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Sylvain Templier
Question N° 38110 au Ministère de l’agriculture


Question soumise le 13 avril 2021

M. Sylvain Templier appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les problèmes sanitaires liés à la résistance antibiotique. Le monde traverse depuis plus d'un an une pandémie qui a réinterrogé les rapports entre l'homme et l'animal. Le concept « One Health », prépondérant aujourd'hui, s'impose comme un impératif des politiques publiques. Mais la question de la santé soulève le sujet des traitements. La découverte et le développement des anti-infectieux et antibiotiques a constitué un progrès médical majeur, permettant de rallonger l'espérance de vie humaine. Malheureusement, leur usage massif, répété et parfois abusif a créé les conditions favorisant la dissémination de souches bactériennes résistantes. D'après l'OMS, près de la moitié des antibiotiques dans le monde sont destinés aux animaux. Or les bactéries résistantes issues de l'élevage peuvent tout à fait se transmettre à l'homme. Des mesures internationales ont été actées ces dernières années. Pour autant, l'OMS rappelait il y a quelques mois que le phénomène constitue aujourd'hui « l'une des plus grandes menaces pesant sur la santé mondiale, la sécurité alimentaire et le développement ». Le Gouvernement a lancé en 2017 le plan écoantibio 2 afin de réduire les risques d'antibiorésistance en médecine vétérinaire. Ce plan arrive à échéance en 2021. Ainsi, M. le député souhaiterait connaître les premières conclusions de ce plan. Il souhaiterait également savoir si les chiffres liés au phénomène, portant sur les humains et les animaux, ont été actualisés (décès, nombre d'infections à bactéries multirésistantes, coûts). Enfin, il lui demande quelles nouvelles actions seront entreprises pour les années à venir.

Réponse émise le 15 juin 2021

La perte d'efficacité des antibiotiques représente un risque majeur pour la santé humaine, la santé animale et celle des écosystèmes. La lutte contre l'antibiorésistance au niveau mondial se révèle primordiale en terme de santé publique. Depuis sa mise en œuvre en 2012, le plan Écoantibio a obtenu des résultats concrets et très satisfaisants sur la réduction de l'utilisation des antibiotiques chez les animaux de compagnie et d'élevage. En effet, il a permis de faire baisser l'exposition des animaux aux antibiotiques (ALEA) de - 37 % sur la période 2012-2016. La baisse est encore plus marquée pour les antibiotiques critiques avec - 75 % pour les fluoroquinolones et - 81 % pour les céphalosporines de dernières générations. Si le premier plan était spécifiquement dédié à la santé animale, le deuxième plan Écoantibio constitue la déclinaison, en santé animale, de la feuille de route interministérielle pour la maîtrise de l'antibiorésistance, pilotée par le ministère chargé de la santé. Il s'agissait en effet de se placer dans une perspective « Une Seule Santé » (One Health) conformément aux recommandations des organisations internationales en la matière (OMS, FAO, OIE). Ce second plan obtient également des résultats remarquables. En effet, les mesures ambitieuses inscrites dans la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt dès 2016 sur les antibiotiques critiques, ont contribué en 2019 à la baisse de 94 % et 86 % de l'exposition des animaux respectivement aux céphalosporines de dernières générations et aux fluoroquinolones par rapport à 2013. Quant à l'exposition à la colistine, elle a diminué en 2019 de 64,2 % par rapport à l'exposition moyenne calculée pour les années 2014 et 2015. Afin de poursuivre les efforts et d'ancrer dans la durée les bonnes pratiques, Écoantibio 2 a été prolongé jusque fin 2022 afin de synchroniser le futur plan Écoantibio 3 avec la nouvelle feuille de route interministérielle pour la maîtrise de l'antibiorésistance, qui sera lancée en 2023. Préalablement à la construction de cette nouvelle feuille de route en concertation avec les parties prenantes, une mission inter-inspection sera conduite par les services d'inspection générale de sept ministères mobilisés, sous l'égide du ministère chargé de la santé. L'intersectorialité et la transdisciplinarité se verront ainsi renforcées. Il faut néanmoins rester conscient que malgré tous les efforts de prévention (alimentation et logement de qualité, respect du bien-être animal, vaccination, etc.), les animaux continueront à souffrir de maladies bactériennes. Afin de respecter le bien-être animal, et en cohérence avec le concept d'Une seule santé, les animaux continueront à être soignés, et lorsque c'est nécessaire, des antibiotiques leur seront administrés. L'effort doit rester partagé entre tous les professionnels utilisant des antibiotiques : les éleveurs et les vétérinaires ont démontré, par leurs efforts importants, qu'ils faisaient partie de la solution pour lutter contre l'antibiorésistance. Concernant la santé humaine, la dernière étude coordonnée par le centre européen de prévention et contrôle des maladies faisait état de 125 000 bactéries résistantes et de 5 500 décès en 2015 liés à des infections à bactéries multi-résistantes en France (Cassini A. et al (2019). Attributable deaths and disability-adjusted life-years caused by infections with antibiotic-resistant bacteria in the EU and the European Economic Area in 2015 : a population-level modelling analysis, The Lancet, 19 : 1.). L'organisation de coopération et de développement économique (OCDE) estime que les Gouvernements européens pourraient dépenser jusqu'à 1,1 milliard d'euros supplémentaire par an entre 2015 et 2050 du fait de la résistance aux antimicrobiens (OECD (2018), Stemming the Superbug Tide : Just A Few Dollars More, OECD Publishing, Paris). La surveillance de l'antibiorésistance, des infections associées aux soins et des consommations antibiotiques est réalisée par santé publique France, qui pilote notamment les missions nationales des CPias. Les données sont en accès libre sur le site GEODES et les rapports de surveillance, disponibles sur leur site internet, témoignent d'une tendance à la baisse de certaines bactéries résistantes dans les trois secteurs de l'offre de soins, ainsi que des consommations d'antibiotiques (y compris certains antibiotiques critiques). La marge d'amélioration reste cependant significative et les efforts doivent être poursuivis et renforcés. Le rapport annuel des actions menées au plan national en santé humaine en 2020 est disponible sur le site antibiotiques.gouv.fr. Ces constats font de l'antibiorésistance une des dix menaces pour l'humanité selon l'OMS. Les ministères et agences travaillent de concert, dans une approche Une seule santé, afin de lutter contre l'antibiorésistance, qui est un sujet prioritaire pour la France. La prochaine feuille de route interministérielle pour la maîtrise de l'antibiorésistance impulsera les nouvelles actions pour les années à venir.

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