M. Maxime Minot appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur l'octroi du label « agriculture biologique » aux fruits et légumes issus de la culture hydroponique, plus couramment connue sous le nom d' « agriculture hors sol ». Alors que depuis 2017, aux Etats-Unis, la certification biologique est accordée aux produits issus de certaines fermes pratiquant la culture hors sol, la France et l'Europe se refusent toujours d'accorder cette certification aux fruits et légumes issus de l'hydroponie. Pourtant, les agriculteurs pratiquant cette technique, utilisent les mêmes procédés de production que les agriculteurs « bio » et respectent le même cahier des charges. En outre, ce type de culture présente quelques avantages comme une meilleure maitrise des apports d'eau et en éléments minéraux, mais aussi des conditions de travail moins pénibles pour les cultivateurs. Enfin, il est à noter une différence de traitement entre les sortes de fruits ou légumes cultivés hors sol, sans motif légitime. En effet, par exemple, les endives cultivées hors sol peuvent se voir accorder le label « agriculture biologique », mais pas les fraises. Ainsi, il lui demande s'il entend mettre fin à cette incohérence en permettant à l'agriculture hors sol dans son intégralité de pouvoir bénéficier du label « agriculture biologique ».
L'agriculture biologique est encadrée au niveau européen par le règlement (CE) n° 834/2007 du Conseil du 28 juin 2007 relatif à la production biologique et à l'étiquetage des produits biologiques et abrogeant le règlement (CEE) n° 2092/91. Ce règlement édicte les principaux principes directeurs qui président à l'ensemble des règles de production biologiques contrôlées tout au long de la chaîne de production et de distribution des produits et donnant lieu à une certification à chaque étape. Parmi les principes directeurs, figure le « lien au sol » des cultures et des productions animales. Ce principe mentionné pour la production végétale au considérant 12 du règlement n° 834/2007 (« La production végétale biologique devrait contribuer au maintien et à l'amélioration de la fertilité des sols ainsi qu'à prévenir l'érosion des sols. Les végétaux devraient être nourris de préférence par l'écosystème-sol plutôt que par des engrais solubles ajoutés au sol. ») est précisément décrit à l'article 4 point a) ii) du même règlement : « La production biologique est fondée sur les principes suivants : a) concevoir et gérer de manière appropriée des procédés biologiques en se fondant sur des systèmes écologiques qui utilisent des ressources naturelles internes au système, selon des méthodes qui « recourent à des pratiques de culture et de production animale liées au sol. » En outre, l'article 5 confirme la fonction systémique de l'agriculture biologique qui a pour but de : « a) préserver et développer la vie et la fertilité naturelle des sols, leur stabilité et leur biodiversité, prévenir et combattre le tassement et l'érosion des sols et nourrir les végétaux principalement par l'écosystème du sol. » Par conséquent, l'hydroponie n'est pas autorisée en agriculture biologique. La culture d'endive, qui peut en effet bénéficier d'une certification biologique, déroge au principe général de lien au sol en raison des spécificités de la production de ce légume qui, de manière traditionnelle, nécessite une période de forçage à l'obscurité en dehors de la pleine terre. Le nouveau règlement européen pour l'agriculture biologique, le règlement (UE) n° 2018/848 du Parlement européen du Conseil du 30 mai 2018, qui entrera en application le 1er janvier 2022 et abrogera le règlement n° 834/2007, est encore plus précis concernant les cultures hydroponiques qui sont spécifiquement interdites à la partie I de l'annexe II « Exigences applicables à la production de végétaux » au point 1.2 : « La production hydroponique, qui est une méthode de culture consistant, pour des végétaux qui ne poussent pas naturellement dans l'eau, à placer leurs racines dans une solution d'éléments nutritifs uniquement ou dans un milieu inerte auquel est ajoutée une solution d'éléments nutritifs, est interdite. » En dérogation au principe de lien au sol rappelé au point 1.1 de la même partie (cf. Règlement (UE) n° 2018/848 – Annexe II, partie I, point 1.1 : « À l'exception de celles qui poussent naturellement dans l'eau, les cultures biologiques sont produites dans un sol vivant ou dans un sol vivant mélangé ou fertilisé avec des matières et des produits autorisés en production biologique, en lien avec le sous-sol et la roche-mère »), un projet d'acte délégué en cours d'examen précise les cas d'espèces pouvant déroger au principe de culture de pleine terre ; il s'agit des cultures qui poussent naturellement dans l'eau comme les graines germées, incluant les pousses et le cresson, qui utilisent pour germer exclusivement les réserves de la graine. Par conséquent, seule l'eau peut être utilisée pour la production biologique de ces cultures. De plus, ces dispositions sont nécessaires afin de maîtriser au mieux les risques sanitaires liées aux bactéries pathogènes pouvant se développer dans ces cultures (avis de l'Autorité européenne de sécurité des aliments - EFSA 2011 sur le risque que posent Escherichia coli producteur de shigatoxines et d'autres bactéries pathogènes dans les graines et les graines germées). Les endives sont également clairement mentionnées dans ce projet de texte compte tenu de la phase de forçage précédemment évoquée. Le texte indique toutefois que durant cette phase, toutes les substances utilisées dans le milieu de culture devront être spécifiquement autorisées. Ainsi, les dérogations accordées à ces végétaux seront désormais clairement encadrées. Le principe de la production de fraises biologiques repose sur l'utilisation d'un stolon biologique directement mis en terre (appelé couramment plant frais ou plant frigo en racines nues) ou sur l'utilisation de plants de fraisiers certifiés biologiques. En cas de non disponibilité de stolons biologiques, une dérogation peut être accordée conformément à l'article 45 du règlement (CE) n° 889/2008 afin de produire des plants certifiables biologiques à partir de stolons non biologiques non produits en pleine terre. Mais dans tous les cas, l'élevage jusqu'au stade de la vente de plants de fraisiers doit être conforme aux grands principes et aux règles qui régissent l'agriculture biologique avec notamment le lien de la plante au sol.
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