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Patricia Lemoine
Question N° 33754 au Ministère auprès du premier ministre


Question soumise le 10 novembre 2020

Mme Patricia Lemoine interroge Mme la ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances, sur le lancement d'une procédure de marché public concernant le 3919. Créé en 1992 par la Fédération nationale solidarité femmes (FNSF), le numéro 3919 « Violences femmes info » prend en charge toutes les femmes victimes de violences sur l'ensemble du territoire. Cette expérience de près de 30 ans permet aux professionnels des 73 associations partenaires d'écouter et accompagner ces femmes de manière efficace et adaptée, même durant les périodes de confinement où les appels ont particulièrement augmenté. C'est tout ce professionnalisme et cette efficacité qui risquent pourtant d'être balayés par le lancement d'un marché public pour la création d'une plateforme d'écoute. En effet, la crainte est grande parmi ces associations que le 3919 perde grandement en qualité et en efficacité en raison de sa gestion par une nouvelle entité, qui serait d'ailleurs soumise à un cahier des charges nécessairement sensible aux coûts. La création de cette plateforme correspond à une volonté du Président de la République d'étendre les fonctionnalités du 3919 à une plage horaire 24 h/24. Si cette volonté est parfaitement louable, elle aurait cependant pu s'appuyer directement sur la FNSF et son expérience dans la gestion du 3919, via la signature d'un nouveau contrat pluriannuel d'objectifs et des moyens (CPOM). L'extension de la plage horaire à 24 h/24 correspond d'ailleurs à un souhait de la FNSF déjà exprimé depuis les années 1990. Ainsi, dans le cadre de la priorité quinquennale qu'est la lutte contre les violences faites aux femmes et du risque qui pèse sur la qualité de service du 3919, elle lui demande si le Gouvernement songe à revenir sur cette procédure de marché public, à signer un nouveau CPOM avec la FNSF et à lui allouer des moyens supplémentaires pour qu'elle puisse étendre le fonctionnement du 3919 24 h/24.

Réponse émise le 15 décembre 2020

La Fédération Nationale Solidarité Femmes (FNSF) constitue depuis plusieurs années un partenaire privilégié de l'Etat en matière de lutte contre les violences au sein du couple. Il n'entend nullement remettre en cause cet engagement indéniable, ni la qualité de ses interventions, constamment soutenues. Il a du reste été présent à ses côtés pour soutenir cette action depuis sa création, ainsi que pour accompagner l'évolution du dispositif d'écoute vers un numéro court, plus facilement identifiable auprès des femmes victimes de violences, porté par la seule fédération via une plateforme nationale. L'Etat l'a d'ailleurs soutenu systématiquement par des subventions en constante augmentation. Toutefois, comme indiqué dès fin 2019 à la FNSF, il n'est pas possible juridiquement, au vu des règles de droit de la commande publique et européennes, de soutenir ce dispositif par subvention aussi bien dans le cadre d'un appel à projets que par conventionnement. Dès lors que l'Etat endosse le pilotage et la responsabilité d'un dispositif d'écoute des femmes victimes de violence, qu'il en définit les besoins à satisfaire et les modalités (notamment un fonctionnement 24h/24, l'accessibilité aux personnes en situation de handicap) et qu'il le financera en totalité, le marché public est le vecteur de l'action. Dans le cas contraire, le risque de requalification de la subvention en contrat serait important, avec un remboursement de la subvention. Cela emporterait également, à la fois pour les pouvoirs publics et l'association, des conséquences lourdes, sur les plans fiscal, pénal et civil. En l'espèce, le recours au marché public n'est pas un choix mais s'impose comme une conséquence. Cela ne signifie nullement une contestation des droits et propriétés dont l'association est détentrice, s'agissant des aspects matériels ou immatériels. Il serait quelque peu paradoxal d'en conclure que l'Etat, en se conformant au droit en vigueur, entre dans une logique mercantile quant à la prise en charge des femmes victimes de violences et privatise ce dispositif dont le financement sera assuré à 100% par l'Etat. Il est d'ailleurs noté que plusieurs dispositifs d'écoute téléphoniques dans le domaine des services sociaux relèvent déjà de marchés publics pilotés par l'Etat. Il s'agit par exemple du marché des numéros 116 000 pour les enfants disparus, 116 006 à destination des victimes ou encore de la plateforme 360 dédiée aux personnes en situation de handicap. Attentif par ailleurs aux risques soulevés par l'honorable parlementaire, l'Etat entend veiller au contraire via ce marché réservé aux acteurs de l'économie sociale et solidaire, à ce que cette future plateforme réponde à des hautes exigences qualitatives en termes de fonctionnement. Le Ministère et ses services seront ainsi très vigilants sur la qualité des projets présentés, notamment pour la formation des écoutantes et écoutants sur les violences, afin de renforcer l'écoute et l'accompagnement de ce public. La FNSF peut naturellement candidater dans le cadre de la consultation qui sera lancée à cet effet, au vu en particulier de l'antériorité de son action et des compétences spécifiques développées et capitalisées. Il est enfin signalé que l'Etat est interpellé sur les modalités de fonctionnement de ce dispositif et, tout récemment, lorsque la plateforme d'écoute a cessé son activité pendant quelques jours lors de la crise sanitaire et y a répondu en apportant une contribution financière complémentaire répondant aux besoins de la plateforme pendant cette période. Dans ce contexte, les pouvoirs publics n'entendent donc pas se défausser de leurs responsabilités mais au contraire accroitre leur soutien à l'écoute des femmes victimes de violences.

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