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Cécile Muschotti
Question N° 31242 au Ministère de l’intérieur


Question soumise le 21 juillet 2020

Mme Cécile Muschotti attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur à propos du vote obligatoire. En France, le droit de vote est un droit et n'est pas, juridiquement, une obligation. En revanche, le droit de vote est moralement un devoir pour les citoyens, comme le rappelle l'inscription figurant sur les cartes électorales : « Voter est un droit, c'est aussi un devoir civique ». L'histoire, notamment l'histoire du droit des femmes, incite particulièrement chacune à le faire valoir. On parle effectivement de vote obligatoire dans les pays où l'absence de participation aux opérations de vote, un jour de scrutin, est passible de sanctions. Cela existe dans 22 pays dans le monde, sous des formes différentes. Malgré l'émission de 53 propositions de loi sur le sujet depuis les débuts de la Troisième République, le vote obligatoire n'a jamais été instauré. Toutefois le vote est obligatoire pour les grands électeurs (environ 144 400 personnes), à l'occasion de l'élection des sénateurs. En effet, l'article L 318 du code électoral prévoit « la condamnation à une amende de 100 euros par le tribunal de grande instance du chef-lieu tout membre du collège électoral qui, sans cause légitime, n'aura pas pris part au scrutin ». Transformer un droit en devoir pourrait paraître paradoxal. Pourtant, peut-on véritablement considérer que cela est une contrainte de faire un choix pour son avenir et celui de son territoire ? La crise démocratique mérite réflexion, et la question de la sanction est déterminante. Seule une réflexion collective peut permettre de trouver des solutions qui ont du sens pour la démocratie. Lorsque près de 60 % des électeurs ne s'expriment pas, les parlementaires se doivent de réagir, de chercher des solutions. Elle souhaite connaître l'avis du Gouvernement sur ce sujet.

Réponse émise le 29 décembre 2020

L'obligation de voter, en vigueur dans une vingtaine de pays parmi lesquels l'Australie, la Belgique, la Grèce et la quasi-totalité des pays d'Amérique du sud, remonte généralement à la fin du XIXème siècle ou au début du XXème siècle. Inversement, plusieurs de nos voisins (Pays-Bas, Espagne, Hongrie, Italie) sont récemment revenus sur l'obligation de vote qu'ils avaient institué, tandis que le canton suisse de Berne s'est opposé à son introduction en 1999 et que les critiques à son encontre sont de plus en plus nombreuses en Australie et en Belgique, par exemple. En France, si l'inscription sur les listes électorales est obligatoire (article L. 9 du code électoral), le vote n'est pas une obligation pour les élections au suffrage universel. Il n'est obligatoire que pour l'élection des sénateurs, pour laquelle les électeurs encourent une amende de 100 euros (article L. 318) s'ils s'abstiennent de voter. Depuis 2000, quinze propositions de texte visant à rendre le vote obligatoire ont été présentées sans aboutir. Ce statu quo s'explique notamment par la doctrine juridique et politique française qui confère une valeur supérieure à la liberté individuelle, laissant à l'électeur la possibilité de choisir son candidat ou sa liste mais également celle de refuser de participer à ce choix. Il s'explique aussi par l'absence de consensus politique sur les contreparties nécessaires à sa mise en œuvre à la fois pour tolérer des motifs d'abstention et pour sanctionner les électeurs qui ne voteraient pas alors même que dans les pays où le vote est obligatoire, ces sanctions apparaissent difficiles à mettre en œuvre et ne le sont souvent plus. C'est le cas en Belgique où une circulaire des procureurs généraux définit la poursuite des abstentionnistes comme la plus basse priorité. Dans les faits, aucun électeur n'a été sanctionné depuis 2003. Dès lors, si le Gouvernement partage l'objectif d'identifier des solutions pour favoriser la participation citoyenne, l'introduction du vote obligatoire ne saurait être retenue.

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