Mme Annie Chapelier attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la redéfinition du contour de la carte des zones défavorisées. L'agriculture française fait face à ses propres difficultés, qu'elles soient d'ordre géologique, climatique, liées à la prédation de certaines espèces animales etc. De fait, l'indemnité compensatoire de handicap naturel (ICHN) compense les frais supplémentaires engagés et la perte de revenus résultant de ces contraintes. Près de 90 000 agriculteurs bénéficient de cette indemnité, moyennant 20 à 40 % de leur revenu agricoles global pour les zones les plus sensibles. Le règlement UE n° 1305/2013 relatif au développement rural a effectivement rendu cette révision obligatoire pour l'ensemble des États de l'Union d'ici 2018. Le nouveau zonage, notamment s'agissant des « zones soumises à contraintes naturelles » (ZSCN), obéit à des critères européens climatiques et biophysiques spécifiques, ne laissant pas le bénéfice de la discussion. Mme la députée craint qu'une telle harmonisation ne permette pas de rendre compte de la diversité des situations singulières du territoire gardois et des agriculteurs. Elle lui demande alors si des mesures complémentaires d'explication sont envisagées afin de rendre compte de ces situations. Elle lui demande, par ailleurs, quel est le dispositif de sortie envisagé, les mesures et le temps d'accompagnement qu'il compte mettre en place afin d'éviter les pertes et les déséquilibres financiers dans les exploitations.
Les zones défavorisées simples avaient été définies à la fin des années 1970 en se fondant sur des critères socio-économiques mais aussi, parfois, d'opportunité. Un rapport de la Cour des comptes européenne de 2003 pointait l'utilisation de critères non harmonisés conduisant à des situations très disparates au sein de l'Union européenne et à un classement contestable dans un certain nombre de cas. Une révision était donc nécessaire pour pérenniser les soutiens prévus aux agriculteurs de ces zones, en particulier l'indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN) en assurant une homogénéité de traitement pour les agriculteurs européens. Le règlement européen relatif au développement rural a rendu cette révision obligatoire pour l'ensemble des États membres d'ici 2019. Des discussions ont été engagées dès 2016 avec les professionnels agricoles afin d'établir ce nouveau zonage, qui se composera de deux parties : - une première partie, les « zones soumises à contraintes naturelles », qui découle de l'application stricte de critères européens biophysiques et climatiques, sur laquelle il n'y a pas de marge de discussion. La carte établie sur la base de ces critères est soumise à l'approbation du Joint Research Center de la Commission européenne ; - une deuxième partie, les « zones soumises à contraintes spécifiques » (ZSCS), sur laquelle les travaux sont en voie d'achèvement et où la prise en compte de certaines spécificités est permise. Ainsi, dans le respect du plafond de 10 % du territoire pouvant être classé sous cette catégorie, le caractère extensif de l'élevage dans certains territoires, ou encore certaines particularités d'intérêt pour l'environnement ou le paysage (présence de haies ou parcellaire morcelé, présence de surfaces peu productives ou de zones humides, zones soumises à déprise agricole, ou encore insularité) ont été prises en compte. La détermination des différents critères étudiés et retenus a fait l'objet d'une concertation étroite avec l'ensemble des organisations professionnelles agricoles. Le 15 mars 2018, une délégation française a présenté aux services de la Commission européenne la méthodologie nationale retenue pour le nouveau zonage. En complément de la carte stabilisée, la France a également partagé avec la Commission européenne le principe d'un critère d'homogénéité territoriale. En effet, après application des critères, certains biais statistiques rares entraînaient le non classement de petites enclaves au sein de plus vastes territoires classés. La France a ainsi mobilisé ses marges de manœuvre (dans le respect de l'obligation européenne de ne pas dépasser 10 % du territoire classé en ZSCS), à hauteur de 55 000 hectares supplémentaires, notamment afin d'inclure dans le zonage ces petites enclaves. La Commission européenne a demandé de justifier, commune par commune, qu'il s'agissait de zones enclavées au sein de zones classées et que ces zones n'avaient pas été retenues alors qu'elles étaient très proches des seuils fixés pour les critères utilisés. Une carte consolidée pour l'hexagone, après application du principe d'homogénéité territoriale, a été récemment et largement diffusée par les services du ministère de l'agriculture et de l'alimentation. Ce projet de carte peut être considéré comme une version de travail avancée dans les discussions avec la Commission européenne, cette dernière n'ayant pas émis d'objection de principe au stade actuel. Les échanges avec la Commission européenne se poursuivent afin de permettre la validation formelle de la méthodologie française et dès lors de la carte finale. Sur la base des travaux actuels, il y aura donc 14 210 communes classées contre 10 429 dans le zonage actuel. 5 074 communes seront nouvellement classées pour près de 8 000 bénéficiaires potentiels supplémentaires. Cependant 1 293 communes sortiront du zonage. S'agissant des critères utilisés, après près de deux années de concertation dont la qualité a été soulignée par l'ensemble des participants, il faut insister sur leur caractère rigoureux et équitable. En particulier, les paramètres de réglage économique qui accompagnent les différents critères en ZSCS visent tant à garantir l'équité entre les différents territoires classés qu'à obtenir un zonage global qui respecte le plafond des 10 % du territoire classé en ZSCS imposé par la réglementation européenne, afin là-aussi de veiller à l'équité des zonages entre agriculteurs des différents États membres. Les exploitants situés dans des zones sortantes bénéficieront, avant de sortir totalement du dispositif d'aide, et comme cela est permis par la réglementation européenne, de paiements au titre de l'ICHN dégressifs sur les années 2019 et 2020. Un accompagnement spécifique a été demandé aux préfets s'agissant des exploitations qui bénéficiaient des aides liées au zonage et qui sortiront de la nouvelle carte en 2019. Il importe également d'aider les exploitants situés dans ces zones à se projeter dans une nouvelle dynamique, la réflexion pouvant être associée à celle, plus large, sur l'accompagnement des agriculteurs situés en zones dites « intermédiaires ». Ainsi, le travail a débuté aux niveaux départemental et régional pour établir un diagnostic des systèmes de production et identifier les difficultés rencontrées par les entreprises agricoles dans ces zones. Des groupes de travail, sous l'autorité des préfets de région et associant les représentants des entreprises agricoles et des filières agroalimentaires et les conseils régionaux, auront pour objectif, sur la base de ces diagnostics, d'identifier les opportunités ainsi que les outils mobilisables et adaptés aux différents territoires et les conditions de leur bonne articulation, avec une attention particulière accordée aux nouveaux installés. L'ensemble de ces travaux permettront d'alimenter le comité national qui se réunit régulièrement. Le travail sur le zonage est en voie de finalisation pour mise en œuvre en 2019. À l'issue de cette réforme, le ministère de l'agriculture et de l'alimentation restera évidemment mobilisé, d'une part, au niveau européen pour défendre les intérêts des éleveurs, et notamment ceux des zones les plus difficiles, et d'autre part, au plan national, avec un accompagnement des agriculteurs sortant du dispositif, en lien étroit avec les conseils régionaux.
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