M. François-Michel Lambert alerte M. le ministre des solidarités et de la santé sur les abus régulièrement constatés dans les hôpitaux psychiatriques en matière de contention et d'isolement des patients. Ces derniers mois, en effet, l'analyse des registres de contention et d'isolement collectés par la commission des citoyens pour les droits de l'Homme (CCDH) a montré qu'une majorité d'établissements psychiatriques ne respectait ni la loi, ni les recommandations de la Haute autorité de santé (HAS) et du Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL), ni même les chartes et déclarations des droits de l'homme en matière de contention et d'isolement des patients : de nombreux psychiatres hospitaliers sont responsables de traitements abusifs en prenant des mesures d'isolement et de contention de très longue durée, qui résultent, souvent, d'une confusion entre le régime de l'isolement psychiatrique institué par le code de la santé publique et celui institué par le contexte sanitaire dû à la pandémie de covid-19. Dans ce contexte, le risque que cette ambiguïté soit à l'origine de nouveaux abus a contraint la Contrôleur générale des lieux de privation de liberté à mettre en œuvre une procédure d'urgence et à appeler le ministère des solidarités et de la santé à émettre des recommandations pour les prévenir. En parallèle, la commission des citoyens pour les droits de l'Homme appelle les agences régionales de santé (ARS) à mettre en œuvre leur politique régionale de suivi, d'analyse et de prévention du recours à la contention et à l'isolement, en application de l'instruction du 29 mars 2017 relative à la politique de réduction des pratiques d'isolement et de contention. En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui faire part des mesures que compte prendre le Gouvernement pour assurer aux patients des établissements psychiatriques des conditions de prises en charge respectueuses de leurs droits, et ce quel que soit le contexte en vigueur.
L'isolement et la contention en psychiatrie sont encadrés par l'article 72 de la loi de modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016. L'action 22 de la feuille de route Santé mentale et psychiatrie officialisée en juin 2018, prévoit de réduire le recours aux soins sans consentement, à l'isolement et à la contention. Cette démarche s'inscrit dans le cadre d'une politique déterminée de prévention, de réduction et de contrôle des pratiques d'isolement et de contention, partagée au niveau européen. Elle s'est traduite en France par le déploiement depuis 2016, sous l'égide du centre collaborateur de l'organisation mondiale de la santé de Lille, de l'initiative de l'Organisation mondiale de la santé QualityRights, basée sur la Convention des Nations Unies relative aux Droits des Personnes Handicapées (CIDPH), et par les travaux du comité de pilotage de la psychiatrie, qui ont permis d'engager un plan d'actions de réduction déterminée des mesures d'isolement, de contention et de soins sans consentement les plus attentatoires aux droits des patients. L'article L. 3222-5-1 du code de santé publique dispose ainsi que la contention, comme l'isolement, « sont des pratiques de dernier recours » et qu'il « ne peut y être procédé que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui, sur décision d'un psychiatre, prise pour une durée limitée ». Il prévoit aussi la création d'un registre dans chaque établissement de santé autorisé en psychiatrie, afin de tracer chaque mesure d'isolement et de contention. Or, par décision n° 2020-844 QPC du 19 juin 2020, le Conseil Constitutionnel a décidé que cet article L. 3222-5-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, était contraire à la Constitution et qu'il devait être abrogé. Cette décision prendra effet au 31 décembre 2020 (date de l'abrogation des dispositions contestées). Dans le prolongement de l'action déjà engagée pour réduire l'isolement et la contention, le Gouvernement entend donc donner suite à cette décision d'inconstitutionnalité, en travaillant sur un texte garantissant le droit des personnes de façon rigoureuse.
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