M. Sébastien Chenu alerte Mme la ministre des armées sur son manque de vision nationale en raison de la mise en danger de l'industrie française et des emplois français ainsi que de la perte de souveraineté des armées en matière de défense et d'armement par rapport à la commande récente des pistolets qui a été effectuée. En effet, son ministère a annoncé deux commandes importantes, l'une pour 75 000 pistolets et l'autre pour 2 600 fusils de précisions. Or aucun armurier français n'a été retenu. S'il était déjà inquiétant que les fusils d'assaut ne soient plus français et qu'ils aient été commandés à un armurier allemand, Heckler et Koch, il y a maintenant trois ans, il est encore une fois tout aussi inquiétant que les fusils de précision ne soient plus français mais belges, et que les armes de poings deviennent autrichiennes. Si l'on comprend la volonté de remplacer des pistolets des années cinquante et des matériels dont la vétusté n'est plus acceptable, si l'on comprend la recherche d'un rapport qualité prix avantageux, on attend aussi du ministère des armées qu'il soit au service des intérêts nationaux et que les appels d'offres lancés ne soient pas systématiquement remportés par des entreprises étrangères. Il est intolérable que Mme la ministre mette des bâtons dans les roues à l'émergence d'une filière nationale française de l'arme de petit calibre, encore plus lorsqu'elle est de grande qualité. Cette décision est contradictoire avec tous les discours sur la nécessaire ouverture des marchés publics aux PME françaises afin de les aider. En perdant la souveraineté militaire française en matière d'armement, Mme la ministre met les forces armées en danger si elle venait à perdre leur approvisionnement, mais aussi par conséquent ceux qu'elles protègent, les citoyens. Elle met les industries et les savoir-faire français sur la touche, menace les emplois français, et empêche d'en créer de nouveaux. Quelle est l'étape suivante ? Remplacer ainsi les avions ? Les navires ? Les armées françaises doivent-elles être entièrement équipées par l'étranger ? M. le député attend que la prochaine commande soit au bénéfice des soldats, des entreprises et des salariés français. La France n'est pas un pays du tiers-monde ou un pays où les lobbys étrangers font la loi, incapable de se procurer un armement national. La France est un grand pays. Un grand pays capable d'avoir son propre armement. Il lui demande d'expliquer ce choix désastreux, qui à l'avenir ne doit plus se reproduire.
Conformément au cadre juridique défini par la directive 2009/81/CE du Parlement européen et du conseil du 13 juillet 2009 relative à la coordination des procédures de passation de certains marchés de travaux, de fournitures et de services par des pouvoirs adjudicateurs ou entités adjudicatrices dans les domaines de la défense et de la sécurité, désormais transposée dans le code de la commande publique, la règle pour les marchés de défense est la concurrence européenne dans le cadre d'une consultation avec publicité préalable. En application du livre III de la deuxième partie dudit code, seuls les opérateurs économiques ressortissant d'un État membre de l'Union européenne (UE) ou de l'Espace économique européen sont, sauf impossibilité, admis à répondre aux consultations émises par l'État dans le cadre des opérations d'armement. Pour les marchés s'inscrivant dans ce cadre, écarter un fournisseur ressortissant d'un autre État membre serait contraire au principe de non-discrimination et susceptible de recours, risquant de mettre en danger le bon déroulement des opérations d'armement et donc les intérêts nationaux. Il est cependant possible, sous certaines conditions strictement définies, de privilégier des fournisseurs nationaux, lorsque les intérêts essentiels de sécurité de l'État sont en jeu, en matière de dissuasion nucléaire notamment. Cependant, les armes de petit calibre ne font pas partie des domaines identifiés comme devant impérativement rester souverains par la Revue stratégique de défense et de sécurité nationale de 2017. Les services de la direction générale de l'armement (DGA) veillent à appliquer strictement le principe d'égalité de traitement entre les candidats français et européens. Il convient de rappeler que même les contrats attribués à un titulaire de premier rang étranger occasionnent bien souvent, via la sous-traitance, des retombées économiques positives pour le tissu industriel national. En tout état de cause, la DGA veille avec un soin tout particulier à assurer la sécurité d'approvisionnement des forces armées dans le cadres des opérations d'armement conduites sous son égide. Au stade de l'examen des candidatures, la sécurité d'approvisionnement constitue l'un des éléments pris en compte. Le soutien à la base industrielle et technologique de défense demeure une priorité du ministère des armées. Cela passe par l'engagement déterminé de l'État à faire prévaloir les intérêts nationaux en donnant à la France les moyens industriels et militaires nécessaires à l'exercice effectif de sa souveraineté.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.