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Fabien Matras
Question N° 29797 au Ministère de l’enseignement supérieur


Question soumise le 26 mai 2020

M. Fabien Matras interroge Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation sur les conséquences de l'évolution des charges financières pesant sur les universités françaises depuis la loi de 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités. En effet, cette évolution affecte aujourd'hui non seulement leur capacité de développement, notamment pour les universités dites « à taille humaine », mais précarise également le secteur de la recherche et les tissus économiques locaux où elles sont implantées. La loi ° 2007-1199 du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités, dite « loi LRU », avait été adoptée dans la lignée d'une série de mesures, prises depuis le début des années 2000, qui devaient permettre aux universités françaises d'être compétitives au plan international et européen. C'est dans cette atmosphère de course à l'excellence que le 23 novembre 2007, le Conseil de l'Union européenne invitait d'ailleurs les États membres de l'Espace européen de l'enseignement supérieur à « promouvoir l'excellence dans l'enseignement supérieur et la recherche en mettant en place des établissements capables de rivaliser à l'échelle internationale et de contribuer à attirer en Europe les meilleurs talents en dotant ces établissements de l'autonomie nécessaire pour développer tout leur potentiel ». L'objectif de la loi LRU était donc de libérer la capacité d'innovation des universités, par l'élaboration d'une politique de recherche et de formation forgeant leur identité, tout en les responsabilisant dans la gestion et le financement de leurs activités. Toutefois, si l'idée était ainsi, sous l'influence du modèle anglo-saxon, de connecter les potentialités humaines des universités (enseignant-chercheur et étudiants) avec leurs environnements socio-économiques territoriaux ou plus simplement de les rendre plus opérationnelles à l'international, la pratique en a décidé autrement pour les universités dites « à taille humaine ». En effet, plusieurs facteurs organiques, fonctionnels et économiques, ont conduit à des difficultés économiques impactant aujourd'hui leur capacité d'innovation et de recherche. Le premier de ces facteurs a été organique, les universités ne disposaient en effet pas d'une culture du pilotage budgétaire, de la gouvernance opérationnelle et de la gestion prospective. Il ne s'agissait pas ici d'un problème de compétence, mais de moyens : cela nécessitait de pouvoir s'appuyer sur des données comptables régulièrement actualisées et une comptabilité analytique basée sur la réalité des coûts. À titre d'exemple, l'impératif de contrôle des coûts consécutif au passage aux responsabilités et compétences élargies (RCE) a bouleversé les modes de calculs en incitant les universités à passer d'une comptabilité d'engagement à une comptabilité analytique. En termes économiques, la réforme s'est accompagnée d'une absence d'évaluation réelle du transfert de charges et de moyens dédiés aux universités, notamment en termes de masse salariale. Conscient des enjeux scientifiques en matière de recherche, le Gouvernement a cette année augmenté le crédit de l'enseignement supérieur de près de 500 millions d'euros dans le PLF 2020, ce n'est toutefois pas assez au regard de l'évolution du glissement vieillesse technicité (GVT). Intégralement compensé en 2018, il ne l'est plus depuis 2019, ce qui représente une charge conséquente pour les universités, les poussant à ne pas renouveler les départs à la retraite ou les mutations. Signe de précarité, en 2013 les contractuels représentaient près de 30 % des effectifs de l'enseignement supérieur et de la recherche. Par ailleurs, cette hausse des dépenses est encore plus dramatique pour les universités de tailles intermédiaires, notamment en sciences humaines, qui ne bénéficient pas d'un attrait suffisant pour les entreprises ou auprès des fonds européens, pour créer des pôles d'excellence. Cela impacte indirectement les équilibres économiques territoriaux dont elles sont des vecteurs en termes de création et d'entretien de filières professionnelles. Les conséquences de cet impact économique se ressentent donc également sur la pédagogie et la recherche. Ainsi il lui demande ce qu'elle compte faire, d'une part, pour soutenir les universités à taille humaine, pour remédier à l'accroissement de charge que représente le glissement vieillesse technicité, et d'autre part pour aider à redynamiser ces universités dans lesquelles la recherche devient de plus en plus précaire.

Réponse émise le 1er décembre 2020

La question posée doit être replacée dans le contexte général d'une amélioration globale de la situation financière des universités dont la plupart ont vu leurs principaux indicateurs financiers progresser très favorablement au cours des dernières années. Seules cinq universités rencontrent des difficultés avérées et font l'objet d'un accompagnement dans le cadre du dispositif de suivi d'alerte et d'accompagnement.   Le GVT est un facteur d'évolution de la masse salariale qui a fait l'objet ces dernières années d'un traitement circonstancié. Jusqu'en 2012, il était entièrement financé aux établissements et intégré dans le socle de masse salariale. A partir de 2012, seule une part du glissement vieillesse technicité (GVT) a été financée selon les modalités suivantes : - financement ponctuel non soclé, c'est-à-dire non intégré au socle récurrent des ressources des établissements : 2012 (18 M€) ; 2013 (25 M€) ; - financement soclé : 2015 (32 M€) ; 2018 (40 M€) ; - aucun financement : 2014 ; 2016 ; 2017 ; 2019. A compter du budget 2020, le GVT n'est plus systématiquement financé. La loi n° 2007-1199 relative aux libertés et responsabilités des universités du 10 août 2007 date maintenant de plus de 10 ans et celles-ci ont acquis la maturité qui leur permet de faire des choix de gestion éclairés tenant compte notamment de facteurs partiellement exogènes tels que le GVT. Toutefois, l'internalisation du GVT par les établissements fait désormais chaque année l'objet d'échanges dans le cadre du dialogue stratégique et de gestion. Cette démarche s'est imposée pour renouveler les modalités d'un dialogue plus régulier qui réponde mieux aux attentes des établissements et pour renforcer le lien entre attribution de moyens, priorités des politiques publiques, stratégie des établissements et gestion des ressources, au premier rang desquelles figure celle de la masse salariale. Ainsi, depuis 2019, la première phase de ce dialogue entre les établissements, les rectorats et la DGESIP porte notamment sur la trajectoire financière et salariale des établissements sur les trois années à venir, en plus de la détermination du montant des moyens nouveaux alloués au titre des politiques publiques financées par le ministère. L'évolution de la masse salariale en général et du GVT en particulier font l'objet d'une analyse poussée, afin de dresser un constat partagé des mesures structurelles permettant leur maîtrise et, si nécessaire, d'identifier l'accompagnement spécifique que le MESRI pourrait apporter. S'agissant du soutien de l'effort de recherche, le projet de loi de programmation pluriannuelle de la recherche pour les années 2021 à 2030 a vocation à répondre aux attentes de la communauté universitaire. Il vise à donner davantage de moyens à tout l'écosystème de la recherche. Ce réinvestissement dans la recherche comprend notamment une revalorisation salariale des personnels de recherche, avec une attention particulière pour les jeunes chercheurs. Une attention particulière sera apportée dans l'allocation des moyens nouveaux pour correctement doter les universités à taille humaine.    Au total, la majorité des universités de taille intermédiaire ne rencontre donc pas de difficulté financière majeure. Toutes les universités vont par ailleurs pouvoir bénéficier des apports de la loi de programmation pluriannuelle de la recherche (LPR), permettant de consolider leurs capacités à proposer des parcours attractifs pour les chercheurs.

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