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Roland Lescure
Question N° 33109 au Ministère de l’économie


Question soumise le 20 octobre 2020

M. Roland Lescure interroge M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur l'application des dispositions de l'ordonnance n° 2019-1234 du 27 novembre 2019 relative à la rémunération des mandataires sociaux des sociétés cotées. Cette ordonnance a été prise sur le fondement du VI de l'article 198 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises, en vertu duquel le Parlement avait habilité le Gouvernement à « créer un dispositif unifié et contraignant encadrant la rémunération des dirigeants des sociétés cotées ». Les dispositions de cette ordonnance ont été appliquées pour la première fois à l'occasion des assemblées générales des sociétés cotées qui se sont tenues au premier semestre de l'année 2020, conformément à l'article 4 de cette ordonnance. Il lui demande donc de présenter les principales caractéristiques de ce nouveau dispositif légal d'encadrement de la rémunération des dirigeants des sociétés cotées, puis de lui faire part des premiers constats qui peuvent être tirés de ces premiers mois d'application de ce nouveau dispositif d'encadrement des rémunérations des mandataires sociaux des sociétés cotées.

Réponse émise le 9 mars 2021

Prise sur le fondement de l'article 198, V, 2° de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises (loi PACTE), en vertu duquel le Gouvernement était habilité à « créer un dispositif unifié et contraignant encadrant la rémunération des dirigeants des sociétés cotées », l'ordonnance n° 2019-1234 du 27 novembre 2019 a procédé à la transposition en droit français de certaines dispositions issues de la directive (UE) 2017/828 du Parlement européen et du Conseil du 17 mai 2017 modifiant la directive 2007/36/CE en vue de promouvoir l'engagement à long terme des actionnaires (directive Droit des actionnaires II). Les dispositions de cette ordonnance ont été complétées par certaines dispositions du décret n° 2019-1235 du 27 novembre 2019 portant transposition de la directive (UE) 2017/828 du 17 mai 2017 modifiant la directive 2007/36/CE en vue de promouvoir l'engagement à long terme des actionnaires. Le dispositif s'articule autour d'un double vote contraignant de l'assemblée générale des actionnaires, ces derniers bénéficiant à cette fin d'une information renforcée. Un vote dit ex ante porte chaque année sur la politique de rémunération des mandataires sociaux (à savoir, dans les sociétés anonymes à conseil d'administration, le président, les administrateurs, le directeur général et le ou les directeurs généraux délégués). La politique de rémunération, qui doit être présentée dans le rapport sur le gouvernement d'entreprise soumis à l'assemblée générale, décrit toutes les composantes de la rémunération de l'ensemble des mandataires sociaux. Ce vote ex ante est contraignant : aucun élément de rémunération, de quelque nature que ce soit, ne peut être déterminé, attribué ou versé par la société, et aucun engagement correspondant à des éléments de rémunération, des indemnités ou des avantages dus ou susceptibles d'être dus à raison de la prise, de la cessation ou du changement de fonctions ou postérieurement à l'exercice de celles-ci, ne peut en principe être pris par la société, s'il n'est pas conforme à la politique de rémunération approuvée par l'assemblée générale. Un vote dit ex post, également annuel, permet aux actionnaires de statuer sur les rémunérations et avantages de toute nature versés aux mandataires sociaux au cours de l'exercice écoulé ou attribués au titre de cet exercice, ainsi que sur les engagements de toute nature pris par la société et correspondant à des éléments de rémunération, des indemnités ou des avantages dus ou susceptibles d'être dus à raison de la prise, de la cessation ou du changement des fonctions ou postérieurement à l'exercice de celles-ci. Ce vote ex post se dédouble. Un premier vote, global, porte sur les rémunérations (au sens large) attribuées ou versées à l'ensemble des mandataires sociaux au cours du dernier exercice. Ce vote est contraignant : en cas de vote négatif, le conseil d'administration ou le conseil de surveillance, selon le cas, est tenu de soumettre une politique de rémunération révisée, tenant compte du vote des actionnaires, à la prochaine assemblée générale ; la rémunération des membres du conseil d'administration ou du conseil de surveillance est suspendue jusqu'à la décision de cette assemblée générale ; elle ne peut être versée que si cette assemblée générale approuve la politique de rémunération révisée. Une seconde série de votes, individuels, porte sur les rémunérations (au sens large) attribuées ou versées à chacun des dirigeants mandataires sociaux (par exemple, le président, le directeur général et le ou les directeurs généraux délégués dans les sociétés anonymes à conseil d'administration). Ce vote est également contraignant : en cas de vote négatif, les éléments de rémunération variables ou exceptionnels attribués au titre de l'exercice écoulé ne peuvent être versés. Cette sanction s'applique à l'ensemble des éléments de rémunération variables ou exceptionnels attribués au titre de l'exercice écoulé, quelle qu'en soit la forme ou la nature (en numéraire, en actions, ou toute autre forme ou nature de rémunération variable ou exceptionnelle telle qu'une indemnité de départ ou de non-concurrence). A titre d'illustration, une indemnité de départ ou de non-concurrence ayant fait l'objet d'une décision d'attribution en N est conditionnée au vote ex post individuel positif d'une assemblée générale tenue en N+1, un vote négatif faisant obstacle à son versement au moment du départ du dirigeant mandataire social. Ce nouveau dispositif a donc renforcé l'encadrement des rémunérations des mandataires sociaux des sociétés cotées en renforçant l'information et le contrôle des actionnaires. Il convient d'observer que les résolutions soumises aux assemblées générales d'actionnaires de sociétés cotées au titre de ce dispositif sont généralement celles qui font l'objet de la plus forte contestation – la contestation en la matière ne cessant d'ailleurs de s'accentuer au cours des dernières années. Cela témoigne de ce que les actionnaires de sociétés cotées se sont saisis des nouveaux droits d'information et de contrôle qui leur ont été reconnus par la loi en la matière.

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