M. Sylvain Templier interroge Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales sur la répartition des compétences sur le sujet de l'alimentation au sein des collectivités territoriales. Dans le cadre de loi climat et résilience, le législateur a adopté un titre dédié à la thématique « se nourrir ». Il a voté donc ensemble de mesures ou d'objectifs permettant de tendre vers une alimentation saine, durable, accessible à tous. Seulement, la politique de l'alimentation demeure plutôt dans le champ national. Le programme national de l'alimentation 2019-2023 indique pourtant dès son introduction qu'il a vocation à « préciser les modalités permettant d'associer les collectivités territoriales pour assurer l'ancrage territorial de cette politique ». La notion d'ancrage territorial est par ailleurs une expression récurrente de ce document. Le premier confinement lié à la crise sanitaire nous a démontré l'importance de l'enjeu alimentaire et nous a démontré que les acteurs en première ligne sur ce sujet étaient bien souvent les communes. Le CESE, dans son rapport « Pour une alimentation durable ancrée dans les territoires », souligne toutefois qu'aucun texte législatif ne permet d'identifier des compétences alimentaires au sein des collectivités territoriales (en dehors de la restauration scolaire pour les communes, départements, régions, en fonction du niveau scolaire). Il n'empêche que certaines communes ou intercommunalités se sont engagées et sont porteuses de projets vertueux pour la durabilité alimentaire. Le CESE propose ainsi d'instituer une compétence « alimentation durable » au sein des communes ou des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) pour, selon le conseil, « établir des liens étroits entre l'action sociale, la restauration collective, l'alimentation en eau potable, le foncier et l'urbanisme et le maillage commercial de proximité ». Or une telle proposition ne peut se faire par voie d'amendement. Alors que le Parlement examine le projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, un débat sur ce sujet ne peut donc avoir lieu. En effet, attribuer une nouvelle compétence aux communes constitue une charge au sens de l'article 40 de la Constitution. Or le rapport Carrez sur la recevabilité financière indique qu'un amendement parlementaire « ne peut attribuer des compétences nouvelles à une personne publique, que ces compétences soient générales ou prennent la forme d'une mission ponctuelle ». En outre, l'attribution d'une compétence claire et identifiée permettrait une meilleure coordination de l'action publique sur le sujet (notamment dans le cadre du déploiement des PAT), une valorisation des productions locales, une identification et mise en place de politique luttant contre la désertification alimentaire (identifiée parfois au moment de la crise covid comme l'illustre l'ouvrage « Manger au temps du coronavirus », à ce titre une coordination avec les politiques d'action sociale pourrait être cohérente), mais également un aménagement du territoire plus cohérent, notamment en articulation avec les espaces agricoles ou avec l'aménagement commercial). C'est pourquoi il souhaiterait connaître sa position sur la possibilité d'attribuer aux collectivités territoriales et notamment aux communes, une compétence dite « alimentation durable ».
Les initiatives des collectivités territoriales en matière d'alimentation durable, notamment dans le domaine de la restauration scolaire, ne sont pas freinées par l'absence de compétence dite « alimentation durable ». S'agissant plus particulièrement des communes, celles-ci bénéficient de la clause de compétence générale qui leur permet d'agir sur les sujets d'intérêt local dès lors qu'une compétence n'a pas été attribuée à une collectivité relevant d'une autre catégorie à titre exclusif. Concernant les départements et les régions, ces collectivités peuvent agir en se fondant sur les compétences qui leur sont respectivement attribuées par la loi. Par ailleurs, fondamentalement, créer une compétence qui en recouvre d'autres préexistantes (restauration collective, action sociale, eau, foncier, urbanisme, agriculture) ne peut qu'être source de confusion. En outre, les projets alimentaires territoriaux sont élaborés de manière concertée à l'initiative des acteurs d'un territoire et notamment les collectivités territoriales. De plus, la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets affirme le rôle des collectivités territoriales en matière d'alimentation durable. C'est ainsi que l'article L. 230-5-6 du code rural et de la pêche maritime dispose que les gestionnaires, publics et privés, des services de restauration collective scolaire proposent, au moins une fois par semaine, un menu végétarien. De surcroît, toujours dans le cadre de la loi précitée, une expérimentation est mise en place dans le but de permettre aux collectivités volontaires de proposer quotidiennement le choix d'un menu végétarien dans les services de restauration collective dont elles ont la charge. Il n'est par conséquent pas envisagé d'attribuer une compétence dite « alimentation durable » dans la mesure où les collectivités territoriales peuvent, en l'état du droit, agir dans leurs domaines d'intervention respectifs.
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