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Florence Provendier
Question N° 38119 au Ministère de l’europe


Question soumise le 13 avril 2021

Mme Florence Provendier alerte M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la situation préoccupante en Birmanie, en particulier celle des enfants. Le coup d'État du 1er février 2021, qui a vu l'emprisonnement de la cheffe du gouvernement Mme Aung San Suu Kyi et du président M. Win Myint, a entraîné l'arrivée au pouvoir de l'armée birmane. Les nombreuses manifestations populaires qui ont suivi ont été durement réprimées. Plus de 500 civils ont été tués dont plus de quarante enfants, des centaines de personnes sont portées disparues et près de 10 000 ont été déplacées. Concernant la situation des enfants, la directrice générale de l'UNESCO, Mme Henrietta H. Fore, a déclaré suite au weekend sanglant des 27-28 mars 2021 : « Je suis horrifiée par cette tuerie sans discrimination, dont des enfants, qui se déroule en Birmanie et par l'incapacité des forces de sécurité à faire preuve de retenue et assurer la sécurité des enfants ». Elle a rappelé qu'outre les impacts immédiats de la violence, les conséquences à plus long terme de la crise pour les enfants du pays pourraient être catastrophiques. La fourniture de services essentiels aux enfants a été interrompue : près d'un million d'enfants n'ont pas accès aux principaux vaccins ; près de 5 millions d'enfants n'ont pas accès à la supplémentation en vitamine A ; près de 12 millions d'enfants risquent de perdre une année supplémentaire d'apprentissage ; plus de 40 000 enfants n'ont pas de traitement pour la malnutrition aiguë sévère ; près de 280 000 mères et enfants vulnérables n'auront plus accès aux transferts d'argent qui sont leur planche de salut et plus d'un quart de million d'enfants n'auront plus accès aux services de base en matière d'eau, d'assainissement et d'hygiène. Cette perte d'accès aux droits et aux services essentiels, combinée à une récession de l'économie qui plongera de nombreux autres enfants dans la pauvreté, met en péril une génération entière. Par ailleurs, le 31 mars 2021, lors d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité des Nations unies, l'ambassadeur chinois a déclaré que la Chine rejetait l'idée d'imposer des sanctions aux militaires birmans qui « ne feraient qu'aggraver la situation » et prônait de « revenir à une transition démocratique dans ce pays ». Aussi, elle l'interroge, au-delà de la condamnation déjà faite par le Gouvernement, sur les mesures concrètes que la France va prendre pour mettre fin aux massacres dont ceux des enfants en Birmanie et faciliter la restauration de la démocratie dans le pays, malgré des dissensions au sein du Conseil de sécurité des Nations unies.

Réponse émise le 6 juillet 2021

Depuis le coup d'État commis par les forces armées le 1er février, la situation continue de se dégrader. L'armée birmane ne cesse de se rendre coupable de crimes contre sa population et fait de nouvelles victimes quotidiennement, y compris parmi les enfants. De nombreux enfants ont été blessés ou tués lors des actions violentes menées par les forces de sécurité birmanes contre la population civile. Des enfants seraient également en détention. L'occupation d'établissements scolaires par les forces de sécurité, observée dès la mi-mars, ou encore le bombardement d'une école dans l'État Karen, constituent de graves atteintes aux droits des enfants. Elles aggravent encore la situation des 12 millions d'enfants birmans déjà privés d'un accès à l'éducation depuis mars 2020, en raison des contraintes sanitaires liées à la pandémie de la Covid-19. Cette crise s'ajoute à de nombreux défis en matière humanitaire, qui affectent particulièrement les enfants : un développement socio-économique limité, une vulnérabilité importante aux catastrophes naturelles et la permanence de conflits inter-ethniques. Selon le rapport PNUD/UNICEF de juillet 2020 "Overcoming Child Poverty in Myanmar", 34% des enfants birmans vivent sous le seuil de la pauvreté et plus de 450 000 étaient affectés par les conflits dans plusieurs parties du pays. La malnutrition chronique est un problème majeur : elle est de 29% chez les enfants de moins de 5 ans. Dans ce contexte, la France marque sa solidarité vis-à-vis de la population birmane et en particulier envers les plus jeunes. Elle participe ainsi à différentes initiatives visant à assurer les conditions du développement des enfants, notamment dans la perspective d'améliorer leurs conditions socio-économiques futures. À titre d'exemple, la Raiki Community Development Foundation a lancé, avec le soutien de la France, un programme visant à promouvoir la cohésion sociale dans le sud de l'État Chin au moyen notamment d'appui au développement d'activités gérées par les jeunes. De même, la France soutient depuis 2017 un programme du Center for Social Integrity proposant des cours d'alphabétisation et de mathématiques destinés aux jeunes filles dans l'État de l'Arakan. En 2020, ce programme a également pris en charge la formation d'enseignantes communautaires. À la suite du coup d'État, des réflexions sont en cours pour réorienter plusieurs projets au bénéfice des jeunes birmans, notamment dans le domaine de la gestion des traumatismes et de la santé mentale. En outre, la France consacre une partie de son aide humanitaire au soutien aux populations birmanes, une attention particulière étant portée à la situation des plus jeunes. Ainsi, un projet d‘éducation d'urgence dans le Sud-Chin avec Triangle génération humanitaire reçoit des financements du Fonds d'urgence humanitaire 2021 d'un montant de 250 000€. D'autres programmes, qui ne ciblent pas spécifiquement les enfants, contribuent néanmoins à l'amélioration de leur sécurité et de leurs conditions de vie. C'est notamment le cas du projet de prévention contre les mines anti-personnel mené par Handicap et Inclusion depuis 2020 dans le Kachin, qui sera abondé à hauteur de 300 000€ en 2021. Au total, en 2021, la France a engagé 1,5 million d'euros d'aide humanitaire en Birmanie (hors contributions volontaires). Au-delà de son soutien à la société civile et de son aide humanitaire, la France a réagi avec la plus grande fermeté au coup d'État du 1er février. Ainsi, en lien avec ses partenaires européens, elle a adopté, le 22 mars et le 19 avril, des sanctions individuelles à l'encontre de 21 responsables du coup d'État, dont leur commandant-en-chef, et son adjoint, ainsi que contre les deux principaux conglomérats détenus par l'armée. Au-delà des sanctions, nous avons encore suspendu tout soutien budgétaire aux programmes gouvernementaux et sommes convenus de continuer à évaluer l'ensemble des outils dont nous disposons, y compris en matière de préférences commerciales. La revue de l'aide au développement que nous menons actuellement a vocation à suspendre tout projet susceptible de bénéficier aux autorités issues du coup d'État, tout en épargnant la population civile et les plus vulnérables, qui sont les premiers touchés par la situation. Le Conseil de sécurité des Nations unies s'est réuni à deux reprises et a permis l'adoption d'un communiqué, le 4 février, puis d'une déclaration de la Présidence du Conseil de sécurité le 10 mars, la première depuis 2017, témoignant de la forte mobilisation de la communauté internationale. La France a aussi apporté son soutien à la tenue, le 9 avril, d'une consultation publique sur la situation en Birmanie, à laquelle a participé une représentante de l'opposition institutionnelle au coup d'État, le Comité représentant l'Assemblée de l'Union (CRPH). Le Conseil des droits de l'Homme a, en outre, tenu une session spéciale le 12 février, et sa 46e session a permis l'adoption d'une nouvelle résolution sur la Birmanie le 24 mars. La France agit également de manière résolue avec ses partenaires internationaux, et notamment avec les États membres de l'ASEAN, qui ont vocation à jouer un rôle déterminant vers une sortie de crise. En ce sens, le ministre de l'Europe et des affaires étrangères s'est entretenu, au cours des dernières semaines, avec ses homologues malaisien, indonésienne, singapourien et thaïlandais et d'autres entretiens devraient prochainement se tenir. Le Sommet de l'ASEAN sur la Birmanie du 24 avril, dont nous regrettons que la Birmanie y ait été représentée par le commandant-en-chef de l'armée birmane, sans participation de l'opposition, a néanmoins constitué une première étape significative. La France restera vigilante à la mise en œuvre, à brève échéance, des initiatives qui ont été décidées à l'occasion de ce Sommet, et notamment la mise en place d'une médiation entre les différentes parties prenantes.

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