Mme Justine Benin alerte M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la prorogation des délais échus et l'adaptation des procédures judiciaires durant l'état d'urgence sanitaire dans les outre-mer. En effet, la Guadeloupe est confrontée depuis le début du mois d'août à 2021 une très forte reprise épidémique, qui a saturé l'ensemble du système de soins et affecté gravement l'ensemble de la population. Pour répondre à cette crise sans précédent, l'État a été contraint de mettre en place des mesures de freinage importantes : un confinement est en vigueur depuis le 4 août 2021 et un couvre-feu est également en place. À ce titre, la Guadeloupe est placée sous le régime de l'état d'urgence sanitaire, qui a été prolongé jusqu'au 15 novembre 2021 par la loi n° 2021-1172 du 11 septembre 2021. Or ce texte ne prévoit pas de dispositif de suspension des délais de recours et d'adaptation des procédures pour la préservation des droits des justiciables, des administrés ou allocataires. Un dispositif équivalent avait pourtant été déployé par l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020, en vue d'assurer la prorogation des délais échus durant la période d'état d'urgence sanitaire. Cela avait ainsi permis la préservation des droits de tous les justiciables, y compris dans les outre-mer, afin de s'adapter aux contraintes du confinement et des plans de poursuite d'activité des administrations. Les citoyens ultramarins rencontrent davantage de difficultés dans l'accès à la justice que les citoyens de l'Hexagone. C'est encore plus vrai aujourd'hui, alors que les populations vivent une crise sanitaire qui a de très lourdes conséquences sociales et économiques. Aussi, au regard de ces éléments, elle souhaite savoir s'il entend mettre en œuvre une ordonnance de prorogation similaire à celle mise en œuvre lors du premier confinement en mars 2020.
La crise sanitaire a imposé de prendre, en urgence, des mesures dérogatoires pour aménager les délais, contractuels comme de procédure, et adapter les procédures judiciaires pour permettre la poursuite de l'activité juridictionnelle. L'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période a prévu, notamment en son article 2, que tout acte, recours, action en justice, formalité, inscription, déclaration, notification ou publication prescrit par la loi ou le règlement à peine de nullité, sanction, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, irrecevabilité, péremption, désistement d'office, application d'un régime particulier, non avenu ou déchéance d'un droit quelconque et qui aurait dû être accompli pendant la période mentionnée à l'article 1er (période juridiquement protégée) sera réputé avoir été fait à temps s'il a été effectué dans un délai qui ne peut excéder, à compter de la fin de cette période, le délai légalement imparti pour agir, dans la limite de deux mois. L'article 2 de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020, renvoyait expressément à cette disposition. Cette disposition et son champ d'application ont été adaptés au gré de l'évolution de la crise sanitaire. L'ordonnance n° 2020-427 du 15 avril 2020 portant diverses dispositions en matière de délais pour faire face à l'épidémie de la Covid-19 (titre I) a complété la liste des délais, mesures et obligations exclus du champ d'application du titre Ier de l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période. L'ordonnance n° 2020-560 du 13 mai 2020 fixant les délais applicables à diverses procédures pendant la période d'urgence sanitaire (art. 1er) a ajouté à cette liste et substitué une date fixe à la date initialement glissante prévue pour la fin des mesures dérogatoires en matière de délais. La liste des exclusions a encore été aménagée par ordonnance n° 2020-666 du 3 juin 2020 relative aux délais applicables en matière financière et agricole pendant l'état d'urgence sanitaire (art. 1 et 2). Les mesures précitées de l'ordonnance n° 2020-306 n'ont pas été reconduites durant la deuxième vague de la pandémie, en l'absence de nouveau confinement strict. En effet, les mesures dérogatoires adoptées doivent être proportionnées et strictement nécessaires. En l'état de la situation sanitaire, il n'est pas prévu de mettre en place un dispositif équivalent à celui de l'ordonnance précitée en Guadeloupe, l'état d'urgence sanitaire n'ayant pas été prorogé au-delà du 15 novembre 2021. Le ministère de la Justice demeure néanmoins attentif à la situation et aux mesures qui pourraient être nécessaires pour adapter de nouveau les règles juridiques aux contraintes de la crise sanitaire.
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