Mme Bénédicte Taurine alerte Mme la ministre des solidarités et de la santé sur le protocole actuel de don du sang et la discrimination qu'il opère envers les hommes homosexuels. Les conditions d'accès au don du sang sont désormais fixées par l'arrêté ministériel du 5 avril 2016 remplaçant l'arrêté du 12 janvier 2009. Alors que le don de sang par des hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes était interdit, depuis le 10 juillet 2016 cet arrêté permet aux hommes homosexuels d'effectuer un don de plasma sous certaines conditions ainsi qu'un don de sang en l'absence de relations sexuelles entre hommes dans les douze derniers mois. Ce dernier critère est une discrimination contre les hommes homosexuels. Le don du sang doit bien évidemment être soumis à la plus grande rigueur et sécurité pour le donneur comme pour le receveur. Pourtant, de nombreux pays comme l'Espagne, le Portugal, l'Italie, la Russie ou encore l'Argentine et le Chili ont un protocole de don de sang non discriminatoire envers les hommes homosexuels. En effet, en Espagne le protocole est le même pour tout donneur indépendamment de l'orientation sexuelle du donneur, de son sexe ou de celui de son ou sa partenaire. Dans ces pays le protocole ne porte que sur les pratiques afin de savoir si le donneur respecte l'indication de relation d'un ou d'une partenaire stable les quatre derniers mois. En outre, plutôt que de retenir la notion de population à risque, le critère d'exclusion permanente des candidats au don du sang retenu devrait être le critère du comportement à risque (sujets dont le comportement sexuel les expose au risque de contracter des maladies infectieuses graves transmissibles par le sang, comme le VIH et les hépatites B et C), puisque « nul ne peut être exclu du don de sang en raison de son orientation sexuelle » selon l'article L. 1211-6-1 al. 2 du code de la santé publique. Ces différents exemples remettent en cause l'argument d'un manque de données scientifiques empêchant un alignement des règles d'éligibilité au don de sang pour les hommes homosexuels à celles appliquées aux autres donneurs. À l'inverse, le maintien de cette discrimination rappelle les heures noires d'une homophobie diffuse où le Sida était présenté comme la « maladie des homosexuels » et d'une homophobie institutionnelle où l'Organisation mondiale de la santé (OMS) considérait l'homosexualité comme une maladie mentale jusqu'en 1993 et où la France a attendu l'année 1982 pour « dépénaliser » l'homosexualité. Nous ne pouvons perdre de vue que le critère de l'homosexualité retenu dans le protocole de don du sang vient alimenter les préjugés homophobes et renforce ainsi les discriminations. Le Gouvernement a décidé de lancer une étude nationale, Complidon, afin d'évaluer la compréhension et la connaissance du protocole actuel de don du sang. Pourtant, cette étude s'attache exclusivement à étudier le modèle français actuel et ne prévoit pas de mener une analyse scientifique sur la possibilité d'un alignement des règles d'éligibilité au don de sang pour les hommes homosexuels à celles appliquées aux autres donneurs, comme c'est le cas dans d'autres pays de l'Union européenne et du monde. Elle souhaite donc connaître les dispositions prises par le Gouvernement afin d'étudier les possibilités d'une modification du protocole de don du sang assurant la santé de toutes et tous ainsi que l'égalité et la lutte contre les discriminations.
Lors de l'examen de la proposition de loi sur le don du sang du groupe Les Républicains en octobre 2018, la ministre des solidarités et de la santé s'était engagée à présenter les résultats de l'étude COMPLIDON afin d'évaluer le respect et la compréhension des critères de sélection des donneurs en particulier des donneurs ayant des relations sexuelles avec des hommes. C'est ce qui a été fait le 14 novembre dernier. 110 000 questionnaires ont été exploités et les résultats de l'enquête publiée que l'ouverture du don de sang aux hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes depuis 2016 n'a pas fait augmenter le risque d'infection par le VIH par transfusion sanguine. La présentation de ces résultats au Comité de suivi de l'arrêté de sélection des donneurs constitue la première étape de concertation avec l'ensemble des parties prenantes. Les agences sanitaires, Santé Publique France et l'Agence nationale de sécurité du médicament ont été saisies pour conduire des analyses de risque résiduel de transmission transfusionnelle du VIH et faire évoluer le questionnaire préalable au don. Le prochain comité de suivi se réunira fin janvier 2019 pour partager les résultats de ces analyses de risque. Un nouvel arrêté sera ensuite rédigé et soumis aux consultations obligatoires. Il pourra entrer en vigueur d'ici l'été 2019. Ce travail confirme que le Gouvernement est très attaché au principe de non-discrimination au don en fonction de l'orientation sexuelle. Ce principe, inscrit dans la loi depuis 2016, est un principe général fort et dès sa nomination la ministre en charge de la santé a pris l'engagement de retravailler les critères des 12 mois d'abstinence pour les personnes homosexuelles.
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