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Stéphane Trompille
Question N° 26668 au Ministère de la transition écologique


Question soumise le 18 février 2020

M. Stéphane Trompille attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique et solidaire sur la prolifération des grands cormorans (phalacrocorax carbo). Les associations agréées pour la pêche et la protection du milieu aquatique (AAPPMA) du département de l'Ain ont interpellé M. le député sur les ravages causés par les grands cormorans sur la population piscicole des parcours de pêche. Pour lutter contre la prolifération de ces oiseaux, les AAPPMA ont décidé de demander une autorisation préfectorale afin d'obtenir le droit de tirer le cormoran pour en réguler le nombre pendant la période autorisée, à savoir de la saison de chasse de septembre à fin février. A titre d'exemple, 21 grands cormorans ont été abattus lors de la première saison (2012/2013) ; depuis, on parle de 83 oiseaux pour la saison 2018/2019. Néanmoins, malgré un rapport de tir en hausse retourné à la direction départementale du territoire, service chasse et pêche, la demande de renouvellement pour l'année 2020 est restée sans suite. Le quota attribué aux AAPPMA de l'Ain a été dépassé. Cependant cette absence d'autorisation de tir ne permet pas de répondre à une réelle expansion des grands cormorans dans le département. Ces oiseaux représentent également un danger pour la population d'oiseaux autochtones. Aussi, il lui demande quels sont les moyens mis en œuvre par les services de l'État pour connaître au plus juste la population des grands cormorans et si une nouvelle étude de terrain est envisageable afin de pouvoir répondre de la meilleure des façons aux attentes des AAPPMA et notamment sur une possible autorisation de tir de régulation.

Réponse émise le 11 août 2020

Le grand cormoran est une espèce protégée au niveau européen au titre de la directive 2009/147/CE du 30 novembre 2009 relative à la conservation des oiseaux sauvages, et au niveau national par l'arrêté ministériel du 29 octobre 2009 fixant la liste des oiseaux protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection. La France a une responsabilité forte dans la protection de cette espèce dont la population dans le Nord-Ouest de l'Europe avait fortement chuté au XXe siècle, conduisant à prendre ces mesures de protection. Toutefois, l'interaction de l'espèce avec les activités humaines est à l'origine du système dérogatoire à la protection stricte du grand cormoran, l'impact de l'espèce étant essentiellement lié à sa consommation de poissons. Aussi, les grands cormorans peuvent être abattus au titre de cette dérogation dont le cadre est fixé par l'arrêté du 26 novembre 2010 fixant les conditions et limites dans lesquelles des dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées par les préfets concernant les grands cormorans. Tous les trois ans, cet arrêté cadre est complété par un arrêté fixant les quotas départementaux dans les limites desquelles des dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées par les préfets concernant les grands cormorans. L'arrêté en vigueur est l'arrêté du 27 août 2019 qui couvre la période 2019-2022, et qui attribue un quota annuel sur le territoire dépassant les 50 000 individus détruits. Dans le département de l'Ain, le quota annuel pour cette même période est de 4500 individus, répartis entre les piscicultures (4000) et les eaux libres (500). Ce chiffre reprend celui attribué pour la précédente période triennale 2016-2019. En outre, depuis la saison 2012-2013, le nombre de grands cormorans attribué est toujours resté sensiblement le même, oscillant entre 4500 individus au plus bas (2015-2016) et 4850 au plus haut (2014-2015). S'agissant des suivis, ils sont réalisés annuellement par la Ligue de protection des oiseaux de l'Ain selon la méthode de comptage Wetlands, qui constitue un recensement des oiseaux d'eau hivernants mi-janvier sur des zones humides déterminées. Au niveau national, un comptage des individus nicheurs et hivernants est également réalisé en janvier tous les trois ans sous la coordination de l'université de Rennes 1, du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et du Muséum national d'histoire naturelle (MNHN). Ces données permettent d'établir un suivi dynamique de la population et d'adapter les quotas de destruction autorisées. Le recensement des populations hivernantes et des dortoirs est stable entre 2015 et 2018 selon le rapport rendu en octobre 2018 : les effectifs 2015 minimal et maximal sont respectivement de 375 et 495 individus contre 374 individus en 2018 (chiffre minimal et maximal identique). Le nombre de dortoirs passe de 3 à 4 selon les observateurs. Ces chiffres sont sensiblement différents de la dynamique de l'ensemble de la population sur le territoire, qui augmente légèrement entre 2015 et 2018, passant de 104 857 individus en moyenne à 106 696. S'agissant des dortoirs, au niveau national, le nombre est en revanche en augmentation plus significative, avec un total de 1387 en 2018, contre 1221 en 2015. Dans le département de l'Ain, les comptages Wetlands vont ainsi se poursuivre annuellement pour connaître l'évolution de la population. Pour la période 2019-2020, chaque association agréée de pêche et de protection des milieux aquatiques (AAPPMA) affiliée à la fédération départementale des AAPPMA qui en a fait la demande auprès de la Direction départementale des territoires s'est vu attribuer un quota individuel annuel. Ainsi, 20 arrêtés préfectoraux individuels portant autorisation de destruction de l'espèce sur les eaux libres ont été pris, pour un total de 410 grands cormorans. Ces arrêtés s'ajoutent aux 32 arrêtés préfectoraux individuels portant autorisation de destruction sur les piscicultures extensives (pour un total de 509 grands cormorans) et à l'arrêté portant autorisation individuelle pour les pisciculteurs affiliés au syndicat des propriétaires et exploitants d'étangs de la Dombes, à qui est attribué un quota de 3300 individus. Les quotas individuels annuels sont toutefois révisables au cours de la saison par voie d'arrêté en fonction de la synthèse des bilans intermédiaires remontés et dans la limite des maximums autorisés. En outre, il est nécessaire de mettre en évidence les impacts du grand cormoran sur les espèces de poissons menacées et sur leur état de conservation ; en effet, l'intérêt à agir est une des conditions indispensables à l'octroi de la dérogation. Depuis plusieurs années, les contentieux sur les arrêtés préfectoraux permettant de déroger aux interdictions de destruction sur les eaux libres se multiplient, motivés par l'absence de données sur ces impacts.

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