Mme Michèle Tabarot appelle l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur le transfert obligatoire, au 1er janvier 2020, des compétences eau et assainissement aux communautés de communes et aux communautés d'agglomération. Cette disposition suscite une inquiétude réelle pour les élus de nombreuses communes, notamment rurales mais aussi moyennes, qui gèrent la compétence eau et parfois l'assainissement en régie. Au-delà de la remise en cause d'une gestion de proximité qui bénéficie tant aux habitants qu'à la collectivité concernée, la mise en œuvre concrète semble particulièrement difficile notamment au regard de la diversité des situations. Face à ce constat, le Sénat a adopté, le 24 février 2017, en première lecture, une proposition de loi pour le maintien des compétences eau et assainissement dans les compétences optionnelles des communautés de communes et des communautés d'agglomération. Inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale le 12 octobre 2017, ce texte a fait l'objet d'une motion de renvoi en commission et son examen a été reporté sine die. Dès lors, elle lui demande de bien vouloir préciser la position du Gouvernement sur une possible abrogation de la disposition de la loi NOTRe qui prévoit cette obligation de transfert.
Les articles 64 et 66 de la loi no 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (loi NOTRe) attribuent à titre obligatoire aux communautés de communes et aux communautés d'agglomération les compétences « eau et assainissement ». Le législateur a souhaité accorder aux collectivités et établissements publics concernés un délai raisonnable leur permettant d'organiser au mieux l'exercice de ces nouvelles compétences. Pour les communautés de communes, les compétences « eau et assainissement » demeurent ainsi optionnelles jusqu'au 1er janvier 2020. L'évolution introduite par la loi NOTRe pour l'exercice des compétences locales relatives à l'eau potable et à l'assainissement répond à la nécessité d'assurer la réduction du morcellement des compétences exercées dans ces deux domaines, tout en générant des économies d'échelle. En effet, les services publics d'eau potable et d'assainissement souffrent aujourd'hui d'une extrême dispersion qui a pour conséquence une insuffisante cohérence en matière d'approvisionnement et de distribution, et une difficulté à rationaliser les investissements. L'exercice des compétences « eau et assainissement » à l'échelle des communautés de communes et des communautés d'agglomération permettra de mutualiser efficacement les moyens techniques et financiers nécessaires à une meilleure maîtrise des réseaux de distribution d'eau potable et d'assainissement, notamment dans les zones rurales. Il permettra en outre d'assurer aux services publics d'eau potable et d'assainissement une meilleure assise financière, tout en ouvrant la voie à une approche globale de la gestion de la ressource en eau. Si le transfert à l'échelle intercommunale de l'exercice des compétences « eau » et « assainissement » peut susciter des inquiétudes, du fait de l'hétérogénéité actuelle des modes de gestion, il convient de souligner que le droit en vigueur offre des marges de manœuvre permettant de maîtriser ces évolutions de manière souple et pragmatique, comme le précisent les deux instructions adressées aux représentants de l'Etat dans les départements et régions les 13 juillet 2016 et 18 septembre 2017. En premier lieu, une territorialisation des modes de gestion de ces deux services publics est admise au sein du périmètre d'une même communauté de communes ou communauté d'agglomération. La Cour des comptes a admis, dans son rapport public annuel 2015, qu'il est possible de concilier, au sein d'une même autorité organisatrice, la gestion en régie, avec ou sans prestations de services, et la délégation de service public, la jurisprudence ne considérant pas comme une atteinte au principe d'égalité le maintien de plusieurs opérateurs sur un même territoire communautaire. En second lieu, si à compter du 1er janvier 2020, les communautés de communes et les communautés d'agglomération devront tendre, dans un délai raisonnable, à une harmonisation des tarifs, afin de garantir le respect du principe d'égalité des usagers devant le service public, des différenciations tarifaires par secteurs géographiques restent toutefois admises dans les limites définies par la jurisprudence, à savoir, lorsqu'il existe une différence de situation objective entre les usagers du service ou si cette différenciation répond à une nécessité d'intérêt général en rapport avec les conditions d'exploitation du service. L'alignement vers le haut des niveaux de service que permettra le transfert intercommunal des services publics d'eau et d'assainissement, associé à de forts mécanismes de péréquation liés à l'augmentation de la taille des autorités organisatrices auront pour effet de minimiser les coûts supplémentaires pour les usagers. Par ailleurs, le transfert de la gestion de ces deux services publics s'accompagnera d'une meilleure connaissance des réseaux, ainsi que de leur rendement et de leur gestion, favorisant ainsi l'amélioration des niveaux de services rendus, notamment en milieu rural. A la suite de l'adoption, le 12 octobre 2017, par l'Assemblée nationale, d'une motion de renvoi en commission de la proposition de loi, adoptée par le Sénat le 23 février 2017, pour le maintien des compétences « eau » et « assainissement » dans les compétences optionnelles des communautés de communes et des communautés d'agglomération, le Premier ministre a chargé Madame Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, de mener un travail de concertation approfondi pour identifier les difficultés liées à la mise en œuvre du transfert obligatoire de ces compétences prévu à compter du 1er janvier 2020. De ce travail transpartisan a émergé un accord, traduit dans la proposition de loi relative à la mise en œuvre du transfert des compétences « eau » et « assainissement » aux communautés de communes, déposée le 21 décembre 2017 et adoptée en 1ère lecture par l'Assemblée nationale, le 31 janvier 2018. Ce texte donne d'abord la possibilité aux communes de s'opposer au transfert des compétences « eau » et « assainissement » avant le 1er juillet 2019, si un certain nombre d'entre elles s'expriment en ce sens, de sorte que ces compétences puissent demeurer de leur ressort. Cette possibilité est réservée aux communes membres de communautés de communes qui n'exercent pas déjà l'une ou l'autre de ces deux compétences, à titre optionnel ou facultatif. S'il en est fait usage, le transfert obligatoire des compétences « eau » et « assainissement » a la communauté de communes concernée est alors reporté au 1er janvier 2026, sans que cette fois les communes puissent de nouveau s'y opposer. En outre, si, après le 1er janvier 2020, une communauté de communes n'exerce pas les compétences relatives à l'eau et à l'assainissement, l'organe délibérant de la communauté de communes peut, à tout moment, se prononcer sur l'exercice de ces compétences par la communauté, mais les communes membres garderont la possibilité de s'y opposer. Enfin, le texte propose de réviser les modalités de représentation-substitution des communes par les communautés de communes, en matière d'eau et d'assainissement à l'occasion d'une prise de compétences, d'un rapprochement de communautés, ou d'une extension, dans le but de favoriser l'exercice de ces compétences au niveau des intercommunalités à fiscalité propre, tout en assurant la continuité de l'ensemble des structures syndicales pré-existantes et des services rendus aux usagers par ces dernières. Ce texte devrait être examiné prochainement par les sénateurs en séance publique.
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