M. Nicolas Meizonnet alerte Mme la ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement, sur l'inquiétude des professionnels des secteurs de la construction et du bâtiment concernant la nouvelle réglementation environnementale 2020. Interpellé par une société toulousaine de 810 salariés dont 54 sur le site de Codognan, dans sa circonscription du Gard, M. le député constate la vive appréhension du secteur à l'échelle nationale vis-à-vis de cette nouvelle norme et de la nouvelle méthode de calcul des émissions de gaz à effet de serre des matériaux qu'elle induit. Alors que l'expérimentation E+C- conduite depuis plusieurs années montrait des résultats satisfaisants et a été accueillie avec beaucoup de bonne volonté par les différents acteurs de la construction, les fédérations professionnelles ont eu la surprise de découvrir un changement de taille dans l'analyse du cycle de vie (ACV) des matériaux. En changeant l'analyse de statique à dynamique, l'impact carbone des matériaux est complètement biaisé. En effet, hiérarchiser l'impact carbone en fonction de sa temporalité sur les 50 années du calcul est très clairement à l'avantage des matériaux biosourcés et au détriment de matériaux de construction classiques. Dans l'approche statique, le moment de l'émission n'est pas considéré, et une émission ou un stockage temporaire n'a pas d'impact. En revanche, dans la méthode dynamique, plus une émission a lieu tôt plus son impact est fort et une émission ou un stockage temporaire va respectivement augmenter ou diminuer l'impact carbone du matériau. Il semble également que la prise en compte du carbone libéré au moment de la coupe du bois ainsi que la réduction de la capacité de stockage du carbone de la ressource sylvicole n'interviennent pas justement dans ces nouveaux calculs, accentuant l'inégalité des résultats. Ce changement décidé unilatéralement par la DHUP et la DGEC semble dangereux pour les entreprises qui n'auront pour la plupart ni le temps ni les moyens d'opérer une transition efficace vers des matériaux respectant ces nouvelles normes. M. le député souhaite également mettre en avant le fait que cette nouvelle réglementation n'a aucun semblable au niveau européen et international, qu'elle ne s'appuie ni sur la norme européenne NF EN 15978 ni sur la norme ISO 14 067/2018. Cette méthode, au-delà d'être déconnectée, apparaît surtout comme zélée. Souhaitant revenir à l'aspect initial de la réglementation et de la méthode de calcul de l'ACV statique, telle qu'elle a été expérimentée, il lui demande donc quelles sont ses intentions.
Les annonces du Gouvernement en date du 24 novembre 2020 sur la future réglementation environnementale (RE2020) ont depuis fait l'objet d'une intense et riche consultation de l'ensemble des parties prenantes et organisations professionnelles, notamment au sein du Conseil supérieur de la construction et de l'efficacité énergétique (CSCEE), qui a rendu son avis le 26 janvier 2021. L'ensemble des points portés à l'attention du Gouvernement ont été versés au débat et pris en compte dans le cadre de cette consultation. À l'issue de cette phase de concertation, les détails de la mise en œuvre de la RE2020 pour l'ensemble des logements neufs ont été annoncés le 18 février 2021. Globalement, les exigences fixées par la RE2020, reflet des orientations du Gouvernement pour la transition écologique dans le secteur du bâtiment, demeurent inchangées, qu'il s'agisse de sobriété énergétique, de sortie des énergies fossiles, d'amélioration du confort d'été ou de décarbonation de la construction tout le long du cycle de vie. La RE2020 sera ainsi l'une des réglementations les plus ambitieuses d'Europe pour les bâtiments neufs et contribuera directement à l'atteinte de nos objectifs de lutte contre le changement climatique et à la tenue de nos engagements internationaux en la matière. Cela étant, la concertation a permis de procéder à plusieurs ajustements du projet de réglementation afin d'en assurer sa mise en œuvre et son succès, tout en conservant son ambition initiale. En particulier, l'entrée en vigueur de la RE2020 sera finalement fixée au 1er janvier 2022, après une publication des textes d'ici la fin du premier semestre 2021. Conservant un calendrier rapide de mise en œuvre, cette date, qui fait l'objet d'un large consensus, laisse les quelques mois nécessaires à l'ensemble de la filière et notamment aux concepteurs et promoteurs pour mettre leurs projets à venir en conformité avec les nouvelles exigences. Le Gouvernement a donc tenu compte des alertes quant au risque de précipitation que faisait courir le calendrier initialement proposé. De la même manière et afin d'assurer que la trajectoire fixée par la RE2020 permette aux innovations et développements industriels nécessaires de se déployer à temps, les autres jalons prévus par la RE2020 seront décalés d'un an par rapport à ce qui était envisagé (les dates de 2024, 2027 et 2030 devenant ainsi 2025, 2028 et 2031). En matière d'énergie, des dispositions transitoires seront prises, d'une part pour les maisons individuelles construites sur des parcelles ayant déjà fait l'objet d'un permis d'aménager avec desserte de gaz, d'autre part pour les réseaux de chaleur, pour à la fois encourager le développement et la décarbonation. En matière de construction, la place croissante que seront amenés à prendre le bois et les matériaux biosourcés dans le futur de la construction a été soulignée. La réglementation reposera sur une exigence de résultat et non de moyens et permettra de faire place à la diversité des modes constructifs en favorisant la mixité des matériaux. Si les constructions futures recourront donc de manière accrue au bois et matériaux biosourcés, cette nouvelle réglementation encouragera également le recours aux matériaux géosourcés (comme la pierre de taille ou la terre crue) et aux matériaux plus usuels (brique et béton notamment) selon leur trajectoire de décarbonation. Toutes les filières et tous les métiers seront ainsi pleinement mobilisés par le mouvement engendré par la RE2020. À cet égard, la méthode d'analyse en cycle de vie dite « dynamique » (ACV), qui valorise le stockage du carbone, comme le prévoit la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, dite Loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (Elan), du 23 novembre 2018, est bien conservée. Dans le même temps, des ajustements par rapport au projet initial concernant les seuils carbone en construction ont été présentés afin d'assurer qu'à l'horizon 2031 (dernier jalon fixé par la RE2020), des modes constructifs variés auront leur place et que, sous réserve de leurs engagements de décarbonation, tous les matériaux continueront d'être utilisés, selon leurs atouts respectifs. Entre autres signes de ce souci de la mixité des matériaux et des modes constructifs, un Appel à manifestations d'intérêt (AMI) spécialement dédié à la mixité des matériaux a été lancé, financé par le programme d'investissements d'avenir (PIA 4). Fidèles à l'intention première du Gouvernement et fruits des multiples retours de terrain et de professionnels, les précisions apportées au projet de réglementation doivent permettre de trouver un point d'équilibre entre ambition et pragmatisme, exigences et maîtrise des coûts, et de garantir ainsi la pérennité de la RE2020. Grâce à un suivi précis dans le temps via un observatoire dédié, la trajectoire progressive que la RE2020 dessine pourra être ajustée au mieux. Aussi la RE2020 donne tout son sens au mot de transition. Tout en plaçant la France parmi les pionniers du bas-carbone en Europe, elle reste attentive à la réalité du monde de la construction et donne le temps nécessaire pour faire des évolutions à venir de véritables opportunités. Pour plus de détails sur la RE2020, le dossier de presse dédié du 18 février 2021 est consultable sur le site du ministère : https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/2021.02.18_DP_RE2020_EcoConstruire_0.pdf.
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