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Hugues Renson
Question N° 38833 au Ministère de l’économie


Question soumise le 11 mai 2021

M. Hugues Renson attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur la proposition faite le 5 avril 2021 à Chicago par Mme Janet Yellen, secrétaire américaine au Trésor, d'instaurer un mode de taxation minimal des multinationales à l'échelon mondial. Cette proposition a été formulée une semaine après que M. Joe Biden, président des États-Unis d'Amérique, a annoncé le 31 mars 2021 à Pittsburgh un plan d'investissement massif dans les infrastructures de son pays financé grâce à une augmentation progressive de l'impôt sur les sociétés dont le taux passerait de 21 % à 28 %. La proposition de Mme Yellen, à deux jours de la réunion des ministres des finances du G20, a recueilli un assentiment de la France et de l'Allemagne, en particulier au nom de la lutte contre le phénomène d'évitement fiscal largement pratiqué par les entreprises multinationales ou transnationales dans le monde et en Europe en particulier, lutte évidemment nécessaire pour les États qui voient des sommes colossales échapper, chaque année, à l'impôt national. Au-delà de la question de la détermination du taux de l'impôt qui serait pratiqué à l'échelon mondial, à tout le moins par les États membres du G20, se pose celle de l'assiette de cet impôt ainsi que celle du recouvrement des sommes qui seraient dues par les entreprises qui auraient choisi, en dépit de l'existence de ce taux minimal, d'installer leur siège dans un État qui continuerait à les imposer à un taux encore plus bas. En effet, si un État imposait les bénéfices d'une entreprise à un taux inférieur à ce seuil minimal, le gouvernement du pays d'origine de l'entreprise serait ainsi autorisé à prélever une part d'impôt correspondant à l'écart entre le taux effectif et le taux « minimal » qui, sinon, ne le serait plus dans les faits. Ainsi, toute pratique de « dumping » fiscal entre États serait éliminée car rendue inutile. Or comment déterminer « l'origine » d'une entreprise, sinon par la composition de son capital ou la valeur monétaire qu'elle utilise pour ses échanges, en particulier entre ses différentes filiales ? Cet impôt mondial minimal sur les sociétés ne risque-t-il pas, grâce à l'extra-territorialité du droit fiscal américain et la prééminence du dollar dans les échanges internationaux, de devenir le bras armé des États-Unis d'Amérique pour pouvoir taxer à leur seul profit un grand nombre d'entreprises, bien au-delà des GAFA ? Afin que les États européens ne soient pas lésés, M. le député demande à M. le ministre s'il ne conviendrait pas de proposer que cet impôt minimal sur les sociétés ne soit pas un impôt de quotité mais un impôt de répartition, dont le produit serait évalué à l'échelle internationale et fixé à l'avance, et dont le produit serait affecté, selon une proportion établie annuellement, à chaque État partie de l'accord. En outre, retenir ce choix permettrait de fixer facilement le taux, qui pourrait ainsi varier d'une année sur l'autre en fonction du produit attendu et du nombre de contribuables qui lui seraient soumis.

Réponse émise le 28 septembre 2021

Les pratiques d'évitement fiscal des multinationales, mais également la course au moins disant fiscal entre États, privent les finances publiques des ressources nécessaires au financement des politiques et services publics. Un tel problème ne peut être efficacement résolu que dans un cadre multilatéral, car il appelle une refonte des règles de la fiscalité internationale et la coopération entre les États. C'est pourquoi la France soutient, depuis plusieurs années, l'accord portant sur deux piliers essentiels et complémentaires qui est au cœur des négociations conduites au sein du Cadre inclusif de l'OCDE. Le premier pilier, qui concerne les grandes multinationales très profitables, dont celles du numérique, permettra de réallouer plus de profit imposable aux États dits de marché où ces entreprises opèrent, parfois sans présence physique. Le second pilier, ajouté au projet de réforme en 2019 sur proposition de la France et de l'Allemagne vise de surcroît à instaurer une imposition minimale des profits des multinationales, dont les filiales seront ainsi imposées au niveau des États de siège en cas de sous imposition effective. L'Europe et la France tireront avantage de la mise en œuvre simultanée de ces deux piliers, distincts dans leur objet et leur fonctionnement. Le Gouvernement se félicite de la volonté affichée par la nouvelle administration américaine, suite aux annonces du président Joe Biden, de faire évoluer sa propre législation fiscale nationale de manière à l'inscrire pleinement dans la logique des règles actuellement élaborées au niveau multilatéral en matière d'imposition minimale, permettant ainsi une mise en œuvre uniforme de celles-ci. Ceci permet également d'envisager un niveau ambitieux d'imposition minimale à l'échelle mondiale, comme en témoigne la mention d'un taux d'imposition effective « d'au moins 15 % » qui a été agréée lors de la réunion des ministres des Finances des États du G7 à Londres le 5 juin dernier, puis au sein de la déclaration commune approuvée par 134 des 140 Etats composant le Cadre inclusif de l'OCDE, et enfin entérinée par l'accord politique lors de la réunion des ministres du G20 de Venise les 9 et 10 juillet 2021. Le Gouvernement est pleinement investi dans ces négociations, qui vont se poursuivre dans les prochains mois pour finaliser les paramètres techniques de cet accord.

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