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Émilie Bonnivard
Question N° 280 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 1er août 2017

Mme Émilie Bonnivard attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les retards massifs de versement des aides FEADER aux agricultrices et agriculteurs, par l'Agence de services et de paiements (ASP), organisme sous l'autorité conjointe des ministères de l'agriculture et du travail. Alors que les agriculteurs souffrent déjà des effets négatifs des cours des marchés agricoles, des aléas climatiques et sanitaires sur leurs productions, de la surtransposition des normes européennes et des contraintes administratives qui alourdissent leurs charges non productives, les retards de paiement de plus d'un an de la part de l'ASP des aides qui leur sont dues, aggravent considérablement leurs difficultés de trésoreries, déjà exsangues. Ces retards de paiement des aides européennes, auxquelles sont couplées des aides régionales, départementales et d'État au bénéfice de l'investissement dans les exploitations, ne sont plus justifiables, ni entendables par les agriculteurs. Ils sont dus à un logiciel de gestion, OSIRIS, inadapté dès le départ, d'une complexité extrême, et à de lourdes difficultés de la part de l'ASP à corriger la situation, et ce depuis 2015. Aujourd'hui, les agricultrices et agriculteurs français subissent des retards de paiement pour des travaux de modernisation de leurs exploitations, d'aides à l'agriculture biologique ou encore, des aides à la protection des troupeaux face à la prédation. Ils sont contraints depuis près de deux ans, de contracter des prêts de trésorerie (dont ils payent les intérêts) pour combler ces retards, et n'ont aucune visibilité sur les délais de versement de ces aides, qui ont pourtant été programmées et engagées. En Auvergne-Rhône-Alpes, sur 367 dossiers d'investissement engagés en 2015 dans le cadre du Plan de compétitivité et d'adaptation des exploitations (PCAE), seuls 200 ont été payés, soit 6,9 millions d'euros sur 19,8 millions d'euros engagés (39 % de versés). Pour les dossiers 2016, seuls 25 ont été payés, sur 248 validés, soit 1,1 million d'euros sur 23,2 millions d'euros engagés (5 % de versés). Ces dysfonctionnements de l'ASP mettent les territoires ruraux et parcs naturels régionaux porteurs de programmes Leader dans l'incapacité d'exécuter leurs programmes, de même qu'ils génèrent de lourdes difficultés de trésorerie pour ces structures (syndicats de pays, associations, parcs) très dépendantes des fonds européens. D'autres problèmes apparaissent, tels que la sous-dotation des enveloppes dédiées à l'agriculture biologique ou encore aux mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEC). En outre, il semblerait que pour faire face à une sous-budgétisation importante des indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN) en 2019 et 2020, le Gouvernement souhaite transférer massivement (853 millions d'euros) des fonds du 1er pilier vers le 2ème pilier, au détriment d'un financement attendu par les agricultrices et agriculteurs français, et d'une bonne lisibilité dans la programmation des fonds européens. Dans un contexte où le Gouvernement lance les Assises de l'agriculture, elle souhaiterait connaître les actions qu'il entend mettre en œuvre pour solutionner ces difficultés de paiement qui s'accentuent d'année en année, au détriment des agriculteurs, et qui nous exposent à un risque de dégagement d'office des fonds européens.

Réponse émise le 7 novembre 2017

Le plan de compétitivité et d'adaptation des exploitations agricoles (PCAE) vise à accompagner les investissements réalisés par les exploitations. Ce dispositif est décliné dans chacun des programmes de développement rural régionaux (PDRR) pour la période 2014-2020, dont les conseils régionaux sont autorités de gestion. Pour ce plan, le ministère de l'agriculture et de l'alimentation (MAA) et Régions de France partagent une stratégie commune qui se décline autour des quatre priorités suivantes : Axe 1 : la modernisation des élevages ; Axe 2 : la double performance dans le secteur végétal ; Axe 3 : l'amélioration de la performance énergétique des exploitations ; Axe 4 : l'encouragement à l'agro-écologie, en particulier via les groupements d'intérêt économique et environnemental. L'enveloppe annuelle de crédits publics consacrée au PCAE (crédits du MAA, des régions, des agences de l'eau et de l'Union européenne) atteint actuellement 350 millions d'euros par an, alors que la maquette initiale prévoyait 200 millions d'euros par an. À titre de comparaison, de 2009 à 2013, le niveau d'engagement annuel était de 100 millions d'euros. Le schéma de l'aide au titre de la PCAE qui prévoit que les investissements soient réalisés avant le paiement explique également en partie le faible niveau de dossiers payés par rapport aux montants engagés. Le paiement des aides à l'agriculture biologique et des mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC) accuse un retard important et reste à juste titre une préoccupation partagée par tous. La réforme complète des aides en 2015 avec le changement de programmation, le plan d'action et la rénovation du registre parcellaire graphique en constituent les principales causes. Le MAA, tout en ne sous-estimant pas les raisons qui ont conduit à ce retard, entend corriger cette situation en prenant des engagements précis. À cette fin, le MAA a demandé à l'agence de services et de paiement (ASP) de renforcer sans délai les moyens humains mobilisés sur le chantier de l'instrumentation des aides de la politique agricole commune (PAC) pour que l'ASP et son prestataire informatique renforcent leur capacité à traiter en parallèle les chantiers de paiement du premier et du deuxième pilier de la PAC. Les priorités fixées par le MAA à ses services et à l'ASP sont les suivantes : - initier les paiements en novembre 2017 pour les MAEC et les aides à l'agriculture biologique pour la campagne 2015 ; - mettre simultanément en œuvre tous les moyens nécessaires pour que les paiements des MAEC et des aides à l'agriculture biologique 2016 aient lieu à partir de mars 2018. Le paiement des MAEC 2017 sera initié dès juillet 2018. Une attention particulière a été prêtée aux moyens humains des directions départementales des territoires et de la mer. Ainsi, sous réserve du vote du projet de loi de finances 2018, 300 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires viendront abonder les effectifs. Concernant les MAEC et les aides à l'agriculture biologique, les paiements au titre de la campagne 2015 ont été initiés le 3 novembre 2017 avec un peu plus de 40 % des dossiers ayant fait l'objet d'un paiement par rapport au total attendu. Ces paiements témoignent du respect par le Gouvernement des engagements pris le 21 juin 2017 sur les calendriers de paiement et leur retour à la normale, avec l'objectif d'un retour à un calendrier de paiement habituel à compter de la campagne PAC 2018. Concernant l'indemnité compensatoire de handicaps naturals (ICHN), conformément au calendrier annoncé par le Gouvernement, le solde de l'aide au titre de la campagne 2016 a été versé le 28 juillet 2017 pour plus de 90 % des dossiers. Les derniers dossiers nécessitant une instruction complémentaire seront mis en paiement au fil de l'eau dans les prochaines semaines. Concernant la protection des troupeaux contre la prédation, s'agissant également d'une priorité, le seuil des deux tiers des dossiers d'aide de 2016 payés a été atteint dès juillet 2017. Le traitement de cette campagne se poursuit. Enfin, au vu de la dynamique constatée sur la mobilisation des crédits du fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER), des besoins supplémentaires ont été mis en évidence sur différentes mesures concernant le financement des aides du second pilier : l'ICHN, les aides à l'agriculture biologique et l'assurance-récolte. Ces besoins constatés s'expliquent de différentes façons : - une surprogrammation initiale des maquettes FEADER visant à limiter le risque de sous-consommation sur la fin de la programmation 2014-2020, ce qui correspond à une pratique normale dans tout exercice de programmation pluriannuelle ; - une extension progressive du périmètre des bénéficiaires de l'ICHN depuis le démarrage de la programmation actuelle ; - un renforcement de la part des crédits de l'Union européenne dans les cofinancements ; - une dynamique plus forte qu'anticipée de certains dispositifs tels que le développement de l'agriculture biologique et l'adhésion à l'assurance-récolte. La hausse du taux de transfert entre le premier pilier et le second pilier de 4,2 %, décidée le 27 juillet 2017, doit contribuer au financement de ces différents besoins. Outre ce transfert supplémentaire, toutes les marges de manœuvre sur le FEADER devront être utilisées. Une concertation est en cours avec les conseils régionaux, autorités de gestion, afin de répartir ces moyens supplémentaires sur le deuxième pilier de la politique agricole commune. Un premier comité État-régions s'est tenu le 19 septembre 2017. À l'issue du processus de concertation, le montant transféré vers le second pilier sera réparti entre les différentes mesures et les différents programmes de développement rural.

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