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Marine Brenier
Question N° 5865 au Ministère de l'enseignement supérieur


Question soumise le 27 février 2018

Mme Marine Brenier attire l'attention de Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation sur le maintien de la compétitivité française dans le secteur spatial. La France est depuis 1965, le troisième pays à disposer d'un accès à l'espace et un acteur dynamique de l'industrie spatiale. Celle-ci a récemment connu de beaux succès avec la mise en service du système de GPS européen Galileo ainsi que la mission de la sonde Rosetta/Philae. Ces succès témoignent de l'implication et de l'excellence de la France dans ce secteur d'avenir. Depuis son lancement en 1973, le programme Ariane a connu un franc succès. La cinquième version est un lanceur parmi les plus fiables et performants du marché. En 2016, ArianeSpace a lancé dix satellites commerciaux sur dix-neuf commandes et a remporté la moitié des marchés soumis, soit sept sur treize. Cette excellente performance faisant d'ArianeSpace le leader mondial en lancement commerciaux, ne doit cependant pas masquer une réalité préoccupante. Le récent accomplissement de SpaceX, le 6 février 2018, qui réussit à tirer une fusée presque intégralement réutilisable, le lanceur le plus puissant en service, rappelle les risques qui pèsent sur la compétitivité de l'industrie spatiale européenne. Cette entreprise américaine privée est la seule à maitriser, à ce jour, la technologie des lanceurs réutilisables. Les programmes de lanceurs réutilisables Callisto et le moteur à allumage multiple Prometheus qui sont le fruit d'un partenariat entre le CNES et ArianeSpace, n'en sont qu'à leur début et pâtissent d'un financement limité et d'un retard conséquent. En matière d'investissement public, la France et l'Europe sont bien en deçà de leurs homologues américains, russes ou chinois. Le financement global de l'Agence spatiale européenne s'élève à environ 7,5 milliards d'euros contre 20 milliards de dollars pour la NASA pour le seul spatial civil (auxquels il faut ajouter 20 milliards supplémentaires pour les activités militaires). Alors que la relance de la course à l'espace se confirme davantage chaque jour avec d'une part une compétition étatique accrue portée par les nouveaux émergents, et une nouvelle dynamique venue des entreprises privées américaines soutenues par des partenariats public-privé, veut-on laisser l'Europe en marge de cette nouvelle révolution ? Les clés d'un succès de l'industrie spatiale sont pourtant à portée de main. À défaut de réformer sa gouvernance et d'en faire une agence exécutive de l'Union européenne, il semble nécessaire de doubler les moyens alloués à l'Agence spatiale européenne dans le cadre de la négociation du cadre financier pluriannuel de l'Union pour la période 2021-2027. Il semble également urgent d'accentuer nos efforts sur les projets portés par le Centre national d'études spatiales. Elle lui demande quelles mesures compte prendre la ministre afin de soutenir le dynamisme de la recherche industrielle spatiale en France.

Réponse émise le 18 décembre 2018

La filière spatiale française est présente sur l'ensemble de la chaine de la valeur (équipementiers, maîtres d'œuvre satellites et lanceurs, opérateurs, secteur aval…). En 2017, les ventes finales consolidées (secteur manufacturier français) ont atteint 4,6 Md€ (16 203 emplois directs hautement qualifiés) ce qui représente 65 % des ventes finales du secteur spatial européen. Afin de partager une vision claire des priorités, d'anticiper les évolutions du marché et, in fine, de renforcer la compétitivité de la filière, l'ensemble des acteurs publics et privés de ce secteur ont créé en 2013 un Comité de concertation état industrie (COSPACE), co-présidé par la Ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, la Ministre des armées et le Ministre de l'économie. Depuis sa création en septembre 2013, 5 réunions au niveau ministériel ont eu lieu. La réponse de la France à la compétitioninternationale se joue sur trois plans : ­1 - Le maintien de l'excellence technologique et scientifique de Planck à Philae en passant par SEIS (séismomètre embarqué sur la mission martienne INSIGHT), la France démontre une capacité scientifique unique et reconnue au niveau international et est aujourd'hui le deuxième pays pour l'exploration martienne après les Etats-Unis. Elle a pris le leadership avec MicroCarb et Merlin (coopération DLR) pour l'observation des gaz à effet de serre et s'est placée au cœur de la dynamique internationale visant à profiter au mieux des données spatiales pour le suivi et la lutte contre le changement climatique en étant à l'origine de la création du Space Climate Observatory lors du « One Planet Summit » fin 2017. De même, le Centre spatial de Toulouse représente une infrastructure remarquable qui invente les satellites de demain et reste capable de développer en interne des instruments, ce qui est unique en Europe. En complément, le CNES et les industriels français ont lancé plusieurs programmes sur les nouvelles technologies innovantes : réutilisation des lanceurs avec le moteur Prometheus et le démonstrateur CALLISTO, propulsion électrique avec le développement PPS5000 par SAFRAN, satellite à très haut débit avec la commande par Eutelsat de KONNECT VHTS à Thales Alenia Space. Ces travaux sont soutenus et co-financés par le gouvernement de manière importante et pérenne au travers des programmes P193 et P191 et du PIA (PIA 2 - volet Espace). Par ailleurs, l'ensemble de la filière est présente dans les nouveaux projets de constellations tant pour les télécommunications (O3b, OneWeb, LeoSat…) que l'observation de la Terre (LeoStella, Earth Now, Pleiades NEO…). ­2 - Une meilleure intégration dans l'écosystème français et européen : Depuis deux ans, le CNES multiplie les initiatives afin de favoriser l'innovation et développer les usages du spatial au sein des écosystèmes extérieurs, spatiaux ou non. Une dynamique est née, qui est devenue une marque à part entière « Connect by CNES ». En interne, elle s'appuie sur l'ensemble des acteurs de la chaine d'innovation (R&T, projets, …) ainsi que sur l'expertise d'un réseau d'équipes techniques qui développent des briques de base pour de nouvelles applications (télécommunications, navigation, observation de la Terre). En externe, elle se décline sur le mode WIFI pour Work, Invent et Finance : Work, partenariat avec les équipes du CNES, Invent avec les start-ups comme accélérateur d'innovation et finance grâce au fonds d'investissement CosmiCapital pour encourager l'entreprenariat et le développement des entreprises de l'écosystème spatial. L'idée est de faire du secteur spatial un accélérateur d'innovation pour l'ensemble de l'industrie française en développant le transfert de technologie et en renforçant l'ensemble de l'écosystème : en amont les maîtres d'œuvre industriels, les équipementiers et les nouveaux entrants, en aval les start-ups pour les applications et les nano-satellites. Les utilisateurs finaux peuvent ainsi mieux faire connaitre et comprendre leurs enjeux et leurs besoins et s'adresser plus facilement aux fournisseurs d'applications spatiales. ­3 - Le développement des coopérations internationales : Pour agir dans cette compétition hybride, il est indispensable de coopérer à l'international tant avec nos partenaires européens qu'avec les grands pays spatiaux ou les nouveaux entrants. Ainsi, l'accord signé par le CNES début 2018 avec l'agence spatiale allemande porte à la fois sur le lanceur du futur, l'innovation disruptive et le SpaceTug (avec comme partenaire Airbus Defence and Space). Le Space Climate Observatory est aussi une action forte pour renforcer les liens avec de nombreuses agences dans le monde pour innover sur le suivi et la lutte contre le changement climatique, notamment l'agence spatiale chinoise. Peut également être cité l'accord conclu par le CNES avec l'agence Japonaise JAXA pour développer des technologies relatives aux lanceurs réutilisables, au travers du véhicule expérimental CALLISTO. Au niveau européen, la France défend la place des enjeux spatiaux dans la révision des règlements et cherche à sécuriser les budgets alloués à l'Espace dans le cadre financier pluriannuel de l'Union sur la période 2021-2027 (16 Md€ pour les grands programmes spatiaux européens Galileo/EGNOS, Copernicus, SSA et Govsatcom, 2,5 Md€ pour des programmes de recherche innovants au travers du programme Horizon Europe).

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