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Jennifer De Temmerman
Question N° 25030 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 10 décembre 2019

Mme Jennifer De Temmerman interroge M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la concurrence déloyale à la frontière franco-belge en matière d'élevage et d'agriculture. Aujourd'hui de plus en plus d'exploitants belges viennent cultiver des terres ou développer des élevages intensifs en France au détriment des agriculteurs français. Afin d'approvisionner l'industrie agroalimentaire du pays, les agriculteurs belges recherchent de plus en plus d'hectares à exploiter en France. Pour ce faire ils compensent de manière très généreuse les agriculteurs français qui accepteraient de sous-louer leurs terres. Bien que la pratique de « sous-location » ne soit pas légale, elle représente une opportunité financière pour certains exploitants qui cèdent à l'interdit. Ainsi à la frontière franco-belge, notamment dans le secteur de la pomme de terre, se développe inexorablement le phénomène de sous-location « industrielle» engendrant à la fois des problématiques d'ordre sanitaire, économique et foncier. Le système de sous-location échappe totalement aux contrôles de la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural et, lorsque les propriétaires découvrent l'existence de la sous-location de leurs terres, ils sont souvent en difficulté pour apporter la preuve juridique de celle-ci. La sous-location perturbe l'acquisition foncière entraînant une pression sur le prix des terres. Aujourd'hui les jeunes agriculteurs ou les porteurs de projet en agriculture biologique n'arrivent plus acquérir des terres lorsque qu'ils n'ont pas de patrimoine familial. Le risque sanitaire est également plus élevé sur les parcelles sous-louées en raison du non-respect de la rotation des cultures. C'est désormais dans le domaine de l'élevage que les entreprises belges investissent la frontière avec le développement de poulaillers industriels. Elle lui demande quelles mesures concrètes pourraient être mises en œuvre pour contrôler, sanctionner et dissuader les pratiques de sous-locations et la concurrence déloyale en matière d'élevage et d'agriculture à la frontière franco-belge.

Réponse émise le 14 janvier 2020

La sous-location de terres agricoles, particulièrement dans les départements du nord de la France, n'est pas un phénomène nouveau. Elle est la conséquence d'exigences agronomiques de rotation. Longtemps « régularisée » par des échanges de parcelles entre agriculteurs, cette pratique a semblé régresser ces dernières années, en raison des réformes successives de la politique agricole commune et, notamment, de l'introduction du découplage en 2003. Depuis lors, des « contrats de vente » ou des « contrats de mise en culture » se sont développés ces dernières années, à l'initiative de producteurs français. Toutefois, lors des dernières campagnes, le phénomène s'est amplifié à la faveur du développement de marchés à l'international, notamment pour des produits congelés. Elle est effectivement, entre autres, le fait d'entreprises belges. Le code rural et de la pêche maritime (CRPM) établit en son article L. 411-35, le principe d'ordre public d'interdiction de la cession du bail rural et de la sous-location de tout ou partie du fonds agricole loué. La sous-location constitue une cause de résiliation du bail, en dehors des cas limitativement énumérés par l'article L. 411-35 du CRPM, avec l'accord du bailleur.  Par ailleurs, les agriculteurs belges exploitant en France sont également soumis au contrôle des structures. Néanmoins, l'identification de la forme juridique des terres retenue pour exploiter se heurte parfois à des difficultés lorsqu'il s'agit de déterminer qui met en valeur l'exploitation sous couvert de sous-location prohibée des terres. Au-delà de l'aspect foncier du sujet, les services du ministère de l'agriculture et de l'alimentation se montrent très vigilants sur le respect des règles sanitaires. En effet, le non-respect des règles administratives régissant en France l'utilisation des produits phytosanitaires et des intrants peut être à l'origine de problèmes sanitaires affectant le foncier agricole et sa production. Ainsi, la direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (DRAAF) des Hauts-de-France s'assure régulièrement du respect des bonnes conditions agricoles et environnementales sur les terrains concernés, notamment pour vérifier les méthodes de pulvérisation et la présence de nématodes dans les parcelles et aussi opérer des prélèvements d'échantillons de végétaux (contrôles d'introduction dans l'Union européenne, contrôle de l'origine des plants et plans de contrôle des produits phytopharmaceutiques). Il est, par définition, complexe d'accéder à une estimation précise des surfaces de culture et d'élevage concernées par la sous-location. Par ailleurs, les contrôles d'utilisation de produits phytosanitaires précités n'ont, pour l'heure, pas mis en évidence des pratiques interdites en ce qui concerne les producteurs belges. Ces contrôles vont se poursuivre. De plus, face à la suspicion d'utilisation de plants sans passeport phytosanitaire européen, la DRAAF a réalisé des contrôles à l'occasion de chantiers de plantation au printemps 2019, mais aucun n'a débouché sur des constats d'irrégularité. Complétant les contrôles réalisés par le service régional de l'alimentation de la DRAAF, un travail d'information a été engagé avec la profession agricole pour que les agriculteurs français et belges enclins à recourir à la sous-location soient dûment informées des risques afférents à cette modalité d'exploitation des terres.

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