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Mme Frédérique Dumas attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur les mesures d'isolement et de contention pratiquées en psychiatrie et sur la nécessité de renforcer les contrôles sur ces dernières, notamment en ce qui concerne les patients mineurs. Selon le rapport « Les droits fondamentaux des mineurs en établissement de santé mentale » publié en 2017 par le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, un patient mineur hospitalisé en psychiatrie a moins de droits et voies de recours qu'un majeur hospitalisé sans son consentement. D'après l'Agence technique de l'information sur l'hospitalisation (ATIH), 18 257 mineurs ont été admis en hospitalisation complète en psychiatrie pour l'année 2015, parmi lesquels 197 l'ont été sur décision du représentant de l'État, 239 au titre d'une ordonnance de placement provisoire du juge des enfants mais aussi 42 au titre de l'article D. 388 du code de procédure pénale (mineurs détenus et admis sur décision du préfet) et 5 au titre de l'article 706-135 du code de procédure pénale (après une décision d'irresponsabilité). À la lumière de ces statistiques, on note donc que les hospitalisations de mineurs décidées par un juge judiciaire ne constituent que 2 % du total des hospitalisations de mineurs en psychiatrie. 98 % des hospitalisations complètes de mineurs sont actuellement décidées par les titulaires de l'autorité parentale ou par le directeur de l'établissement de l'Aide sociale à l'enfance pour le cas où le mineur est placé en foyer et en famille d'accueil (services de l'Aide sociale à l'enfance). Ces hospitalisations de mineurs entrent dans la catégorie « soins libres » du code de la santé publique. Or, selon le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, « la notion de soins libres, théoriquement liée à celle de libre consentement, est particulièrement délicate en psychiatrie ; elle n'est garantie par aucun document, matérialisée par aucune signature du patient. S'agissant des mineurs, la décision d'hospitalisation appartient en premier lieu, aux titulaires de l'autorité parentale ou au tuteur ; selon le code de la santé publique, elle peut aussi intervenir à la demande du directeur de l'établissement ou du service à qui le mineur a été judiciairement confié. Dans ces hypothèses qui toutes sont assimilées aux soins libres, la décision n'appartient pas au mineur quand bien même la loi prescrit de recueillir son avis ». Toujours selon le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, « au mineur, l'hospitalisation peut être totalement imposée par un tiers - ses parents, voire le directeur de l'établissement qui l'accueille - sans qu'il bénéficie des garanties reconnues aux majeurs en situation comparable : il n'est pas nécessaire de justifier qu'il présente des troubles mentaux rendant impossible son consentement ; il n'est pas exigé que son état mental impose des soins immédiats assortis d'une surveillance médicale constante ; il n'est pas exigé que la demande soit accompagnée de deux certificats médicaux circonstanciés datant de moins de quinze jours dont l'un émanant d'un médecin n'exerçant pas dans l'établissement d'accueil. Et pourtant, ce type d'hospitalisation, qui n'a de libre que le nom, n'est pas soumis au contrôle du juge. Tout se passe comme si ces "tiers" étaient présumés agir dans l'intérêt de l'enfant, le médecin de l'établissement d'accueil en étant le meilleur garant ». En 2017, le Contrôleur publiait ainsi 23 recommandations pour réformer la loi actuelle et renforcer le droit des mineurs en psychiatrie, notamment en proposant l'abrogation de l'alinéa 2 de l'article R. 1112-34 du code de la santé publique de façon à supprimer la possibilité d'internement d'un mineur à la demande d'un directeur d'établissement de l'Aide sociale à l'enfance ; pour le cas des mineurs hospitalisés à la demande de leurs représentants légaux, en leur permettant de saisir la commission départementale des soins psychiatriques, et lorsqu'ils contestent la nécessité de l'hospitalisation, en leur permettant de saisir le juge des libertés et de la détention. C'est ainsi qu'en France, plus de 18 000 enfants et adolescents sont placés en psychiatrie. Ils ne sont pas informés de leurs droits et n'ont aucune possibilité de contester l'hospitalisation psychiatrique auprès du juge judiciaire comme c'est pourtant toujours le cas pour les majeurs hospitalisés sous contrainte. Un mineur doit pouvoir s'exprimer et donner son avis sur son hospitalisation et avoir des voies de recours, étant rappelé qu'une hospitalisation abusive avec un traitement médicamenteux peut entraîner de graves effets délétères. Elle lui demande donc quelles mesures il compte entreprendre pour renforcer les droits des mineurs hospitalisés en psychiatrie et mettre en vigueur les recommandations du Contrôleur général des lieux de privation de liberté.
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