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Philippe Benassaya
Question N° 36752 au Ministère auprès de la ministre des armées


Question soumise le 2 mars 2021

M. Philippe Benassaya interroge Mme la ministre déléguée auprès de la ministre des armées, chargée de la mémoire et des anciens combattants, sur l'allocation viagère instituée par l'article 133 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016. En effet, les demandes pour bénéficier de cette allocation devaient être déposées dans un délai court d'un an à compter du décès du titulaire direct de l'allocation de reconnaissance et avant le 31 décembre 2016 pour les veuves de harkis décédés avant le 1er janvier 2016. L'ONAC a ainsi rejeté une centaine de dossiers au motif qu'ils étaient déposés après la date limite ou incomplets. Aussi, pour les dossiers jugés recevables mais déposés en cours d'année, l'ONAC a versé des allocations viagères au prorata du temps restant à courir jusqu'au 31 décembre 2016, alors même que le montant de l'allocation viagère est dû pour l'année. Faisant preuve de souplesse, certains services départementaux de l'ONAC ont versé rétroactivement les pensions dues, traité les dossiers incomplets et informé les bénéficiaires, mais ce n'est pas le cas de tous, dont ceux de la région Centre-Val de Loire. Ces difficultés ont été soulevées par les associations de harkis de cette région dans le cadre des réunions du comité régional de concertation pour les harkis mis en place en 2014, et portées à la connaissance de la directrice générale de l'ONAC. En particulier, l'absence de directives aux services instructeurs et d'informations précises en direction d'un public âgé et parfois analphabète pose problème pour le dépôt d'un dossier dans les temps. De surcroît, le mécanisme de forclusion des demandes d'allocations illustre certaines insuffisances et prive de nombreux conjoints ou ex-conjoints d'anciens harkis de cette allocation et introduit dans un dispositif déjà fort complexe une discrimination entre les bénéficiaires, à savoir que certaines veuves, dont les époux ont choisi la perception d'un capital de 30 000 euros, touchent la nouvelle allocation viagère, d'un montant mensuel parfois supérieur à celui des veuves dont les maris sont décédés avant la création de l'allocation. Par conséquent, cette situation suscite un sentiment d'injustice parmi les bénéficiaires. Il souhaite donc interroger le ministère sur la possibilité de régulariser rétroactivement les dossiers litigieux, y compris ceux déposés après le 31 décembre 2016, et de lever la forclusion de l'allocation viagère dans l'intérêt d'un public âgé et en difficulté. Par ailleurs, il demande s'il n'aurait pas été plus juste d'instituer une réversion automatique de l'allocation de reconnaissance plutôt que de créer l'allocation viagère, voire de faire bénéficier les conjoints survivants de l'allocation de reconnaissance au même titre que leurs époux décédés.

Réponse émise le 13 avril 2021

L'allocation viagère instituée par l'article 133 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016 a été instaurée dans un souci de rétablir une égalité de traitement à la suite de la forclusion de l'allocation de reconnaissance prévue par la loi du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés. Le dispositif unique d'allocation mensuelle est ainsi venu remplacer les 3 options de l'allocation de reconnaissance préalablement existante, qui pouvait prendre la forme : soit d'une rente annuelle versée mensuellement, soit d'une rente moins importante versée selon les mêmes modalités, assortie d'un capital immédiat de 20 000 euros, soit d'un capital immédiat de 30 000 euros pour solde de tout compte. Ce dispositif a vocation à supprimer les inégalités perçues entre veuves selon le choix de versement qu'elles avaient effectué lors de leur demande d'allocation de reconnaissance. Toutefois, les choix antérieurs à la création de l'allocation viagère sont définitifs et ne peuvent être remis en cause. Son attribution a également été élargie à un plus grand nombre de bénéficiaires car la condition d'âge (60 ans),  de même que la qualité de rapatrié, ne sont plus requises pour en bénéficier. Depuis 2018, il appartient au Bureau Central des Rapatriés (BCR) de l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) d'assurer l'instruction des aides pérennes accordées aux rapatriés. Cette instruction centralisée vise notamment à homogénéiser les pratiques de gestion des diverses mesures mises en œuvre au profit des rapatriés pour un traitement unique. Concernant l'allocation viagère, il convient de faire une distinction entre la veuve dont l'époux est décédé avant la date d'entrée en vigueur de la loi du 29 décembre 2015 susmentionnée (soit le 1er janvier 2016), qui doit avoir déposé sa demande avant le 31 décembre 2016, et la veuve dont l'époux est décédé après le 1er janvier 2016, qui dispose d'un délai d'un an à compter du décès pour formuler sa demande. Dans ce cadre, le versement de l'allocation viagère se fait au premier jour du mois qui suit la demande, et s'effectue au prorata de l'année due. Ce versement peut toutefois faire l'objet d'un versement rétroactif partiel, tenant compte de la complétude du dossier et des délais de procédure. Concernant les modalités de revalorisation de l'allocation, une réévaluation de son montant tenant compte de l'évolution des prix hors tabac intervient, chaque année, au 1er octobre. Cette allocation a cependant été revalorisée plusieurs fois en dehors de ce dispositif dans le cadre des lois de finances, de 700 euros entre 2017 et 2020. Au premier janvier 2021, 154 demandes ont été rejetées pour forclusion, soit parce que la demande avait été déposée après le 31 décembre 2016 pour les veuves dont les époux étaient décédés avant le premier janvier 2016, soit par ce que cette demande avait été déposée plus d'un an après le décès du conjoint. Dans le cadre des instructions menées par le BCR, aucun dossier n'a été rejeté au motif qu'il était incomplet, le service instructeur veillant à obtenir l'ensemble des documents nécessaires à l'obtention de cette allocation. Il n'est pas envisagé de mettre en place une réversion automatique de l'allocation de reconnaissance dans la mesure ou la décentralisation passée de ces aides ne permet pas à ce jour de suivre les bénéficiaires ayant opté pour l'option du capital unique. Par ailleurs, l'allocation viagère est ouverte à l'ensemble des veuves non remariées au prorata de vie commune, dans les délais impartis par la forclusion. Toute évolution d'état civil depuis l'ouverture des droits (divorce, remariage) ne peut être connu qu'au moment de l'ouverture d'une demande par l'une des veuves, tant au regard des documents d'état civil du défunt, que de celui des demandeuses. S'il est regrettable que certaines veuves de harkis, ayant déposé une demande tardivement, se soient vu opposer un rejet pour cause de forclusion, il n'en demeure pas moins que les délais prévus par le législateur sont d'application stricte, ainsi que le rappelle la jurisprudence. Il convient de préciser que les dispositifs de forclusion ne sont pas spécifiques à ces mesures mais sont applicables à de nombreuses autres indemnités. Enfin, les veuves d'anciens supplétifs sont ressortissantes de l'ONACVG et peuvent, à ce titre, solliciter les aides sociales dispensées par l'office, qui demeure à leur écoute.

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