M. Didier Quentin appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, sur la situation de nombreux vétérinaires à la retraite. En effet, beaucoup d'entre eux ont participé, entre 1955 et 1990, au titre d'un mandat sanitaire, à l'éradication des grandes épizooties qui ravageaient les élevages. En qualité de collaborateurs occasionnels du service public, ces vétérinaires n'ont, toutefois, pas été affiliés aux organismes sociaux et ils sont, par conséquent, aujourd'hui privés d'une partie de leur retraite. Par deux arrêts du 14 novembre 2011, le Conseil d'État a reconnu la responsabilité de l'État et a condamné celui-ci à la réparation du préjudice subi. Afin d'éviter la multiplication des recours, le ministère de l'agriculture a alors mis en place un processus d'indemnisation amiable pour tous ces vétérinaires. Ceux-ci éprouvent néanmoins les plus grandes difficultés à obtenir ces indemnités. D'après eux, l'administration ne traite pas les dossiers dans un délai raisonnable. Elle refuse d'indemniser les veuves et elle oppose injustement la prescription quadriennale à certains. S'il est vrai que le traitement de ces dossiers requiert beaucoup de temps, l'administration semble faire preuve d'attentisme envers ces vétérinaires Sur le calcul du préjudice, par exemple, les périodes concernées étant anciennes, beaucoup d'entre eux ont perdu les pièces comptables et fiscales pouvant justifier les sommes perçues au titre de leur mandat sanitaire. À cet égard, le ministère s'était engagé à fixer, par arrêté, une assiette forfaitaire, comme le permet l'article R. 351-11 du code de la sécurité sociale ; mais il est ensuite revenu sur cet engagement qui aurait pourtant facilité la procédure d'indemnisation. C'est pourquoi il lui demande de lui indiquer les mesures concrètes qu'il entend prendre, pour permettre à ces vétérinaires, déjà très âgés pour certains d'entre eux, d'obtenir leurs légitimes indemnités, dans les meilleurs délais.
L'État a tiré toutes les conséquences des deux décisions du Conseil d'État du 14 novembre 2011. Il a mis en place, dès 2012, une procédure harmonisée de traitement des demandes d'indemnisation du préjudice subi par les vétérinaires du fait de leur défaut d'affiliation aux régimes général et complémentaire de sécurité sociale au titre des activités exercées avant 1990 dans le cadre du mandat sanitaire. Cette procédure est longue et complexe. Elle s'appuie sur la reconstitution des rémunérations perçues annuellement par chaque vétérinaire sur la période d'exercice de son mandat sanitaire jusqu'en 1990. L'activité sanitaire des vétérinaires s'avère, en effet, avoir été très variable selon les praticiens et ce indépendamment du département d'exercice. 1 050 vétérinaires ont déposé un dossier recevable et complet et accepté la proposition d'assiette sur laquelle seront calculés les arriérés de cotisation dus aux caisses de sécurité sociale ainsi que les minorations de pension échues pour les vétérinaires déjà retraités. Au 25 septembre 2017, 730 vétérinaires ont d'ores et déjà été indemnisés. Certains dossiers présentent néanmoins des difficultés particulières en raison d'un dépôt tardif. L'article 1er de la loi no 68-1250 du 31 décembre 1968 dispose que « sont prescrites au profit de l'État… toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis ». Le Conseil d'État a confirmé, dans ses décisions no 388198 et 388199 du 27 juillet 2016, que le délai de prescription de la demande d'indemnisation courait à partir du 1er janvier suivant le jour de la liquidation de la retraite. Il a aussi souligné que la nature de salaires des sommes correspondant à la rémunération des missions effectuées par un vétérinaire dans le cadre d'un mandat sanitaire avait été clairement établie par ses décisions du 12 juillet 1969 et du 12 juin 1974 qui ont donné lieu à diffusion et à retranscription dans plusieurs instructions de la direction générale des impôts. Ce n'était qu'à compter du 1er janvier 1990, date d'entrée en vigueur de la loi du 22 juin 1989 modifiant et complétant certaines dispositions du livre deuxième du code rural, que les rémunérations perçues au titre des actes accomplis dans le cadre du mandat sanitaire avaient été « assimilées », pour l'application du code général des impôts et du code de la sécurité sociale, à des revenus tirés de l'exercice d'une profession libérale. Ainsi le Conseil d'État a-t-il jugé que les vétérinaires ne pouvaient être légitimement regardés comme ignorants de leur créance au moment où ils ont liquidé leur droit à pension. Le Conseil d'État, dans une décision du 10 janvier 2007 (Mme Martinez, no 280217), a en outre jugé que l'erreur de l'administration était sans incidence sur la légalité de la décision par laquelle l'administration opposait la prescription quadriennale à la réclamation d'un administré. L'article 6 de la loi précitée dispose également que « les autorités administratives ne peuvent renoncer à opposer la prescription qui découle de la présente loi ». Si l'article 6 de la loi no 68-1250 du 31 décembre 1968 prévoit aussi que les créanciers de l'État peuvent être relevés en tout ou partie de la prescription, ce n'est qu'en raison de circonstances particulières, notamment de la situation du créancier. Cette possibilité ne peut être qu'exceptionnelle, au risque, en cas de généralisation, de remettre en cause toute sécurité juridique et toute égalité des citoyens devant la loi. Malgré ces difficultés, le processus de régularisation des dossiers éligibles se poursuivra afin de clore le plus rapidement possible ce différend. L'objectif est de soumettre, avant le 31 décembre 2017, une proposition d'accord à tous les vétérinaires retraités ainsi qu'aux conjoints de vétérinaires décédés ayant accepté, avant le 1er juillet 2017, la reconstitution de revenus proposés. 2018 devrait permettre de régulariser la situation des vétérinaires en activité ainsi que des derniers entrants dans la procédure.
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