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Robert Therry
Question N° 35761 au Secrétariat d'état à la biodiversité


Question soumise le 26 janvier 2021

M. Robert Therry interroge Mme la ministre de la transition écologique au sujet de l'avenir des moulins en France et du développement de la petite hydroélectricité sur le territoire. Si la loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat, dite « loi énergie climat », prévoit en son article 100-4 d'encourager « la production d'énergie hydraulique, notamment la petite hydroélectricité », il semblerait qu'aujourd'hui soit plutôt mise en avant la protection de la biodiversité (sans qu'aucune étude objective ne démontre un lien entre la présence des moulins et, par exemple, la diminution des populations piscicoles) plutôt que le développement de cette source d'énergie renouvelable, qui a pourtant démontré depuis longtemps sa fiabilité et sa régularité avec d'excellents bilan carbone et taux de retour énergétique, tout en étant bien acceptée par les citoyens. Les moulins constituent en outre un patrimoine inestimable. Or la France, au lieu de les protéger alors qu'ils sont précieux à plus d'un titre, les condamne. Ainsi l'Office français de la biodiversité oblige-t-il les propriétaires de moulins à choisir entre l'installation de passes à poissons (à leurs frais) et la destruction de leur chaussée prise en charge jusqu'à 100 % via des fonds publics. Il y a donc à la fois de moins en moins de moulins, au nom du rétablissement de la continuité écologique qui conduit directement à une politique d'arasement des ouvrages, et parallèlement de plus en plus de dispositifs de franchissements réalisés avec l'argent des contribuables, sans que ces destructions et nouvelles installations n'aient conduit à une augmentation significative des populations piscicoles. Il lui demande donc quelles mesures elle entend prendre pour préserver les moulins, encourager leur restauration à la fois au nom de la protection du patrimoine, du maintien d'un équilibre hydrologique indispensable aux écosystèmes des zones humides et aussi de la transition énergétique et écologique à laquelle il est avéré qu'ils peuvent largement contribuer.

Réponse émise le 3 août 2021

La biodiversité aquatique est particulièrement fragilisée en France : d'après les données 2019 de l'UICN (Union internationale pour la conservation de la nature), 28 % des crustacés et 39 % des poissons sont menacés, quand 19 % des poissons présentent un risque de disparition. Dans ce contexte, l'importance de la politique de restauration de la continuité écologique des cours d'eau a été réaffirmée lors des Assises de l'eau en juin 2019 et par le plan biodiversité de juillet 2018, qui prévoit de restaurer la continuité sur 50 000 km de cours d'eau d'ici à 2030. La stratégie biodiversité 2020 de la Commission européenne en fait également un enjeu majeur. La mise en œuvre de cette politique sur le terrain est toutefois délicate car elle doit être conciliée avec le déploiement des énergies renouvelables dont fait partie l'hydroélectricité, la préservation du patrimoine culturel et historique, ou encore les activités sportives en eaux vives. À ce jour, la politique de priorisation mise en oeuvre par le Gouvernement a permis d'identifier les cours d'eau sur lesquels il était important d'intervenir (11 % des cours d'eau), et sur ces cours d'eau, de procéder à des interventions sur environ 5 000 ouvrages. Dans la grande majorité des cas, la solution technique retenue a consisté à aménager l'ouvrage (mise en place d'une passe à poisson, d'une rivière de contournement, abaissement du seuil…), sans qu'il n'y ait suppression du barrage ou du seuil. Un article de la loi Climat et résilience, voté de manière conforme par les deux chambres du Parlement, édicte que, s'agissant des moulins à eau, l'effacement des seuils ne peut désormais constituer une solution dans le cadre de l'accomplissement des obligations relatives au franchissement par les poissons migrateurs et au transport suffisant des sédiments. Comme indiqué à l'Assemblée nationale et au Sénat, le Gouvernement regrette le choix des parlementaires d'avoir adopté cette disposition. En effet, l'effacement permet notamment de limiter la concentration des sédiments et des pollutions, et la disparition d'habitats diversifiés liés à la variation des niveaux d'eau d'une rivière courante et dynamique. En outre, il limite les dégâts lors de crues ou d'inondations. L'effacement total ou partiel d'un ouvrage permet donc de redonner vie aux cours d'eau. Par ailleurs, l'interdiction d'effacer ou de consacrer des aides publiques à l'effacement va contraindre tous les propriétaires d'ouvrages à assumer les dépenses d'entretien liés à leurs seuils même lorsqu'ils souhaiteraient les effacer. Or, cet entretien est jugé par certains propriétaires comme chronophage, coûteux et techniquement délicat : tous ne sont pas en mesure de l'assurer, notamment lorsque l'ouvrage est vétuste. Conformément à un amendement gouvernemental adopté dans la loi Climat et résilience, le ministère de la Transition écologique mettra en place un dispositif de conciliation et de médiation dédié aux questions de restauration de la continuité écologique et de développement de la petite hydroélectricité pour rechercher les solutions les plus pragmatiques aux situations de blocage qui ont été remontées à l'Assemblée nationale comme au Sénat. Il s'agira d'un dispositif à deux niveaux : un dispositif de conciliation au niveau local et, pour les cas ne trouvant pas de solution satisfaisante à ce niveau, l'intervention d'un médiateur national de l'hydroélectricité. Un bilan de ce dispositif sera présenté au Parlement conformément aux dispositions de la loi dans 3 ans. Par ailleurs les projets de restauration de la continuité écologique par aménagement d'ouvrages comme les passes à poissons ou les rivières de contournement peuvent continuer à bénéficier des aides des agences de l'eau.

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