Mme Cécile Muschotti interroge M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur la pollution présente à Toulon et dans les principaux ports de la Méditerranée française. En effet, selon l'estimation faite par Air PACA, un navire à quai peut être équivalent à la pollution d'environ 30 000 véhicules. Si l'électrification des quais est une priorité partagée par tous, elle n'est aujourd'hui pas encore la référence notamment sur Toulon et bloque au niveau des sociétés qui ne souhaitent pas faire les aménagements nécessaires sur leurs navires. La présence de souffre au sein du carburant de ces navires fait aujourd'hui polémique quant aux risques sanitaires et écologiques pour les populations voisines des ports. Si 2020 prévoit le durcissement de la norme (de 3,5 % à 0,5 % de souffre), ce seuil ne paraît pas suffisant au regard des enjeux sanitaires et sociétaux. D'autres pays ont aujourd'hui pris la décision courageuse de renforcer encore les exigences avec un taux de 0,1 % comme la zone SECA en mer baltique ou sur les côtes des États-Unis. Elle l'interroge sur les mesures envisagées par l'État pour accompagner les collectivités territoriales souhaitant rendre propres les ports de leur territoire et plus précisément sur le durcissement de la norme en matière de souffre dans le carburant.
L'État a renforcé son engagement sur les mesures envisagées pour limiter la pollution dans les ports depuis la stratégie nationale portuaire de mai 2013 qui a pour objectif d'œuvrer pour la croissance verte à travers la logistique et le report modal, le développement des filières industrielles de demain, et l'aménagement des espaces naturels. Plus récemment, la loi de transition énergétique de juillet 2015 a confié aux ports la responsabilité du déploiement d'énergies alternatives comme l'électricité à quai ou la distribution de gaz naturel liquéfié (GNL). En effet, deux solutions permettent aujourd'hui de répondre aux problématiques de la qualité de l'air dans les ports : l'électricité à quai qui supprime totalement les émissions des navires en escale et le GNL qui supprime les émissions de soufre et de particules et réduit de 25 % les émissions de dioxyde de carbone et de 90 % les émissions d'oxydes d'azote. Ce carburant peut être utilisé aussi bien en escale qu'en navigation. Afin de développer ces énergies alternatives, l'État a développé une stratégie nationale de déploiement des infrastructures de GNL et d'électricité à quai dans les ports français. Deux documents d'orientations stratégiques ont été publiés : le schéma national d'orientation pour le déploiement du GNL comme carburant marin, en décembre 2016, puis, le cadre d'action pour le déploiement des carburants alternatifs en février 2017. La technologie de l'électricité à quai nécessitant de définir un modèle économique pertinent et de lever les contraintes techniques liées aux importantes puissances électriques requises pour alimenter les paquebots notamment, l'État mène actuellement une étude approfondie sur l'électricité à quai pour évaluer les capacités électriques des réseaux des terminaux portuaires et les solutions technologiques envisageables. Sur ce sujet, la façade méditerranéenne a un rôle précurseur puisque le port de Marseille est le premier port français à avoir mis en service, en 2017, un branchement électrique à quai pour des navires de commerce, les ferries de La Méridionale. Par ailleurs, dans le cadre du plan national de réduction des émissions de polluants atmosphériques, l'État a lancé, depuis 2017, un groupe de travail avec les ports sur la qualité de l'air qui vise, au-delà du développement des carburants alternatifs, à améliorer la connaissance sur la caractérisation et la circulation des émissions polluantes dans les zones portuaires et à identifier et évaluer les mesures et les solutions existantes afin d'accompagner les ports dans le choix de leurs investissements. Aujourd'hui, les carburants utilisés par les navires peuvent contenir 3,5 % de soufre. En 2020, ce taux passera à 0,5 % compte-tenu de la décision prise à l'automne dernier à l'Organisation maritime internationale (OMI). Toutefois, il est possible d'établir des zones de réduction des émissions (dites zone SECA pour les oxydes de soufre et NECA pour les oxydes d'azote). Dans ces zones, le taux maximum est de 0,1 % soit encore 5 fois moins que le plafond qui sera appliqué en 2020 en dehors de ces zones. Les navires neufs fréquentant ces zones doivent aussi émettre moins d'oxydes d'azote. Pour édicter de telles zones comme il en existe en Manche, mer du Nord, Baltique et autour du Canada et des USA, il est nécessaire de déposer un dossier à l'OMI, dans le cadre de l'annexe VI de la convention MARPOL. Ce dossier, dont les paramètres sont imposés par ladite convention, s'appuie sur une étude du trafic maritime, des émissions polluantes induites et de leurs conséquences sanitaires et environnementales. Il est certain que la densité du trafic en Méditerranée justifie que les populations du pourtour méditerranéen bénéficient de la même attention que celles voisines de la manche mer du Nord et Baltique ou du Canada et des USA. La France a lancé une telle étude d'impacts sur ses fonds propres, en 2017, qui couvre l'ensemble de la Méditerranée. Il s'agit de déterminer quel bénéfice sanitaire et environnemental serait apporté par une telle zone de réduction, dans un contexte de passage de la norme d'émission à 0,5 % en 2020 au niveau mondial. L'objectif est de pouvoir finaliser cette étude pour septembre 2018. Cette étude réalisée par l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris) avec le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema), le Centre interprofessionnel technique d'études de la pollution atmosphérique (CITEPA) et Plan Bleu sera achevée d'ici fin 2018. Une présentation des résultats sera organisée début septembre à Marseille. Puis une présentation formelle, dans le cadre de l'OMI, sera faite en octobre 2018. La France portera également le débat au sein du centre régional méditerranéen pour l'intervention d'urgence contre la pollution marine accidentelle (REMPEC). Le REMPEC, dans le cadre de son objectif no 15 de la Stratégie régionale pour la prévention et la lutte contre la pollution marine provenant des navires (2016-2021), a également prévu de lancer une étude sur les zones de contrôle des émissions (Emission Control Area, ECA) mais limitée à la question des oxydes de soufre. L'étude devrait être lancée le 8 juin prochain.
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