Mme Sarah El Haïry attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur la nécessité de protéger davantage les sols en France, et de relancer les initiatives au niveau européen, pour parvenir à un accord sur cette question. Environ 80 % de la biomasse vivante se trouve au sein des sols. Essentiels à la survie sur terre, base physique des constructions mais surtout source de notre alimentation, ils sont cependant menacés. Lors du lancement par la Commission européenne, en 2002, de sa politique de protection du sol, 16 % de la superficie de l'Union européenne à 12, soit plus de 50 millions d'hectares, souffraient de dégradation. Au-delà de son impact sur l'environnement immédiat, une pollution des sols affecte très souvent la qualité de l'eau et peut représenter un danger pour la santé humaine. Selon un rapport de l'agence européenne pour l'environnement de 2015, la dégradation des sols atteindrait plus de 25 % de l'espace européen. Le sol est, de plus, un élément fondamental du système climatique. Il s'agit, en effet, du deuxième plus grand réservoir de carbone, le premier étant constitué des mers et des océans. Les dégradations risquent donc d'accroître le réchauffement climatique, alors que des pratiques agricoles et sylvicoles adaptées peuvent contribuer à la lutte contre ces phénomènes en augmentant la capacité de stockage des sols. Une proposition de « directive sol » avait été élaborée par la Commission européenne le 22 septembre 2006. Devant l'opposition d'un certain nombre d'États, et malgré l'intérêt du texte, il a été abandonné en 2014. Il n'existe donc pas de directive consacrée spécifiquement à la protection des sols, contrairement à l'eau ou à l'air dont il est pourtant indissociable. En France, si la loi « biodiversité » du 8 août 2016 a reconnu que les sols concourraient à la constitution du patrimoine commun de la Nation en matière, la protection juridique des sols reste insatisfaisante. En effet, le sol n'est pas protégé pour lui-même, et ne possède pas de statut juridique protecteur. De plus, le droit de l'environnement n'est pas suffisamment développé sur cette question notamment sur les questions liées à la qualité des terres agricoles. La question de l'accompagnement des agriculteurs face à la nécessité d'une protection croissante des sols mérite également d'être posée, de la pérennité de la qualité des sols dépendant également la pérennité de leurs emplois. Elle lui demande s'il est dans les projets du Gouvernement de participer à la relance d'une proposition de directive concernant la protection des sols, pour lutter efficacement contre la dégradation de cette ressource naturelle en Europe. De plus, elle lui demande quelle mesure il pourrait proposer pour parvenir à un statut juridique plus protecteur des sols en France. Elle lui demande quelles mesures il compte prendre pour accroître la protection de cette ressource naturelle, tout en accompagnant les acteurs économiques qui seraient affectés par ces évolutions législatives.
La protection des sols, outil de production des agriculteurs, constitue un enjeu majeur devant être pris en compte dans les politiques publiques nationales et territoriales. À ce titre, le ministère de la transition écologique et solidaire (MTES) et le ministère de l'agriculture et de l'alimentation (MAA) ont présenté lors de la séance du conseil national de la transition écologique (CNTE) du 7 décembre 2016 une proposition pour élaborer une stratégie nationale pour une bonne gestion des sols. Conformément aux travaux du conseil économique, social et environnemental (CESE), du conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) et du conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD), à la charte mondiale des sols et aux directives volontaires pour une gestion durable des sols (FAO), cette stratégie comprend les 4 axes suivants : 1 – Préserver quantitativement les sols pour préserver leurs fonctions et services non substituables, 2 – Des sols en bonne santé pour des ressources renouvelables saines et préservées, 3 – Améliorer la connaissance sur les sols pour mieux les gérer, 4 – Éduquer et sensibiliser à tous les niveaux de la société pour faire des sols un enjeu universel et partagé. Plus récemment, les états généraux de l'alimentation (EGA) ont souligné l'importance de la protection quantitative des sols - prévention de l'artificialisation - et la protection qualitative des sols agricoles - évitement de l'apport de matières organiques contaminantes qui pourraient engendrer des dégradations irréversibles, maintien de la fertilité des sols -, afin de garantir une production alimentaire durable et de qualité. La bonne gestion des sols, et notamment le maintien de leur qualité et fertilité, est d'ores et déjà intégrée dans les politiques publiques gérées par le MAA. D'une part, les pratiques bénéfiques à la protection des sols de l'érosion, au maintien de leur structure et leur teneur en matières organiques sont soutenues par les dispositifs de la politique agricole commune (PAC) : couverture des sols, maintien des prairies, entretien des haies, rotations culturales, diversité des assolements, agroforesterie… La PAC réformée renforce ces outils, notamment avec le « paiement vert », qui introduit une triple condition de diversification des assolements, de maintien des prairies permanentes et de présence de surfaces d'intérêt écologique sur les terres arables. Le fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) permet quant à lui de soutenir les actions visant à restaurer, préserver et renforcer les écosystèmes, à travers par exemple l'acquisition d'équipements performants. Ces éléments pourront être renforcés dans le cadre de la révision de la PAC en cours de négociation pour la période 2021-2017. Le MTES demande dans ce cadre, une conditionnalité renforcée de l'attribution des aides, qui tienne compte notamment de la qualité des sols. D'autre part, le MAA veille à la maîtrise des risques sanitaires liés aux matières apportées aux sols, à la maîtrise des intrants dans les systèmes agricoles, et à l'amélioration de la connaissance des sols. Le groupement d'intérêt scientifique sur les sols met en œuvre des programmes de mesure et de suivi de la qualité des sols, et dont les données sont rendues accessibles à tous. Le MAA soutient également l'Observatoire Agricole de la Biodiversité qui contribue à l'observation et au suivi de la biodiversité des sols. La France - MTES et MAA - participe activement aux travaux du Global Soil Partnership (FAO) et aux travaux du groupe d'experts européen conduit par la Direction générale de l'environnement (DG ENV) sur la protection des sols depuis 2015. Ces politiques publiques sont renforcées et mises en synergie dans le cadre du projet agro-écologique pour la France. En effet, l'agro-écologie, en visant l'optimisation des services rendus par les processus biologiques naturels dans les systèmes de production, replace les sols au cœur d'une approche « système ». Les groupements d'intérêt économique et environnemental (GIEE) créés par la loi d'avenir sur l'agriculture, qui promeuvent les démarches collectives via une attribution préférentielle des aides ou une majoration des aides attribuées, contribuent à la mise en œuvre effective du projet agro-écologique au niveau des entreprises agricoles et des filières, et ainsi à la préservation des sols agricoles. On en dénombre aujourd'hui plus de 477 regroupant environ 7 500 exploitations à travers le territoire. Enfin, parce que la richesse des sols en matière organique contribue à une adaptation aux changements climatiques par de meilleures propriétés hydriques et à une atténuation des effets du changement climatique, la France porte l'initiative « 4 pour 1 000, les sols agricoles pour la sécurité alimentaire et le climat » au niveau international depuis la COP 21.
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