Mme Mireille Robert interroge Mme la ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l'autonomie, sur les problèmes humains, médicaux et sociaux que pose la protection des majeurs vulnérables, dans le cadre de la politique du grand âge. La protection des majeurs vulnérables a bénéficié ces récentes années d'aménagements, notamment en matière de renforcement de leurs droits juridiques et civiques (loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice). Avec le vieillissement de la population, de plus en plus de personnes âgées ou handicapées perdent leur autonomie. Du fait de l'éloignement des familles, de leurs tensions internes ou de leurs propres incapacités, les mesures de protection, mises sous curatelle simple ou renforcée, ou sous tutelle, concernent désormais plus de 730 000 personnes. Ce chiffre est appelé à augmenter à l'avenir. Les organismes de tutelle se multiplient, sans toujours présenter les meilleures garanties de transparence et d'efficacité. De nombreux dysfonctionnements sont régulièrement signalés, tant dans la gestion financière que dans le suivi et le contrôle de ces organismes, souvent sous le statut d'associations. En 2018, Anne Caron Déglise, avocate générale à la Cour de cassation, remettait un rapport de mission interministérielle sur l'évolution de la protection juridique des personnes vulnérables. Ses conclusions, très diverses, tendaient vers un même constat : la protection des personnes vulnérables comporte de nombreuses lacunes, négligeant la diversité des situations, une piètre prise en compte des souhaits des personnes protégées, une absence de soutien à l'autonomie, voire des entorses à cette dernière. Le rapport soulignait la nécessité de sauvegarder les droits des personnes protégées, de contrôler effectivement et efficacement la gestion de leurs ressources et de mieux former les mandataires. Si l'application de ces impératifs de bonne gestion laisse bien trop souvent à désirer (gestion « légère », mesures vexatoires de privation d'argent de poche, opacité de certains comptes), leur traitement est déjà encadré assez clairement par la loi. Une autre dimension bien plus tragique était abordée en parallèle, celle du droit de la protection sociale et du suivi médical, abandonnés au désert inter-administrations. Le rapport insistait sur « une appréciation des besoins des personnes présentant des altérations de leurs facultés personnelles, et en particulier psychiques ou cognitives, par une évaluation médico-sociale pluridisciplinaire et multidimensionnelle ». Plus loin, il précisait que « les personnes ayant des troubles psychiques sévères et persistants souffrent généralement d'un grand isolement, d'une perte de capacité à réaliser les actes de la vie quotidienne. Ces effets amènent fréquemment les personnes à la perte de leur logement, à l'errance et à l'exclusion sociale ». Force est de constater que les curateurs tuteurs et les organismes dont ils dépendent ne s'occupent pas de cet aspect médico-social. Les personnes vivant à domicile et souffrant de troubles cognitifs, psychiques ou plus généralement médicaux sont généralement abandonnées à elles-mêmes. Les visites médicales ne sont pas respectées, les traitements non suivis et les mises en danger permanentes. Les mandataires ne prennent souvent même pas la peine de visiter physiquement les personnes et les organismes de tutelles sont aux abonnés absents. La dégradation due à l'âge impose pourtant des évaluations régulières si l'on veut préserver le maintien à domicile, qui est souvent la seule solution. Quels dispositifs pourraient être envisagés pour compléter les règles encadrant la profession de mandataire, notamment en matière médicale, psychiatrique et sociale ? Quelle évolution, quels contrôles réels et à quelle fréquence peut-on les proposer pour réguler l'exercice du mandataire ? Elle lui demande enfin comment s'assurer que les mesures de protection soient intégrées au cœur de la réforme de la perte d'autonomie et du grand âge.
La crise sanitaire a mis en lumière l'importance des mandataires judiciaires à la protection des majeurs (MJPM) créés par la loi du 5 mars 2007, qui mettent en œuvre les mesures de protection judiciaire (tutelle et curatelle notamment) au bénéfice des personnes vulnérables. Plus que la population générale, les personnes protégées sont les premières concernées par le risque d'isolement et la survenance de symptômes anxieux ou dépressifs. Depuis plusieurs années, les mandataires sollicitent une réforme de leur statut. Un groupe de travail interministériel travaille depuis un an sur ce sujet et des propositions de mesures qui apportent des réponses concrètes à cette revendication sont à l'étude. La définition des missions des mandataires, l'élaboration d'une charte éthique et déontologique, la révision de la formation initiale et continue, la revalorisation de leur profession, la mise en place d'un système de signalement des situations de maltraitances commises à l'encontre des personnes vulnérables, font ainsi partie des évolutions envisagées par ce groupe de travail. D'autre part, le Gouvernement a décidé de renforcer de façon significative les crédits alloués aux mandataires judiciaires afin d'améliorer l'attractivité de leur métier et de permettre le recrutement d'effectifs supplémentaires. 8,1 millions d'euros supplémentaires sont ainsi engagés dès 2022 pour ces professionnels qui œuvrent au quotidien à la protection de personnes âgées et/ou en situation de handicap, et vulnérables. Ces crédits supplémentaires, qui s'ajoutent aux 19,7 millions d'euros déjà prévus, viendront à terme amplifier la démarche que porte le Gouvernement en faveur de la formation et de l'attractivité de cette profession. 200 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires pourront être ainsi embauchés au sein des services mandataires de la protection juridique des majeurs. La formation continue des mandataires en exercice deviendra quant à elle obligatoire. En outre, pour accompagner la structuration de la profession, la ministre déléguée chargée de l'autonomie une carte professionnelle pour les MJPM a été créée. Le programme de transformation numérique de la protection juridique des majeurs, appelé « Mandoline », est désormais en cours de déploiement. Il a pour but de dématérialiser les processus administratifs et financiers qui concernent la protection juridique des majeurs. Cette dématérialisation vient faciliter les procédures d'habilitation à exercer des MJPM, la gestion des listes de MJPM habilités, renforcer l'information des juges sur la capacité disponible des MJPM, organise les processus de financement, de tarification et de paiement des services et des mandataires individuels et facilite la réalisation des enquêtes nationales. Ce programme permet également de renforcer les capacités de pilotage et de gestion prévisionnelle de cette politique aux niveaux national et territorial. Le Gouvernement a donc mobilisé plusieurs leviers pour améliorer l'attractivité de la profession de mandataire judiciaire à la protection des majeurs et donc pour assurer les intérêts et les besoins des besoins des personnes vulnérables et protégées.
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