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Mireille Clapot
Question N° 26298 au Ministère de l’éducation nationale


Question soumise le 4 février 2020

Mme Mireille Clapot appelle l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur la représentation des femmes dans les programmes scolaires. La France se doit d'être exemplaire sur les questions d'égalité femmes-hommes. La représentation des femmes dans la société constitue un enjeu symbolique essentiel afin de lutter contre les stéréotypes genrés. Cet indispensable changement des mentalités passe notamment par l'éducation prodiguée par le système scolaire français. À l'instar des propositions contenues dans le rapport dont elle a été corapporteure (n° 844 - avril 2018), elle lui demande donc de préciser les actions que le Gouvernement entend prendre afin d'améliorer la représentation des femmes dans les manuels et les programmes scolaires.

Réponse émise le 24 novembre 2020

L'égalité filles-garçons et hommes-femmes est un principe fondamental de la République inscrit dans le code de l'éducation, ainsi qu'un axe fondamental du socle commun de connaissances, de compétences et de culture. La mise en œuvre de cette priorité nationale est encouragée à tous les niveaux de la scolarité, dans l'approche de tous les enseignements pour développer les compétences psycho-sociales et comportementales des élèves, leur savoir-être dans le cadre du développement des futurs citoyens. La question de l'égalité filles-garçons fait également l'objet d'un enseignement à part entière dans certaines disciplines (en enseignement moral et civique, en histoire et en éducation physique et sportive notamment). La représentation des femmes dans la société est un objet central dans la mise en œuvre de cette priorité, que l'on retrouve de façon renforcée dans certains programmes scolaires. Dans le socle commun de connaissances, de compétences et de culture, le domaine 3, « la formation de la personne et du citoyen », fait explicitement appel « à l'apprentissage et à l'expérience des principes qui garantissent la liberté de tous, comme la liberté de conscience et d'expression, la tolérance réciproque, l'égalité, notamment entre les hommes et les femmes, le refus des discriminations, l'affirmation de la capacité à juger et agir par soi-même ». En ce qui concerne les parcours éducatifs, « le parcours citoyen » est inscrit dans le projet global de formation de l'élève. Il s'adresse à des citoyens en devenir qui prennent progressivement conscience de leurs droits, de leurs devoirs et de leurs responsabilités. Adossé à l'ensemble des enseignements, en particulier l'enseignement moral et civique, l'éducation aux médias et à l'information, et participant du socle commun de connaissances, de compétences et de culture, le parcours citoyen concourt à la transmission des valeurs et principes de la République et de la vie dans les sociétés démocratiques. Dès l'école maternelle, « les enfants vont apprendre ensemble et vivre ensemble », dans une école qui « construit les conditions de l'égalité, notamment entre les filles et les garçons ». À travers les situations concrètes de la vie de la classe, « une première sensibilité aux expériences morales (sentiment d'empathie, expression du juste et de l'injuste, questionnement des stéréotypes…) se construit ». Les programmes de cycle 2 et de cycle 3 placent quant à eux l'acquisition du respect d'autrui parmi les quatre savoirs fondamentaux (lire, écrire, compter, respecter autrui). À l'école primaire, si l'apprentissage de la lutte contre les discriminations et celui de l'égalité de droit et de traitement des filles et des garçons, des femmes et des hommes, s'inscrivent dans la thématique plus large de la formation de la personne et du citoyen, il n'en reste pas moins abordé au travers du prisme des différents domaines d'apprentissage. Dans le cadre des programmes d'histoire, cette approche se fait de plusieurs manières. Elle peut se faire d'abord en intégrant la question de l'égalité entre hommes et femmes à l'étude des sociétés, afin de contextualiser cette question et d'en montrer les évolutions et de les mettre en perspective. Analyser la démocratie athénienne ou la Révolution française à travers la place faite aux femmes est possible, pour montrer la complexité et les limites de l'égalité promue par ces sociétés par exemple. Dès le CE2, les élèves découvrent et comparent les modes de vie de quelques personnages, femmes et hommes : une paysanne, un artisan, une ouvrière, un soldat, une savante, un musicien, une puissante… Certains chapitres mettent directement en avant les femmes comme groupe social, ainsi que leur place et leur rôle social. Ainsi, en 4e, le chapitre « Conditions féminines dans une société en mutation » pose la question suivante : « Quel statut, quelle place, quel nouveau rôle pour les femmes dans une société marquée par leur exclusion politique ? Femmes actives et ménagères, bourgeoises, paysannes ou ouvrières, quelles sont leurs conditions de vie et leurs revendications ? ». Il amène donc à insister sur les femmes en tant que groupe marginalisé politiquement et sur les combats pour aboutir à une égalité juridique réelle. En classe de 1ère technologique, un sujet d'étude est également consacré à « L'instruction des filles sous la IIIe République avant 1914 ». Cette réflexion est abordée pendant la Première Guerre mondiale, en mettant en perspective la mise en avant des femmes, ses limites et sa portée, en troisième et en première. La place des femmes en tant que groupe social est également étudiée en 3e dans le chapitre « Femmes et hommes dans la société française des années 1950 aux années 1980 : nouveaux enjeux sociaux et culturels, réponses politiques ». En terminale générale, le chapitre consacré à la société française contemporaine doit insister sur les combats pour l'égalité, avec des points de passage obligatoires sur la loi Veil, « la parité, du principe aux applications », alors qu'en terminale technologique, un sujet d'étude porte sur « l'évolution de la place et des droits des femmes dans la société française depuis 1945 ». On retrouve cette réflexion en terminale professionnelle avec un point à développer sur l'essor du salariat féminin. La place des femmes, et la question de l'égalité avec les hommes en particulier, est dans le cadre de ces cours présentée comme un axe indispensable de la modernisation de la société française. Enfin, les nouveaux programmes de lycée mettent en avant des points de passage et d'ouverture devant être traités obligatoirement, souvent sous la forme d'événements ou de personnages emblématiques. Parmi ces personnages figurent de nombreuses femmes : Émilie du Châtelet dans le cadre du programme de seconde sur l'essor des sciences au XVIIIe siècle, Madame Rolland dans celui du cours sur la Révolution française en première, l'engagement politique de George Sand, celui de Louise Michel dans la Commune de Paris, le rôle de Marie Curie durant la Première Guerre mondiale, toujours en classe de première. Ces points permettent de montrer que des femmes n'ont pas attendu le XXe siècle pour jouer un rôle important, parfois dans des domaines qu'on pense encore largement réservés aux hommes (la science, la politique). Ils peuvent aussi amener à réfléchir sur leur exceptionnalité, en reflet à la marginalisation de la majorité des femmes dans la société et aux inégalités dont elles étaient et sont encore victimes. Ces préoccupations se retrouvent également dans le cadre de l'enseignement moral et civique, de l'école primaire à la terminale. L'égalité entre hommes et femmes est présentée comme un principe fondamental, garant des valeurs de la République, mais aussi comme une conquête fondatrice de toute société démocratique (« Acquérir et partager les valeurs de la République »). En cycle 3, le programme demande de s'appuyer sur la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. Elle est aussi au cœur de la réflexion sur les discriminations, ainsi que les problèmes de harcèlement, de violence. Les programmes d'enseignement moral et civique doivent s'appuyer sur des études de cas qui permettent de faire ressortir la situation des femmes dans la société, pour montrer la conquête des droits, les discriminations qui demeurent ainsi que les stéréotypes. La question de l'égalité et de la place des femmes est également un support dans la construction d'une culture de l'engagement par des mises en perspective historiques et sociales, ou sur le lien entre l'évolution de la loi et celle de la société. Ce travail est continué au lycée autour des questions relatives à la liberté en seconde et à l'égalité en première, où la réflexion sur les discriminations met davantage en perspective le lien entre libertés, droit et lois, ainsi que le rapport entre l'évolution de la société et la production/application de lois dans le cadre de politiques publiques (par exemple, en première générale et technologique, un des objets d'étude est « la promotion de l'égalité entre les hommes et les femmes : orientation, formation, travail, emploi, salaire, représentation, reconnaissance »). Les programmes de français donnent la possibilité à travers certains de leurs objets d'étude (« La littérature d'idées et la presse du XIXe au XXIe siècle ») ou de leurs entrées (« Héros, héroïnes et héroïsmes » en cycle 4) d'engager la réflexion sur la place des femmes dans la littérature et la société. Les professeurs ont également la possibilité de choisir des auteurs féminins et/ou des œuvres mettant en avant la place des femmes et ses évolutions à différentes époques. Les programmes de sciences portent également cette question, dans un domaine où le renforcement de la place des femmes est une priorité. Ceux de physique-chimie recommandent « dès qu'il est possible, une mise en perspective des savoirs avec l'histoire des sciences et l'actualité scientifique », afin d'interroger la dimension sociale et culturelle de la construction du savoir scientifique, en particulier la place des femmes dans l'histoire des sciences, ainsi que la promotion des sciences auprès des filles. De même, les programmes de SVT permettent de travailler sur la construction sociale de la différenciation fille-garçon, notamment par une pédagogie reposant sur la confrontation entre des connaissances scientifiques et les représentations et modèles culturels de chaque élève, comme des codes culturels justifiant l'inégalité entre homme et femmes. Il s'agit également de déconstruire les stéréotypes genrés. On retrouve ces préoccupations en langues vivantes, en particulier pour travailler au dépassement des stéréotypes, en interrogeant les relations sociales. Au cycle terminal, l'axe 2 « Espace privé et espace public » interroge notamment la place des femmes dans la société et la question de leur émancipation (« Étudier les différentes configurations d'espaces privés et publics, leurs fréquentations et leurs transformations permet de mieux comprendre comment est structurée une société. Par exemple, les femmes ont longtemps été, ou sont encore, cantonnées à la sphère privée ; leur accès à la sphère publique (politique, professionnelle, médiatique, sociale) est un mouvement général qui reste d'actualité. La redistribution des rôles au sein de la famille est une conséquence de cette émancipation. Comment s'opèrent les mutations au sein de ces deux espaces privé et public (famille, espaces de sociabilité, travail…) ? »). Le ministère de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports (MENJS) est par ailleurs attentif à ce que les femmes et les hommes fassent l'objet d'une représentation équilibrée dans les supports pédagogiques que les élèves utilisent au quotidien avec leurs professeurs et qui jouent un rôle important dans la structuration de leurs apprentissages. Les manuels scolaires en font partie et peuvent, en conformité avec les programmes d'enseignement, être des leviers pour faire évoluer les pratiques des enseignants comme être, pour les élèves, les vecteurs d'une sensibilisation à l'égalité entre les filles et les garçons. Le MENJS n'a pas de prérogatives juridiques de prescription ou de contrôle du contenu des manuels, mais il a fait de l'égalité un sujet de son dialogue avec les éditeurs privés. Les enseignants sont par ailleurs responsables du choix des manuels qu'ils utilisent en classe ; ils disposent de ressources pour faire des choix conformes à la préoccupation de lutter contre les stéréotypes de genre. De nombreux outils, développés par le MENJS ou par ses partenaires, sont également à leur disposition pour aborder les différents enjeux de l'égalité à tous les niveaux de la scolarité des élèves, dans toutes les disciplines. Enfin, en application et en complément des programmes, de nombreuses actions éducatives sont proposées aux enseignants et enseignantes qui souhaitent s'inscrire dans cette démarche d'égalité filles-garçons et lutter contre les stéréotypes de genre (concours, interventions en milieu scolaire, journées dédiées, etc.). Le MENJS s'appuie sur de nombreux partenariats pour promouvoir cette offre d'actions éducatives, qu'il accompagne via l'octroi d'agréments et de subventions aux associations. Les programmes scolaires associés aux nombreuses actions éducatives permettent donc un travail conséquent sur la question de la place des femmes dans la société française. Si beaucoup reste à faire pour atteindre une égalité réelle entre les femmes et les hommes, cela donne des bases solides pour lutter contre les stéréotypes qui participent aux discriminations et violences envers les femmes. Toutes les dispositions mises en œuvre et détaillées dans le présent argumentaire sont de nature à confirmer l'engagement pris par le MENJS pour éduquer les élèves à l'égalité entre les femmes et les hommes.

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