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Valérie Petit
Question N° 33939 au Ministère auprès du premier ministre


Question soumise le 17 novembre 2020

Mme Valérie Petit interroge Mme la ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances, sur le 3919, le numéro pour les femmes victimes de violence et son ouverture aux marchés publics. Le 3919 est un outil essentiel de la lutte contre les violences faites aux femmes : en effet, cette plateforme, accessible en continu de 9 heures à 22 heures, connectée à 73 associations en mesure d'aider et de soutenir les femmes en danger, est un dispositif d'intérêt général. Seulement, le Gouvernement a annoncé le lancement d'un marché public concernant le 3919, expliquant que le cadre juridique de la plateforme du 3919 entièrement financée par l'État nécessitait une commande publique. Or Mme la députée a été alertée par la Fédération nationale solidarité femmes (la FNSF) que ce marché public risque de fragiliser le dispositif d'urgence du 3919 : en effet, l'interconnexion aux 73 associations risque d'être anéantie par la mise en concurrence liée au marché public. Cette mesure, si elle est mise en place au détriment de la qualité de la prise en charge des femmes victimes de violences, va à l'encontre de la lutte contre les violences faites aux femmes établie comme la grande cause du quinquennat par le Président de la République. De plus, force est de constater que la FNSF a parfaitement su faire face aux appels du 3919 : environ 96 000 en 2019 et jusqu'à 1 000 par jour pendant le confinement. Cette augmentation nette est due à un autre enjeu majeur dans cette période de crise sanitaire, le confinement étant un facteur aggravant des violences intrafamiliales. Face au flot d'appels pendant le premier confinement, le FNSF a réussi à garantir la continuité du 3919. Mme la députée rappelle que la réponse à ces appels, qui constituent la plupart du temps des situations dramatiques et urgentes, nécessite une formation et une qualification importante, face au caractère délicat des situations. Elle l'interroge donc sur ses intentions concernant la commande de ce marché public, et rappelle que celle-ci ne doit pas se faire au détriment de la qualité de la prise en charge des femmes.

Réponse émise le 15 décembre 2020

La Fédération Nationale Solidarité Femmes (FNSF) constitue depuis plusieurs années un partenaire privilégié de l'Etat en matière de lutte contre les violences au sein du couple. Il n'entend nullement remettre en cause cet engagement indéniable, ni la qualité de ses interventions, constamment soutenues. Il a du reste été présent à ses côtés pour soutenir cette action depuis sa création, ainsi que pour accompagner l'évolution du dispositif d'écoute vers un numéro court, plus facilement identifiable auprès des femmes victimes de violences, porté par la seule fédération via une plateforme nationale. L'Etat l'a d'ailleurs soutenu systématiquement par des subventions en constante augmentation. Toutefois, comme indiqué dès fin 2019 à la FNSF, il n'est pas possible juridiquement, au vu des règles de droit de la commande publique et européennes, de soutenir ce dispositif par subvention aussi bien dans le cadre d'un appel à projets que par conventionnement. Dès lors que l'Etat endosse le pilotage et la responsabilité d'un dispositif d'écoute des femmes victimes de violence, qu'il en définit les besoins à satisfaire et les modalités (notamment un fonctionnement 24h/24, l'accessibilité aux personnes en situation de handicap) et qu'il le financera en totalité, le marché public est le vecteur de l'action. Dans le cas contraire, le risque de requalification de la subvention en contrat serait important, avec un remboursement de la subvention. Cela emporterait également, à la fois pour les pouvoirs publics et l'association, des conséquences lourdes, sur les plans fiscal, pénal et civil. En l'espèce, le recours au marché public n'est pas un choix mais s'impose comme une conséquence. Cela ne signifie nullement une contestation des droits et propriétés dont l'association est détentrice, s'agissant des aspects matériels ou immatériels. Il serait quelque peu paradoxal d'en conclure que l'Etat, en se conformant au droit en vigueur, entre dans une logique mercantile quant à la prise en charge des femmes victimes de violences et privatise ce dispositif dont le financement sera assuré à 100% par l'Etat. Il est d'ailleurs noté que plusieurs dispositifs d'écoute téléphoniques dans le domaine des services sociaux relèvent déjà de marchés publics pilotés par l'Etat. Il s'agit par exemple du marché des numéros 116 000 pour les enfants disparus, 116 006 à destination des victimes ou encore de la plateforme 360 dédiée aux personnes en situation de handicap. Attentif par ailleurs aux risques soulevés par l'honorable parlementaire, l'Etat entend veiller au contraire via ce marché réservé aux acteurs de l'économie sociale et solidaire, à ce que cette future plateforme réponde à des hautes exigences qualitatives en termes de fonctionnement. Le Ministère et ses services seront ainsi très vigilants sur la qualité des projets présentés, notamment pour la formation des écoutantes et écoutants sur les violences, afin de renforcer l'écoute et l'accompagnement de ce public. La FNSF peut naturellement candidater dans le cadre de la consultation qui sera lancée à cet effet, au vu en particulier de l'antériorité de son action et des compétences spécifiques développées et capitalisées. Il est enfin signalé que l'Etat est interpellé sur les modalités de fonctionnement de ce dispositif et, tout récemment, lorsque la plateforme d'écoute a cessé son activité pendant quelques jours lors de la crise sanitaire et y a répondu en apportant une contribution financière complémentaire répondant aux besoins de la plateforme pendant cette période. Dans ce contexte, les pouvoirs publics n'entendent donc pas se défausser de leurs responsabilités mais au contraire accroitre leur soutien à l'écoute des femmes victimes de violences.

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