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Louis Aliot
Question N° 27203 au Secrétariat d'état aux retraites


Question soumise le 3 mars 2020

M. Louis Aliot attire l'attention de M. le secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé des retraites, sur la réforme du régime de retraite des avocats. La grève des avocats se poursuit. En cause, la remise en cause de leur régime autonome de retraite, conséquence de la mise en place du régime universel. Le système fonctionnait pourtant parfaitement bien, les avocats s'appuyant sur une caisse autofinancée appelée la caisse nationale des barreaux français. Elle est d'ailleurs excédentaire et ne coûte pas un centime à l'État, donc aux contribuables. Pis, ses réserves s'élèveraient à deux milliards d'euros, le Conseil national du barreau reversant par ailleurs 100 milliards d'euros au régime général pour combler les régimes déficitaires. Avec la réforme, le montant des cotisations pourrait doubler, passant de 14 % à 18 %, et le montant minimum des pensions baisser. Il s'agit de l'acte de décès des cabinets indépendants et de la mise à sac de la profession, sacrifiée au profit des grands groupes d'assurance et des banques. Le tiers de la profession gagnant moins de 30 000 euros par an pourrait ne pas survivre. Il lui demande s'il compte faire machine arrière.

Réponse émise le 10 mars 2020

La Caisse nationale des barreaux français (CNBF) a été créée en 1948 en tant que section professionnelle de la Caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales et est devenue autonome en 1954. Elle gère le régime d'assurance vieillesse de base en annuités, le régime d'assurance vieillesse complémentaire en points et le régime invalidité-décès des avocats dès leur inscription au barreau qu'ils exercent une activité non salariée ou salariée. Les régimes de base et complémentaires de la CNBF sont aujourd'hui excédentaires, mais cela est dû à la situation démographique actuelle de la profession d'avocat et non au mode de gestion de la caisse. En effet, d'après la CNBF, celle-ci compte aujourd'hui 5,1 cotisants pour 1 retraité (droits directs), alors qu'au régime général cette proportion est deux fois plus faible. Ce ratio démographique permet à la CNBF de servir des prestations d'un bon niveau, alors que les taux de cotisation sont parmi les plus faibles des travailleurs indépendants. Toutefois, le rapport démographique des affiliés de la CNBF est amené à décroitre au cours des décennies à venir : déjà sur une pente fortement décroissante (en 2006, 8,9 cotisants pour 1 retraité de droit direct ; en 2015 6 cotisants pour 1 retraité de droit direct), celui devrait atteindre 2,7 cotisants pour 1 retraité en 2040 de droit direct et 1,2 cotisant pour 1 retraité en 2060 de droit direct, d'après les projections de la CNBF. Avec la décroissance de la ration démographique, les excédents des régimes gérés par la CNBF diminueront aussi : d'après les projections de la CNBF, le régime de base serait en déficit en 2043 et ne serait plus en mesure d'honorer le paiement de l'ensemble des prestations en 2057, du fait de l'épuisement des réserves cette année-là. Un jeune avocat qui prête serment aujourd'hui et qui envisage de prendre sa retraite au cours des années 2060 est donc assuré de ne pas pouvoir obtenir des prestations du régime de base aussi généreuses que celles servies aux avocats honoraires aujourd'hui. Pour le régime complémentaire des avocats, la situation est similaire, même si les échéances sont plus lointaines : le régime sera déficitaire à partir de 2059 et ne sera plus en mesure d'honorer l'ensemble de ses engagements en 2086, d'après les projections de la CNBF. Cet horizon plus lointain est le fait des efforts demandés aux jeunes générations d'avocats, pour lesquelles la CNBF a prévu d'augmenter les cotisations et de baisser leur rendement, à horizon 2029. A cette date, un euro cotisé rapportera environ 25 % de droits en moins qu'aujourd'hui. Le régime de retraite de base des avocats participe au mécanisme de la compensation démographique, qui conduit les régimes bénéficiant d'une bonne santé démographique à financer une partie des déficits des régimes souffrant d'une situation démographique dégradée. C'est à ce titre que le régime de base des avocats a versé 96 M€ en 2019, principalement au régime de base des agriculteurs, qui compte plus de retraités que de cotisants. Ce mécanisme, qui est un mécanisme démographique et non un effort de solidarité, est commun à l'ensemble des régimes de retraite de base et n'est donc pas spécifique au régime des avocats. Le Gouvernement a eu de nombreux échanges avec les représentants des avocats au sujet de la réforme des retraites.  Le Gouvernement a pris des engagements clairs sur 3 aspects : le montant des cotisations, le niveau des pensions et le maintien de la Caisse nationale des Barreaux français (CNBF). S'agissant des cotisations, il n'y aura aucun effort de charge imposé par la réforme des retraites jusqu'en 2029. Grâce au changement d'assiette sociale (avec un abattement de 30 %), l'impact du système universel sera d'un maximum de 5,4 points de hausse de cotisation pour les avocats d'ici 2040. Afin d'éviter ces hausses de cotisations pour les avocats les plus vulnérables, le Gouvernement a proposé plusieurs dispositifs possibles : le maintien d'un mécanisme de solidarité interne à la profession (amendement n° 42467 déposé par le Gouvernement) ou l'utilisation d'une partie des réserves de la CNBF. Ce dispositif de solidarité pourra prendre en charge toute a hausse de cotisation pour les avocats dont le revenu est inférieur à 80 000€. S'agissant du niveau des pensions, les projections effectuées et transmises aux représentants des avocats confirment que les avocats percevront une pension supérieure à celles du système actuel de la CNBF :  - de 13 % pour un avocat qui perçoit un revenu de 32 000 euros - de 24 % pour un avocat qui perçoit un revenu de 40 000 euros - de 11 % pour un avocat qui perçoit un revenu de 80 000 euros. Enfin, le Gouvernement s'est engagé à ce que les avocats conservent une caisse qui restera l'interlocuteur unique de la profession. La CNBF pourra gérer l'ensemble des dossiers de retraites de l'ensemble des avocats. Elle continuera de gérer l'ensemble des réserves financières qui resteront toujours sous le contrôle de la profession. Les réserves de la CNBF resteront donc à la disposition de la profession et ne seront pas absorbées par le régime universel.

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