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Pierre Morel-À-L'Huissier
Question N° 3108 au Ministère de l'économie


Question soumise le 21 novembre 2017

M. Pierre Morel-À-L'Huissier attire l'attention de M. le ministre de l'action et des comptes publics sur l'utilisation de l'aide publique au développement. L'article 29 du projet de loi de finances pour l'année 2018 fourni comme chaque année la répartition, par mission et programme, des crédits du budget général et donc par conséquent de l'aide publique au développement. Cette aide est divisée en deux programmes, l'aide économique et financière au développement et la solidarité à l'égard des pays en développement. Ces sommes sont bien évidemment nécessaires pour de nombreuses populations faisant face à des situations dramatiques y compris au sein des 16 pays prioritaires ciblés par la France. Il souhaite connaître les sommes engagées et leur affectation notamment sur l'eau, l'assainissement, la nutrition et les actions concrètes qui en découlent.

Réponse émise le 20 février 2018

La mission interministérielle « Aide publique au développement » – 2,5 Mds€ de crédits de paiement en loi de finances initiale pour 2018 – regroupe les crédits des deux principaux programmes budgétaires concourant à cette politique : le programme « aide économique et financière au développement » (programme 110), mis en œuvre par le ministère de l'économie et des finances (MEF), et le programme « solidarité à l'égard des pays en développement » (programme 209), mis en œuvre par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères. Les crédits de la mission transitent par trois canaux : l'aide bilatérale, mise en œuvre directement par la France ; l'aide européenne, mise en œuvre par l'Union européenne (UE), grâce aux contributions françaises au budget de l'UE et au fonds européen de développement ; l'aide multilatérale hors UE, mise en œuvre par les organisations internationales telles la banque mondiale. Au total, dans l'aide publique au développement (APD) française, ces 3 canaux représentent respectivement environ 60%, 21% et 19% (moyenne 2013-2015, source : OCDE) [1]. Les crédits d'aide bilatérale financent différents instruments complémentaires : aide projet ; aides budgétaires globales, par lesquelles le MEF vient notamment appuyer des États en difficulté macroéconomique, notamment au Sahel ; bonification des prêts concessionnels de l'agence française de développement (AFD) ou par le Trésor ; coopération technique ; subventions à des opérateurs et à des ONG… Une grande partie de ces crédits est mise en œuvre par l'AFD, opérateur de l'aide publique au développement française, dans le cadre de son plan d'orientation stratégique et de son contrat d'objectifs et de moyens avec l'État, qui fixe les moyens, les objectifs et la trajectoire financière de l'agence. Les crédits d'aide multilatérale permettent à la France de participer à l'effort international en faveur du développement, par des contributions aux institutions financières internationales et à leurs fonds concessionnels (association internationale de développement du groupe banque mondiale par exemple), ainsi qu'à différents fonds sectoriels, comme le fonds vert pour le climat en matière de lutte contre le changement climatique ou le fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme. En termes sectoriels, la ventilation de l'aide française est globalement assez proche de celle des autres principaux donneurs européens. Les 3 premiers secteurs de dépense sont les infrastructures et les services (20 % [2] ), la santé (10 %), le développement rural et urbain (9 %). Suivent l'éducation (6 % [3] ) et la protection de l'environnement (6 %). En 2016, la France a consacré 8 % de son aide bilatérale, soit un peu plus de 400 M€, au secteur de l'eau et de l'assainissement. Seuls 7,5 M€ sont consacrés directement à la nutrition. Toutefois, il s'agit d'un secteur dont la comptabilisation est aujourd'hui imparfaite et en cours d'amélioration, avec la mise en place prochaine d'une comptabilisation des composantes « nutrition » de programmes concernant, à titre principal, d'autres secteurs. L'année 2016 s'est caractérisée par une forte croissance des projets engagés par l'AFD dans les secteurs de l'eau et de l'assainissement (+30 % par rapport à 2015), avec 1,2 Md€ d'engagements dont 1 Md€ en Afrique continentale. En 2017, la cible est de 1,3Md€. Des projets ont en particulier été lancés en Tunisie, en Equateur, en Jordanie et au Sénégal, en matière d'amélioration de la qualité des systèmes d'alimentation en eau potable. Au Maroc, à Madagascar et en Egypte, c'est sur la qualité du système d'assainissement que des opérations ont été engagées. Ces différentes opérations dans le secteur de l'eau et de l'assainissement ont un impact direct sur la nutrition. En effet, la consommation d'eau insalubre, un assainissement inadéquat et le manque d'hygiène sont parmi les principales causes de la sous-nutrition ou malnutrition. L'absence d'infrastructures adéquates entraîne auprès des populations vulnérables, en particulier les enfants, une exposition à des risques accrus et notamment à des infections parasitaires intestinales qui engendrent une phase de sous-nutrition. L'organisation mondiale de la santé estime ainsi que 50 % des cas de sous-nutrition infantile dérivent de diarrhées à répétition et d'infections intestinales. Aussi, l'AFD inclut dans 30 % de ces projets de financement en eau et assainissement des actions de sensibilisation à l'hygiène et a, comme objectif, d'atteindre un taux de 50%. A titre d'illustration, l'AFD a financé en 2016 au Burkina Faso un projet d'adduction d'eau potable à hauteur de 13 M€ dans la région Est, particulièrement touchée par la malnutrition chronique. Ce projet vise à améliorer, de façon durable, l'accès à l'eau potable de 254 000 personnes via la construction/réhabilitation de 30 mini-réseaux équipés de bornes fontaines et de 80 forages dans les territoires les plus enclavés et à appuyer la structuration d'opérateurs de services. Il s'agit d'un projet qualifié également de projet innovant dans son approche, dans la mesure où l'AFD et les autorités burkinabè ont sélectionné les zones fortement touchées par la malnutrition comme zones cibles pour l'amélioration de l'accès à l'eau potable. L'AFD a également financé un programme intégré d'assainissement du grand Antananarivo à Madagascar, pour 22 M€ en prêts et 6 M€ en dons (de l'État français et par une délégation de fonds de l'UE). Ce programme vise à améliorer les conditions de santé et de vie des populations concernées, en accompagnant les autorités locales dans la prévention des risques d'inondation ainsi que l'amélioration du réseau d'assainissement. [1] La notion statistique d'APD, définie par le Comité d'aide au développement de l'OCDE, est différente des crédits budgétaires. C'est elle qui est utilisée au niveau international pour apprécier l'aide des différents Etats. [2] Moyenne 2013-2015. Source : OCDE. [3] Hors frais de scolarité en France des étudiants étrangers.

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