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Manuéla Kéclard-Mondésir
Question N° 25830 au Ministère de l'europe


Question soumise le 14 janvier 2020

Mme Manuéla Kéclard-Mondésir attire l'attention de M. le Premier ministre sur la politique française dans la Caraïbe et son attitude face au drame qui sévit actuellement en Haïti. Dix ans après le séisme du 12 janvier 2010, ce pays connaît une crise sécuritaire et politique aigüe. Un mouvement de contestation populaire inégalé contre le président Jovenel Moise élu en février 2017, et réprimé à balles réelles, souligne la faillite d'un système imposé de l'extérieur avec l'aberrante constitution de 1987 qui débouche sur l'incapacité des gouvernements et des corps constitués à assurer un minimum d'État de droit, à lutter contre la corruption (quand ils ne s'en font pas eux-mêmes les vecteurs), et la précarité due aux changements climatiques. Face à cette situation, entretenue par les États-Unis, les États européens et en particuliers la France qui a une histoire - et une géographie ! - particulière avec Haïti, reste incroyablement silencieuse. Pourtant, en ce mois de janvier 2020, Haïti n'aura plus de parlement et l'exécutif pourra agir par simples décrets. Elle lui demande en conséquence quelles mesures il compte prendre pour qu'Haïti puisse retrouver les voies d'un développement économique nécessaire et d'une égalité citoyenne indispensable.

Réponse émise le 25 février 2020

Entré depuis juillet 2018 dans un cycle de manifestations et de troubles à la suite de l'augmentation du prix des carburants, Haïti traverse une crise qui résulte à la fois d'un contexte socio-économique très dégradé et d'une paralysie des institutions. L'inflation augmente et la monnaie haïtienne ne cesse de se déprécier alors que plus de 60% de la population vit sous le seuil de pauvreté. Sur le plan institutionnel, le pays connaît une situation de blocage. Haïti n'a plus de gouvernement investi depuis mars 2019, le parlement haïtien n'a été ni en mesure d'adopter le budget pour l'exercice 2019/2020, ni d'adopter la loi électorale qui aurait permis l'organisation d'élections législatives en octobre 2019. Depuis le 13 janvier de cette année, le pays est sans représentation parlementaire. Haïti connaît par ailleurs un climat de très grande insécurité, entretenue par la violence criminelle des gangs. Cette situation a conduit la France à adapter son dispositif de sécurité et son dispositif de coopération, la sécurité de ses ressortissants étant sa première priorité. Il est désormais formellement déconseillé de se rendre dans certaines régions de la capitale et de l'Artibonite ; la vigilance extrême reste de mise dans le reste du pays. Haïti connaît dans le même temps une situation humanitaire extrêmement critique, alors que le pays vient de commémorer le 12 janvier dernier les dix ans du séisme de 2010. Le ministère de l'Europe et des affaires étrangères a débloqué une aide alimentaire d'urgence d'un million d'euro et la France encourage l'Union européenne à verser une aide humanitaire accrue. C'est plus d'un tiers de la population qui devrait avoir besoin d'une aide alimentaire d'urgence au début de l'année 2020. La France appelle à l'arrêt des violences et demande au Président haïtien d'organiser les conditions d'un dialogue avec toutes les forces politiques nationales pour rétablir la capacité des autorités publiques à diriger le pays. La France est évidemment disposée à soutenir ce dialogue, en lien notamment avec l'Union européenne et l'Organisation internationale de la Francophonie.

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