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Alexis Corbière
Question N° 37756 au Ministère de la transition écologique


Question soumise le 30 mars 2021

M. Alexis Corbière attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique sur la prolifération des algues vertes sur les communes du littoral, principalement en Bretagne. Depuis quatre décennies, le fléau de ces algues toxiques revient chaque année sur les côtes bretonnes, et s'étend désormais de la Normandie jusqu'à la Gironde. Après avoir été reconnu responsable de leur prolifération par une décision de justice du 1er décembre 2009, l'État a été sommé d'agir. Il en a résulté des promesses, des plans et des budgets, mais aucune remise en cause des pratiques agricoles intensives à l'origine du phénomène. Pire, le 24 décembre 2018, le Gouvernement a déposé un nouveau décret pour simplifier encore les autorisations de fermes-usines. Elles sont plus de 1 700 en Bretagne et chacune d'elle dégage de l'ammoniaque et des excès de nitrates, polluant les eaux et les sols de la région. Depuis 1960, le taux de nitrate par litre a été multiplié par six, et sa réglementation à 50 milligrammes par litre n'est pas uniformément appliquée. Pour cause, les plans de l'État se basent sur une adhésion volontaire des pollueurs potentiels aux « bonnes pratiques », sous pression des lobbies de l'agro-industrie. Face à cette faiblesse, pourquoi ne pas contrôler et sanctionner ceux qui ne respectent pas ces règles ? Les risques sont pourtant bien connus. Les plages polluées, désertées et fermées sont loin d'être la seule conséquence visible des algues vertes. En entrant en putréfaction, elles dégagent de l'hydrogène sulfuré, « un gaz qui, à concentration élevée, peut s'avérer mortel en quelques minutes » selon André Ollivro, le président de l'association Halte aux marées vertes qui bataille depuis 2001 pour éradiquer ce phénomène. L'association suspecte ainsi plusieurs décès d'hommes et plusieurs dizaines de décès d'animaux recensés depuis les années 1970. Ce constat impose des mesures d'urgences. M. le député demande donc à l'État d'agir sur le volet préventif par l'interdiction des fermes-usines sur l'ensemble du territoire. La Convention citoyenne pour le climat l'avait réclamé, et comme beaucoup d'autres propositions, le Gouvernement l'a ignorée. Il demande aussi une action étatique sur le volet curatif, en renforçant les mesures de ramassage des algues et en durcissant la réglementation sur les nitrates.

Réponse émise le 15 mars 2022

La préservation de la qualité de l'eau en Bretagne et la lutte contre la pollution par les nitrates du fait d'une pression agricole importante sur les milieux est depuis de nombreuses années une des priorités du Gouvernement. En application de la directive européenne « nitrates », des mesures réglementaires contraignantes pour les exploitants agricoles s'appliquent dans le périmètre des zones vulnérables, où la qualité des eaux est insuffisante pour le paramètre « nitrates ». Ces mesures sont définies dans le « programme d'actions national nitrates » (PAN), et complétées et renforcées par les « programmes d'actions régionaux nitrates » (PAR). Ces programmes sont réexaminés tous les quatre ans et complétés si nécessaire pour atteindre les objectifs de qualité de l'eau. La Bretagne est aujourd'hui la région qui dispose du cadre réglementaire le plus avancé pour gérer les pratiques de fertilisation, avec notamment le dispositif de surveillance des épandages d'azote et le plafonnement des quantités épandables à l'échelle des départements ainsi que des actions renforcées sur les zones à enjeux, notamment dans les huit bassins versants alimentant les principales zones d'échouage d'algues vertes. En ce qui concerne spécifiquement le problème des échouages d'algues vertes, un « plan de lutte contre les algues vertes » (PLAV) est mis en œuvre depuis 2010 sur le territoire des huit bassins mentionnés plus haut. Ce plan comprend principalement : un volet curatif axé sur une politique de ramassage d'algues échouées sur les plages sableuses ; un volet préventif comprenant des mesures d'application volontaire par les agriculteurs des territoires concernés, qui sont soit des mesures dont les exigences vont au-delà de ce qui est prescrit réglementairement par le PAR (mesures techniques visant à limiter la pression azotée sur le milieu ou à améliorer l'équilibre de la fertilisation des cultures afin de limiter les excès de fertilisant apporté au milieu), soit des mesures innovantes participant à un changement de pratiques agricoles et à une transition vers l'agroécologie. Ces mesures sont mentionnées dans le PAR breton au titre des actions à mener dans les ZAR (zones d'actions renforcées). La mise en œuvre de ces dispositifs réglementaires ou volontaires a eu pour conséquence une baisse continue des teneurs en nitrates des eaux en Bretagne. En 2019, la concentration moyenne en nitrates dans les rivières s'établissait à environ 34 mg/l, contre 58 mg/l en 1998. Cette baisse, quoique significative, reste encore insuffisante pour faire diminuer les échouages d'algues de façon importante, et par conséquent les efforts doivent être poursuivis pour que les teneurs en nitrates des eaux bretonnes continuent de baisser. L'évaluation de la politique publique de lutte contre la prolifération des algues vertes en Bretagne réalisée par la Cour des comptes et publiée en juillet dernier souligne également que les résultats n'ont pas été atteints. La Cour recommande de reconduire ce plan tout en améliorant son efficacité. Le jugement du tribunal administratif de Rennes du 4 juin 2021, saisi par l'association Eau et rivières de Bretagne, va également dans ce sens, puisqu'il enjoint le préfet de la région Bretagne à renforcer le programme d'actions régional nitrates sur le volet des algues vertes. Afin de répondre aux recommandations des évaluations de la Cour des comptes et de la Commission des finances du Sénat, ainsi qu'aux injonctions du Tribunal administratif de Rennes, le préfet de la région Bretagne a renforcé, par un arrêté du 18 novembre 2021, son programme d'actions régional nitrates par des mesures complémentaires, plus ambitieuses et plus contraignantes : cinq nouvelles mesures seront mises en œuvre dans les huit bassins versants à algues vertes et le dispositif contractuel et réglementaire de zones soumises à contrainte environnementale (ZSCE) sera renforcé.

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