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Éric Bothorel
Question N° 37791 au Ministère auprès de la ministre de la transition écologique


Question soumise le 30 mars 2021

M. Éric Bothorel attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique sur les imperfections de la règlementation actuelle destinée à lutter contre le bruit des infrastructures routières. Les articles R. 571-44  et R. 571-45 du code de l'environnement posent les principes de la protection contre le bruit des bâtiments riverains des projets d'infrastructures ou des infrastructures existantes devant être aménagées ou modifiées. Toute route nouvelle ou route existante modifiée de manière significative (augmentation de l'émission après travaux supérieure à 2 dB(A)) ne peut dépasser, de nuit comme de jour, des seuils déterminés d'impact sonore en façade des bâtiments riverains. Le maître d'ouvrage de l'infrastructure est ainsi soumis à une obligation de résultat : il se doit d'assurer une protection antibruit respectant la réglementation. Cependant, l'article R. 571-46 du code de l'environnement exclut expressément certains travaux, dont l'entretien, de ce dispositif de protection. Par ailleurs, pour des raisons essentiellement budgétaires, certains départements recourent à des techniques d'entretien des voiries parfois moins coûteuses mais générant une pollution plus importante : pollution sonore, augmentation de la consommation de carburant et donc du gaz carbonique, augmentation de l'usure des pneus et donc des microparticules. L'emploi de certains revêtements annule en effet l'amélioration obtenue en matière de pollution sonore par les normes imposées pour les bruits de moteurs, et le frottement des pneumatiques sur la chaussée. En conséquence, des travaux de faible ampleur peuvent aboutir à une augmentation très importante du bruit. Ceci est par exemple le cas lorsqu'un enrobé est remplacé par un enduit superficiel d'usure. L'écart de bruit entre un enrobé drainant et un enduit superficiel d'usure à granulat 10/14 est en effet estimé en 11 décibels, bien au-delà des décibels évoqués ci-dessus. Cette situation engendre également un risque contentieux : en l'absence de définition précise de la notion d'entretien, le juge administratif pourrait requalifier des travaux ayant un tel impact en modification significative, contraignant alors les collectivités à réaliser des travaux pour respecter cette limitation. Dès lors, il semble nécessaire de faire évoluer le cadre juridique pour permettre une mise en œuvre plus claire et plus simple des objectifs environnementaux. Plusieurs évolutions sont envisageables à ce titre : supprimer l'article R. 571-46 du code de l'environnement, qui prévoit des exceptions à la prise de mesures destinées à éviter que le fonctionnement de l'infrastructure ne crée des nuisances sonores excessives ; étendre l'objectif de réduction du bruit prévu à l'article 15 de la loi du 31 décembre 1992 sur le bruit (moins de 60 décibels) à l'ensemble des routes nationales et départementales et non uniquement à celles concernées par les points noirs du bruit ; revoir la notion de point noir du bruit dont le niveau, trop élevé, est aujourd'hui fixé par une circulaire ; prendre en compte la consommation et l'usure des pneus dans les critères de pose des revêtements en excluant les plus polluants des routes nationales et départementales. Dans ce contexte, il souhaite connaître les intentions du Gouvernement en la matière ainsi que son avis sur les propositions formulées ci-dessus.

Réponse émise le 14 décembre 2021

L'article R.571-46 du code de l'environnement précise les travaux et aménagements qui ne constituent pas une modification ou une transformation significative au sens de l'article R. 571-44 du même code. Ainsi la réglementation exclut notamment de l'obligation de faire une étude acoustique, le renforcement de chaussées, l'entretien ou les réparations routières. Toutefois, cette exemption ne bénéficie pas aux voies construites après le 10 janvier 1995 qui restent soumises à une obligation de résultat en application de l'article R. 571-44. En effet il convient de rappeler que cet article prévoit que « La conception, l'étude et la réalisation d'une infrastructure de transports terrestres nouvelle ainsi que la modification ou la transformation significative d'une infrastructure de transports terrestres existante sont accompagnées de mesures destinées à éviter que le fonctionnement de l'infrastructure ne crée des nuisances sonores excessives. ». Ainsi toute infrastructure mise en service ou modifiée depuis la mise en application de cette réglementation doit respecter les seuils réglementaires sans contrainte de temps. Le gestionnaire doit respecter cette obligation de résultat tout au long de la vie de l'infrastructure. Pour ces infrastructures, tout changement de revêtement, toute opération d'entretien ne saurait avoir un impact entraînant un dépassement des seuils réglementaires y compris lors des opérations et de maintenance ultérieures qui doivent notamment garantir le maintien des dispositifs de protection acoustique prévus dès l'origine pour le respect des seuils. Le Gouvernement agit sur le réseau routier national dans la lutte contre les points noirs du bruit (circulaire du 12 juin 2001 relative à la création des observatoires du bruit et à la résorption des points noirs du bruit). Ces derniers sont définis à l'article D. 571-54 du code de l'environnement. S'ils ne concernent, effectivement, que le réseau routier national et le réseau ferré national, les seuils sont bien précisés dans un arrêté interministériel du 3 mai 2002.  Cependant, un autre outil existe et concerne l'ensemble des gestionnaires d'infrastructures susceptibles de générer des nuisances sonores pour les riverains. En effet, la transposition de la directive 2002/49/CE sur l'évaluation et la gestion du bruit dans l'environnement requiert la réalisation de cartes de bruit stratégiques et de plans de prévention du bruit dans l'environnement (PPBE). Cette directive concerne toutes les routes, quel que soit le gestionnaire, connaissant un trafic supérieur à 8 200 véhicules/jour. Plus particulièrement, l'article L. 572-6 du code de l'environnement prévoit notamment que les PPBE comportent une évaluation du nombre de personnes exposées à un niveau excessif, identifient les sources des bruits dont les niveaux devraient être réduits et qu'ils recensent les mesures permettant de traiter les situations identifiées par les cartes de bruit stratégiques, en particulier lorsque les valeurs limites sont dépassées ou risquent de l'être. Ces valeurs limites ont été fixées dans l'article 7 de l'arrêté du 4 avril 2006 relatif à l'établissement des cartes de bruit stratégiques et des PPBE. Elles correspondent également aux seuils des points noirs du bruit, selon l'indicateur européen. Ces démarches constituent pour le gestionnaire des outils adéquats à la mise en place d'une politique d'amélioration de l'environnement sonore autour de ses infrastructures. Par ailleurs, l'ensemble de ces éléments garantit l'information des riverains : ils sont mis à la consultation du public lors de leur élaboration puis à la disposition du public une fois adoptés. Ils font l'objet d'un réexamen, et le cas échéant d'une révision tous les cinq ans. Enfin, la question d'exclure l'usage de revêtements routiers peu performants sur le plan acoustique est plus complexe et pose entre autres des questions d'efficacité technique et économique. L'entretien des voies répond en effet prioritairement à des enjeux de sécurité pour les usagers et représente des dépenses importantes pour les gestionnaires. Les revêtements présentant de bonnes caractéristiques acoustiques présentent d'une manière générale une résistance mécanique moindre que les produits classiquement utilisés et voient par ailleurs leur performance acoustique diminuer au bout de quelques années sans atteindre pour autant les niveaux sonores obtenus sur des enrobés classiques de même âge. Par ailleurs les prescriptions techniques propres aux qualités acoustiques de ces revêtements imposent la recherche d'un équilibre technique complexe qui ne doit pas négliger les qualités d'adhérence indispensables à la sécurité des usagers. Exclure par défaut tous les enrobés dont la rugosité use le plus rapidement les pneumatiques pourrait aboutir à interdire des enrobés nécessaires dans certaines configurations géotechniques ou météorologiques ou encore de trafic. Au-delà des expériences en cours sur le réseau routier national, notamment en Île-de-France, le Gouvernement privilégie l'amélioration des guides techniques et des normes pour avancer sur les préconisations de restrictions d'usage. À ce titre, un travail sera prochainement mis en place par l'Association française de normalisation) et le Centre d'études et d'expertise sur les risques (AFNOR), l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema) afin de mieux intégrer cet aspect dans leurs publications.

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