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Marie-France Lorho
Question N° 3311 au Ministère de la culture


Question soumise le 28 novembre 2017

Mme Marie-France Lorho interroge Mme la ministre de la culture sur l'état des prérogatives des architectes des Bâtiments de France. À la demande du Président de la République, l'avant-projet de loi sur le logement s'est vu adjoindre d'un article visant à supprimer dans de nombreux cas l'avis conforme des architectes des Bâtiments de France. L'avis de ces professionnels risque ainsi de ne plus être exigé sur les sites immeubles non classés et considérés par les pouvoirs publics comme « insalubres ou en péril ». Sans plus de précisions, certains bâtiments anciens pourront donc être détruits ou modifiés sans qu'il ne soit fait recours à des professionnels du patrimoine. Cette mesure semble ne s'inscrire que dans une volonté politique du Président de la République, qui concède ainsi un pouvoir supplémentaire aux élus locaux qu'il vient de priver des précieuses subsides - taxe d'habitation. En aucun cas, le patrimoine des territoires ne peut constituer une telle monnaie d'échange ; les élus locaux ne sont pas aptes à définir les conditions d'intervention sur des bâtiments du patrimoine culturel, à l'inverse des architectes des Bâtiments de France. Par ailleurs, de nombreux bâtiments anciens ne bénéficient pas d'un classement au titre des bâtiments historiques ; il existe de nombreux monuments, notamment du début du XXe siècle - pour exemple, de la période Art nouveau - qui n'entrent pas dans le domaine des sites patrimoniaux remarquables ou qui ne sont pas intégrés des secteurs sauvegardés alors même que leur intérêt historique pourrait les y faire prétendre. Le silence de Mme le ministre de la culture sur cette privation des prérogatives des architectes des bâtiments de France suscite l'inquiétude des acteurs du patrimoine. Elle lui demande quelles dispositions elle compte prendre afin que ces professionnels du secteur puissent prévenir le viol de témoignages prestigieux du patrimoine français.

Réponse émise le 4 septembre 2018

Le code du patrimoine soumet à l'accord de l'architecte des Bâtiments de France (ABF) les travaux en abords de monuments historiques et en site patrimonial remarquable. Ces travaux relèvent, dans leur grande majorité, d'une autorisation au titre du code de l'urbanisme. Le code de la construction et de l'habitation et le code de la santé publique prévoient par ailleurs la consultation de l'ABF dans le cadre des procédures de péril et d'insalubrité, lorsque l'immeuble est inscrit au titre des monuments historiques, situé en abords de monuments historiques, dans un site patrimonial remarquable ou dans un site classé ou inscrit. Dans le cadre de ces procédures, les travaux prescrits par les pouvoirs publics font suite à une expertise associant l'ABF et cette concertation permet généralement d'aboutir à un avis favorable ou un avis favorable assorti d'observations sur les travaux d'urgence proposés qui permettent de garantir la sécurité et la santé et si nécessaire la préservation du patrimoine. L'article 15 du projet de loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN) prévoit de transformer « l'accord » de l'ABF en « avis simple », afin d'accélérer notamment les opérations de lutte contre l'habitat indigne. Cette disposition ne devrait concerner qu'un nombre relativement restreint d'opérations chaque année. Toutefois, afin de limiter les éventuels impacts sur le patrimoine, le dialogue entre l'ABF et l'autorité compétente devra être en tout état de cause favorisé dans un objectif de collégialité. La mission de conseil de l'ABF fait d'ailleurs partie de la stratégie pluriannuelle en faveur du patrimoine présentée par le ministère de la culture à la fin de l'année 2017. Par ailleurs, afin d'améliorer le dialogue en amont entre les services de l'État et leurs interlocuteurs sur les questions patrimoniales, un groupe de travail rassemblant des élus et des ABF a fait émerger des propositions. Une circulaire ministérielle en date du 6 juin dernier a ainsi été transmise à l'ensemble des préfets de région et des directeurs régionaux des affaires culturelles, afin de préciser les modalités de mise en œuvre de ces propositions selon trois axes : le développement d'une vision partagée en matière d'architecture et de patrimoine et l'amélioration de la prévisibilité des règles, la co-instruction et la collégialité des avis pour les projets les plus sensibles, le développement de la médiation dans le cadre des recours. Il s'agit de prioriser les missions des ABF, afin d'accompagner pleinement les politiques de revitalisation des cœurs de villes, de restauration des quartiers anciens et de mise en valeur des sites protégés, notamment les sites patrimoniaux remarquables et les abords de monuments historiques.

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