sur l'écoute et la compréhension de textes lus par l'adulte, afin de préparer les apprentissages fondamentaux du CP. Elle joue un rôle décisif pour compenser les différences dans l'acquisition du vocabulaire et le développement du langage oral, souvent liées aux différences et inégalités sociales et culturelles entre les familles. Par ailleurs, des progressions annuelles, notamment pour ce qui concerne l'apprentissage du français, seront prochainement publiées pour aider les enseignants à mieux s'approprier et mettre en œuvre les programmes des cycles de l'école élémentaire et du collège grâce à des repères plus fins et des objectifs précisés. De plus, les évaluations conçues par le conseil scientifique, mis en place récemment auprès du ministre, sont des outils au service des progrès des élèves, pour permettre aux enseignants de repérer au plus tôt les difficultés de certains, d'ajuster leur enseignement en conséquence et de l'adapter à chacun. Elles concernent déjà pour cette année scolaire tous les élèves en début de CP et de 6ème, et en REP les élèves de classe de CP en milieu d'année, à titre expérimental ; l'année scolaire prochaine, elles seront systématisées en début et en milieu de classe de CP ainsi qu'en début de classes de CE1 et de 6ème. L'apprentissage de la lecture et le développement du goût de livre font l'objet d'une attention toute particulière. Un ensemble d'outils pédagogiques sera bientôt mis à la disposition des enseignants, comprenant : un état de la recherche pour diffuser les démarches les plus efficaces ; des recommandations sur la pratique de la lecture à l'école élémentaire et au collège et sur l'enseignement de la grammaire et de l'orthographe, à mettre en œuvre dans les classes dès à présent ; des recommandations du conseil scientifique pour bien choisir les manuels d'apprentissage de la lecture. En complément, un plan de formation en lecture pour les professeurs des écoles sera organisé : la moitié des 18 heures consacrées à l'animation pédagogique et à des actions de formation continue portera ainsi sur la formation à l'apprentissage de la lecture. Enfin, une action interministérielle en faveur du livre et de la lecture, menée avec le ministère de la culture, va se déployer durant les prochains mois et les prochaines années pour mobiliser la société autour de la cause du partage et du plaisir de la lecture. D'autres mesures d'ordre structurel viennent renforcer cette mobilisation pédagogique. A l'école élémentaire, l'heure hebdomadaire d'activité pédagogique complémentaire sera réorientée vers des activités de lecture et de compréhension. Au collège, les deux heures d'accompagnement personnalisé seront consacrées à la compréhension pour les élèves de classe de 6ème qui ont une maîtrise insuffisante ou fragile des compétences en lecture et compréhension de l'écrit selon les évaluations du début d'année ; de plus, le dispositif « Devoirs faits » a aussi pour objet de permettre une remédiation en compréhension de l'écrit et les élèves fragiles doivent être fortement incités à bénéficier de ce dispositif. L'ensemble de ces dispositions va permettre d'assurer aux élèves la maîtrise du français, mais aussi de leur donner le goût de la lecture et de l'écriture, et de prévenir ainsi l'illettrisme. Par ailleurs, le ministère de l'éducation nationale fait partie des membres fondateurs de l'Agence nationale de lutte contre l'illettrisme ; au sein de cette structure, il entretient avec les autres ministères impliqués et des partenaires du monde professionnel un dialogue suivi, qui permet de coordonner les différentes actions en faveur des adultes en situation d'illettrisme ou de grande fragilité linguistique. Par son vaste réseau de formation continue (réseau des Groupements d'établissements publics locaux d'enseignement - GRETA - sur un territoire donné), le ministère occupe une place importante dans l'offre de formation en français et savoirs de base : des dispositifs et offres spécifiques ciblent les publics en situation d'illettrisme. Le dispositif des actions éducatives familiales (AEF), mené en partenariat avec l'ANLCI vise, quant à lui, à identifier et prendre en charge les parents d'élèves en situation d'illettrisme ou de grande fragilité linguistique. Les actions proposées leur permettent de se réconcilier avec l'écrit et, ainsi, de mieux suivre la scolarité de leurs enfants. La diffusion par le ministère de l'éducation nationale d'un kit pédagogique, accessible en ligne sur le site Eduscol, a permis de sensibiliser largement les équipes pédagogiques et éducatives et a inspiré plusieurs déclinaisons d'outils en académies, en fonction des contextes territoriaux et des besoins identifiés.
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