Mme Laetitia Saint-Paul alerte M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur le maintien sur le sol français d'individus dits apatrides, après que leur peine de prison a été purgée. Dès qu'une arrestation a lieu pour des faits de piraterie commis contre des ressortissants français, sur un navire immatriculé en France, les individus arrêtés sont amenés à être jugés en France. Ils sont également amenés à purger leur peine sur le territoire français. Il arrive que ces individus condamnés soient qualifiables d'apatridie, ne pouvant fournir de preuve légale et tangible de leur nationalité - en sus de l'incapacité pour l'État dont ils se réclament d'attester leur nationalité. Ainsi, par la suite, ceux-ci ne peuvent être reconduits à la frontière en application de l'arrêt du Conseil d'État du 22 janvier 1997. Ils ont dès lors la possibilité d'effectuer une demande d'asile auprès des autorités compétentes, et ainsi accès aux aides octroyées aux demandeurs d'asile. Le rejet de la demande d'asile et l'épuisement des voies de recours ne pourront, en application de la décision du Conseil d'État précitée, permettre la reconduite à la frontière des individus ici visés. Ainsi, elle l'interpelle en amont du projet de loi devant être présenté au printemps 2018, sur les possibilités qu'a la France de ne pas être contraint au maintien de ces individus sur le territoire.
La présente question fait sans doute référence à la prise d'otages du voilier « le Ponant » abordé par des pirates somaliens en avril 2008 et qui, à la suite des opérations menées par les forces françaises, a abouti à l'arrestation et au transfert de plusieurs d'entre eux déférés par la suite devant la justice française. Dans son verdict du 14 juin 2012, la cour d'assises a acquitté deux des inculpés condamnant les autres à diverses peines d'emprisonnement. Un des acquittés a, à la suite de sa demande d'asile, obtenu par décision de la Cour nationale du droit d'asile, la protection subsidiaire. En application de la loi, la protection subsidiaire peut être accordée à toute personne exposée à un risque réel de peine de mort, de torture ou de traitements inhumains ou dégradants dans son pays d'origine ou à une menace grave et individuelle contre sa vie en raison d'une situation de conflit. Cette protection peut être refusée ou retirée notamment en cas de crime grave, d'agissements contraires aux buts et aux principes des Nations Unies ou lorsque son activité sur le territoire constitue une menace pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l'État. Les décisions d'octroi et de refus de la protection internationale, qu'il s'agisse du statut de réfugié ou de la protection subsidiaire, sont prises en toute impartialité par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) sous le contrôle de la Cour, dans le respect de la convention de Genève et du droit national et il n'appartient pas à l'autorité administrative d'interférer dans ces procédures. En l'espèce, la Cour nationale du droit d'asile a souverainement jugé que l'intéressé, acquitté par la cour d'assisses des faits qui lui étaient reprochés, était éligible à la protection subsidiaire. Dans ces conditions, cette personne ne pourra, tant qu'elle demeurera placée sous la protection de l'OFPRA, être renvoyée dans son pays. Il convient par ailleurs de préciser que le statut d'apatride répond à une définition précise donnée par la Convention de New York du 28 septembre 1954, et s'applique à « toute personne qu'aucun État ne considère comme son ressortissant par application de sa législation ». L'apatridie peut résulter de différentes situations comme des contradictions entre différentes lois de nationalités, des successions d'États et des transferts de souveraineté, des défaillances ou des absences de lois sur l'enregistrement des naissances, des applications strictes du droit du sol et du droit du sang ou des déchéances de nationalité sans possibilité de la réintégrer. Il ne suffit pas, en revanche, pour bénéficier de ce statut que l'étranger concerné ou les autorités de son pays d'origine ne fournissent pas de documents attestant de sa nationalité. Il appartient à l'OFPRA, dans les conditions prévues par la convention de New York et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de reconnaître le statut d'apatride, sous le contrôle de la juridiction administrative. Ce n'est que dans le cas où l'étranger bénéficie de ce statut qu'il peut se réclamer des protections contre l'expulsion dans les conditions prévues par l'article 31 de la Convention de New York, comme rappelé par le Conseil d'État dans sa décision du 22 janvier 1997. Ce texte permet sous certaines conditions l'expulsion d'un apatride pour des motifs d'ordre public ou de sécurité nationale et prescrit aux États d'accorder un délai raisonnable au bénéficiaire de ce statut pour chercher à se faire admettre régulièrement dans un autre pays que son pays d'origine. En revanche, s'agissant de personnes pour lesquelles les autorités du pays d'origine refusent d'attester qu'il s'agit bien de leurs nationaux et dans la mesure où ces personnes n'ont par ailleurs pas été formellement reconnues apatrides par l'OFPRA, la difficulté de les renvoyer ne tient pas à une protection contre l'éloignement dont elles bénéficieraient mais bien à l'incapacité d'obtenir des laissez-passer consulaires auprès des autorités de leurs pays d'origine.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.