Mme Sandrine Josso appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur le statut de l'activité de production de sel issue de l'exploitation de marais salants non-assimilés à une activité agricole depuis la rédaction en 1988 de l'article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime. Le constat relatif à la filière salicole atlantique : la production de sel recueillie de manière artisanale représente 550 producteurs sur le territoire national qui génèrent 40 millions d'euros de chiffre d'affaires. Outre leur poids économique, ces producteurs sont les garants de la préservation des espaces naturels que constituent les marais salants. La pratique des textes qui s'appliquent à cette activité au regard du foncier, de l'exploitation agricole, de la production et du statut professionnel et social des agriculteurs induit un statut agricole de fait, d'autant que la production de sel issue des marais salants est tributaire du cycle de la nature, du soleil et du vent. Or la définition de l'article L. 311-1 du code rural établie en 1988 fait obstacle à la reconnaissance de la saliculture comme activité agricole. Les saliculteurs doivent obtenir des dérogations pour bénéficier des dispositifs agricoles dans le meilleur des cas ou en sont privés (le financement de la formation paludier/saunier, le financement des aides à l'installation, le régime des calamités agricoles et l'exonération de la taxe foncière des bâtiments salicoles). Une précision du code rural permettrait de garantir la pérennité d'un savoir-faire ancestral et de garantir de meilleures conditions d'exploitation pour ces producteurs qui sont un cas d'exception. Il est vrai que l'annexe I se référant à l'article 38 du Traité de fonctionnement de l'Union européenne exclut le sel de la production agricole dans la mesure où il constitue un minéral et non un végétal ou un animal. Cependant l'exploitation artisanale du sel des marais salants revêt un caractère particulier qu'il est essentiel de considérer et ne pas assimiler à l'extraction du sel de mine. Elle souhaiterait donc connaître ses intentions sur le sujet.
Au titre de l'article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime, sont réputées agricoles les activités par nature (maîtrise et exploitation d'un cycle biologique animal ou végétal), par rattachement (prolongement de l'activité de production ou ayant pour support l'exploitation) ou encore par détermination de la loi (ex : centres équestres). L'activité salicole qui n'est ni une production végétale, ni animale ne peut être considérée comme une activité agricole, au sens de cet article. Les saliculteurs sont cependant assimilés à des agriculteurs à plusieurs niveaux. D'abord par le régime social dont ils dépendent : l'activité d'exploitation de marais salants est rattachée aux activités de culture ouvrant droit à l'affiliation au régime de protection sociale des non-salariés des professions agricoles. Ensuite, par le régime fiscal dont ils relèvent : les exploitants de marais salants sont soumis à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices agricoles. Toutefois, l'article 1382 du code général des impôts précise que sont exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties, les bâtiments qui servent aux exploitations rurales. Ces bâtiments doivent être affectés à un usage agricole de manière permanente et exclusive. Ainsi, la saliculture est exclue du champ d'application de cette exonération. La proposition d'exonération permanente de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les producteurs de sel marin a été débattue lors de l'examen de la loi de finances rectificative de 2016. L'amendement proposé sur ce sujet a été rejeté, le 19 décembre 2016. La définition actuelle de l'activité agricole au sens de l'article L. 311-1 peut poser des difficultés dans plusieurs domaines. Ainsi, les coopératives agricoles ont pour objet l'utilisation en commun, par des agriculteurs, de moyens pour faciliter ou développer leur activité économique. Au vu de cette définition, l'activité salicole des coopératives pourrait être remise en cause, si l'activité de saliculture n'est pas reconnue comme étant agricole. Le régime des calamités agricoles, financé par le fonds national de gestion des risques en agriculture (FNGRA) permet l'assurance et l'indemnisation des agriculteurs, considérés comme tels au titre de l'article L. 311-1 du code rural et de la pêche maritime (CRPM) et cotisant au FNGRA. Cette cotisation s'effectue via une contribution additionnelle aux primes et cotisations afférentes aux contrats d'assurance agricoles. Les saliculteurs sont par conséquent, inéligibles à ce dispositif. Au niveau européen, le sel ne figure pas dans la liste des produits agricoles figurant à l'annexe 1 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Par conséquent, les saliculteurs ne peuvent prétendre aux aides cofinancées par des crédits européens, si la qualité d'agriculteur est une condition d'éligibilité à cette aide, quelle que soit la définition nationale de l'activité agricole. Ainsi, les saliculteurs ne peuvent bénéficier des aides à l'installation, dans le cadre d'un co-financement du fonds européen agricole pour le développement rural. Cette définition ne fait cependant pas obstacle à l'octroi d'aides pour les projets d'installation salicoles qui peuvent être financés par les crédits de l'État, dans le cadre des aides « de minimis ». Par ailleurs, l'activité salicole ne relevant pas du règlement (UE) no 1308/2013 du 17 décembre 2013 portant organisation commune des marchés des produits agricoles, les producteurs de sel ne peuvent être reconnus comme relevant d'une organisation de producteurs au sens de l'article L. 551-1 du CRPM. Cependant, l'article L. 552-1 permet la reconnaissance d'organisations de producteurs dans les secteurs non couverts par le règlement (UE) no 1308/2013, notamment dans les secteurs complémentaires de produits agricoles. Pour que la saliculture fasse l'objet d'un nouveau cadre juridique de reconnaissance des organisations de producteurs, précisé par décret, celle-ci doit présenter un caractère agricole, au niveau national. Pour remédier à cette situation, vous souhaitiez proposer un amendement, au projet de loi no 424 pour un État au service d'une société de confiance, afin de compléter l'article L. 311-1 du CRPM par les activités de production de sel issu de l'exploitation des marais salants. Cet amendement n'a finalement pas été déposé car il aurait constitué un cavalier législatif. Néanmoins, cette modification de l'article L. 311-1 sécuriserait la situation de fait des coopératives et des sociétés de forme agricole exerçant une activité salicole. Dans d'autres domaines, notamment dans le cadre des organisations de producteurs, de l'exonération de la taxe foncière des propriétés bâties ou des calamités agricoles, une modification de l'article L. 311-1 permettrait d'initier des échanges pour l'institution éventuelle d'un dispositif ad hoc ou sur les modifications nécessaires pour intégrer la saliculture dans ces domaines.
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