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Valérie Beauvais
Question N° 5769 au Ministère de l'intérieur


Question soumise le 20 février 2018

Mme Valérie Beauvais attire l'attention de Mme la ministre, auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur la récente décision du Gouvernement d'abaisser de 10 kilomètres par heure la vitesse maximale autorisée sur les routes secondaires à double sens, passant de 90 km/h à 80 km/h. Cette mesure, annoncée sans concertation, n'est pas sans conséquences et les principaux pénalisés sont à nouveau les résidents des territoires ruraux déjà frappés par les hausses successives des prix du carburant et ne disposant d'aucune alternative à la voiture pour se rendre à leur travail ou se déplacer. Alors que les zones dangereuses sont déjà limitées à 70 km/h, voire 50 km/h, il convient de s'interroger sur l'opportunité de cette mesure et son efficacité réelle. D'ailleurs celle-ci ne figurait pas dans le programme du Président de la République. Au contraire, il disait : « En France, les vitesses sont impaires: 30, 50, 70, 90, 110, 130. Cela participe de leur lisibilité [...] Je suis naturellement favorable, dès lors que les conditions de danger l'imposent, à abaisser la vitesse à 70. Mais abaisser en section courante la vitesse à 80 interrogerait l'ensemble de l'édifice ». En matière de sécurité routière, l'entretien des routes est primordial. Or cette responsabilité subit les conséquences des atteintes portées par l'État au budget des collectivités locales. Dans le cadre d'accidents mortels survenus sur le réseau secondaire, et lorsque la vitesse seule est remise en cause, celle-ci est très souvent nettement supérieure à la vitesse autorisée. Intensifier les contrôles, lutter contre les grands excès de vitesse et surtout doter les collectivités de réels moyens pour améliorer leurs infrastructures routières sembleraient davantage opérant et efficient que de réduire de 10 km/h la vitesse sur les routes départementales. Outre le coût financier que le remplacement de l'ensemble des panneaux de signalisation va engendrer, cette décision accentue la fracture territoriale et matérialise cette France à « deux vitesses ». Aussi, alors que les technologies nouvelles et la sécurité de plus en plus avancée des véhicules permettent une efficacité renforcée pour les automobilistes, elle lui demande de bien vouloir revenir sur cette décision et maintenir la réglementation actuellement en vigueur.

Réponse émise le 30 octobre 2018

Le comité interministériel de la sécurité routière réuni le 9 janvier 2018 par le Premier ministre témoigne de la volonté du Gouvernement de sauver plus de vies sur nos routes et de poursuivre la politique volontariste et innovante déjà engagée en matière de sécurité routière. Le Gouvernement ne peut pas passer sous silence ceux qui ont été tués sur les routes métropolitaines et ultra-marines comme il ne peut pas ignorer les 76 840 blessés en 2017, dont plus de 29 000 hospitalisés, qui pour certains garderont des séquelles toute leur vie. C'est bien pour réduire ces chiffres dramatiques qu'il a pris les mesures nécessaires. Lors du comité interministériel de janvier 2018, 18 mesures ont été décidées, parmi lesquelles la mesure n° 5 dont l'objet est de réduire la vitesse maximale autorisée hors agglomération. Ainsi, selon les termes du décret n° 2018-487 du 15 juin 2018 relatif aux vitesses maximales autorisées des véhicules, qui met en œuvre cette mesure, sur les routes bidirectionnelles sans séparateur central, la vitesse maximale autorisée est de 80 km/h à compter du 1er juillet 2018. Toutefois, sur les sections de routes comportant au moins deux voies affectées à un même sens de circulation et permettant ainsi le dépassement sécurisé des véhicules, la vitesse maximale autorisée est maintenue à 90 km/h et ce sur ces seules voies. La vitesse accroît tant l'occurrence des accidents - quelle que soit la cause - que leur gravité. La vitesse excessive ou inadaptée constitue la première cause de mortalité sur les routes françaises (31 %). En 2017, 3 684 personnes ont perdu la vie sur le réseau routier français. Les deux-tiers des accidents mortels (63 %), soit 2 156 personnes tuées, sont survenus sur le réseau routier hors agglomération et hors autoroute c'est-à-dire sur des routes bidirectionnelles qui étaient majoritairement limitées à 90 km/h. La mise en place d'une telle mesure a pour objectif d'épargner chaque année de nombreuses vies humaines ; les experts Goran NIELSSON et Rune ELVIK ont estimé qu'un abaissement de 1km/h de la vitesse pratiquée se traduit par un gain de 100 vies sur une année. En réduisant la vitesse maximale autorisée de 10 km/h, il est espéré épargner 300 à 400 vies par an. La mesure permet en effet de diminuer l'impact de la vitesse dans la mesure où elle contribue à l'anticipation des dangers et diminue les distances de freinage (la distance d'arrêt est de 57 mètres pour un véhicule roulant à 80 km/h contre 70 mètres pour un véhicule roulant à 90 km/h). Cet abaissement de la vitesse maximale autorisée à 80 km/h permettra en outre de fluidifier le trafic et de l'apaiser, avec des conséquences bénéfiques sur l'environnement (diminution des émissions de polluants). Le Premier ministre a instauré une clause de rendez-vous au 1er juillet 2020 afin d'étudier avec précision et objectivité l'impact sur l'accidentalité de cette expérimentation. A cet effet, une évaluation de cette expérimentation est mise en place portant tant sur l'évolution des vitesses moyennes pratiquées par les usagers que sur l'évolution des accidents et de la mortalité sur les routes bidirectionnelles concernées par la mesure. Le Gouvernement saura en tirer les conséquences. Cette décision s'inscrit dans un ensemble cohérent de 18 mesures prises par le comité interministériel de la sécurité routière du 9 janvier dernier, qui au-delà de la vitesse sont centrées sur la mobilisation de tous les acteurs mais aussi sur les comportements les plus risqués que sont l'alcool au volant ainsi que l'usage du téléphone en conduisant. La demande d'une mise en oeuvre de l'abaissement de la vitesse au cas par cas a été entendue. De ce fait, la mesure décidée par le Gouvernement prend en compte la nature des routes, de leurs caractéristiques et des aménagements qui ont été réalisés pour favoriser des dépassements avec un moindre risque et améliorer la sécurité des usagers. En effet, le Premier ministre a décidé que les routes pour lesquelles plusieurs voies sont affectées à un même sens de circulation, en général deux voies permettant un créneau de dépassement, garderaient leur vitesse limitée à 90 km/h. La détermination de la vitesse maximale autorisée sur les routes relève de la compétence du Premier ministre. La transférer aux préfets se traduirait sur le terrain par un effet très négatif sur la lisibilité du réseau routier pour les usagers français mais aussi étrangers qui l'empruntent, voire sur la cohérence de la vitesse sur un même axe qui traverserait plusieurs départements. En outre, il importerait que chaque changement soit accompagné d'un panneau, ce qui les multiplierait de manière très forte à l'échelle du territoire national, avec comme conséquence des coûts faramineux pour les collectivités et la présence d'autant de supports dangereux en bord de route. Il importe ainsi que la mesure soit tant proportionnée que lisible et compréhensible des usagers sur l'ensemble du territoire national.

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