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Thomas Rudigoz
Question N° 33722 au Ministère de la culture


Question soumise le 10 novembre 2020

M. Thomas Rudigoz interroge Mme la ministre de la culture sur le jugement prononcé par la Cour de justice de l'Union européenne le 8 septembre 2020, donnant raison aux États-Unis d'Amérique dans leur réclamation de récupérer les fonds des droits d'auteurs d'artistes américains et récupérés par la SPRE sur le cours des 10 dernières années, et qui étaient jusqu'à présent considérés comme « irrépartissable » et donc reversés par l'ADAMI et la SPEDIDAM sous la forme de subventions aux événements et entreprises du monde de la culture. Les États-Unis n'ont pas indiqué leur intention, ni se sont engagés, à reverser les droits d'auteurs d'artistes français qu'ils ont touchés depuis 10 ans. Il lui rappelle que dans le contexte de crise actuelle qui a touché de plein fouet les acteurs du monde de la culture, la fin de ses subventions achèverait d'éteindre de nombreux acteurs et entreprises culturels partout en France. Il lui transmet son inquiétude ainsi que celle des acteurs de ce milieu dans sa circonscription, et le sentiment d'injustice qu'ils ont face à la non-réciprocité des États-Unis face à la France. Il demande à la ministre de la culture si elle envisage des négociations avec son homologue américain pour trouver un accord et ainsi ne pas reverser les fonds des droits d'auteur aux artistes américains, ou si elle envisage une compensation pour les acteurs culturels lésés.

Réponse émise le 5 janvier 2021

Par son arrêt du 8 septembre 2020, la Cour de justice européenne a décidé qu'il n'appartient pas aux législateurs nationaux d'évaluer la répartition des droits voisins au titre de la rémunération équitable vers les ressortissants d'États tiers. Une telle limitation de l'exercice du droit ne peut en effet résulter que d'un acte législatif européen. Ainsi, un État membre ne peut limiter de lui-même, sans que le droit de l'Union ne l'y autorise spécifiquement, le droit à rémunération équitable des ayants droit issus de pays tiers qui n'appliquent pas ce droit sur leur territoire. Cette décision vient bouleverser la pratique suivie jusqu'ici en France en application du principe de réciprocité matérielle des conventions internationales relatives aux droits voisins, puisque les droits à rémunération équitable collectés sur les phonogrammes issus d'États tiers ayant notifié des réserves à ces conventions étaient considérés comme des « irrépartissables juridiques ». Il en allait ainsi des collectes liées à la diffusion d'enregistrements américains, les États-Unis n'ayant pas signé la Convention de Rome de 1961 sur la protection des artistes-interprètes et exécutants. L'arrêt de la Cour de justice remet en cause l'usage de ces sommes « irrépartissables » qui apportent aujourd'hui une contribution essentielle à la production artistique française et à la vitalité artistique des territoires, les organismes de gestion collective d'artistes et de producteurs ayant l'obligation d'utiliser ces sommes à destination d'aides à la création et à la diffusion, tels que des festivals. Cette remise en cause, dans le contexte économique très difficile de la pandémie de Covid-19, est particulièrement lourde de conséquences. Le ministère de la culture se félicite ainsi de l'adoption de l'article 35 de la loi n° 2020-1508 du 3 décembre 2020 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière qui vise à sécuriser, pour le passé, le système français d'aides à la création et à la production musicale. Cet article valide en effet l'utilisation des sommes attribuées par le passé par les organismes de gestion collective au titre de l'aide à la création. Ce faisant, il répond à un motif d'intérêt général manifeste, qui est la promotion de la diversité culturelle et artistique. Pour l'avenir, le ministère de la culture a déjà fait part de sa préoccupation à la Commission européenne et les autorités françaises ont pris des initiatives auprès des autres États membres et des instances européennes, afin de conforter le dispositif français de rémunération équitable.

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