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Emmanuelle Ménard
Question N° 593 au Ministère de l’intérieur


Question soumise le 8 août 2017

Mme Emmanuelle Ménard attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur les conditions de travail des policiers. Tous les mois, 500 policiers sont blessés en mission. Agressions, caillassages, insultes, voies de fait sont le quotidien des forces de l'ordre. À cela s'ajoute désormais une situation particulièrement dangereuse comme celle vécue le 10 juillet 2017 à Roubaix, par des policiers tombés dans un véritable guet-apens. Les policiers qui poursuivaient les émeutiers sont tombés dans des cavités, des pièges volontairement échafaudés par les faiseurs de troubles pour blesser et pourquoi pas tuer les personnels des forces de l'ordre. À l'évidence, les policiers sont devenus la cible des délinquants et, en dépit de la montée en puissance de cette violence urbaine, les policiers français restent en sous-effectif par rapport à de nombreux pays européens. À titre d'exemple, pour 100 000 habitants, en Espagne on compte 500 policiers, en Allemagne ils sont 298 et en France seulement 169. Les 7 500 postes promis par Emmanuel Macron lors de sa campagne présidentielle resteront donc insuffisants. Les policiers de « l'Hexagone » sont trop peu nombreux et mal équipés pour pouvoir intervenir dans les différentes zones de non-droit qui marquent la France. Les nouvelles coupes budgétaires et les récentes annulations massives de crédits mettent en péril tous les services : sécurité publique, CRS, police de l'air et des frontières, police judiciaire et renseignement. Tous seront malheureusement affectés. Une telle situation préoccupe sérieusement les policiers eux-mêmes alors qu'ils sont l'un des piliers de la souveraineté de la Nation qui assure, jour après jour, la sécurité des Français. Ainsi, comme l'armée, ils subissent une austérité budgétaire dangereuse pour leur propre sécurité et, par extension, pour celle des Français. Emmanuel Macron, lors de sa campagne présidentielle, prônait « la tolérance zéro » : comment le Gouvernement compte-t-il atteindre cet objectif alors que les forces de l'ordre sont les oubliées des gouvernements successifs ? Déjà, en 2016, les policiers se disaient « à bout » car non seulement leurs conditions de travail sont déplorables (locaux insalubres, absence de fiabilité de nombreux matériels, manque de véhicules nécessaires aux patrouilles, formations potentiellement revues à la baisse alors qu'elles garantissent le maintien de la compétence des personnels, etc.), mais aussi parce que les innombrables heures supplémentaires effectuées usent les policiers. Un quotidien rapporte à ce sujet qu'« il est difficile pour les agents de récupérer toutes leurs heures supplémentaires ou de poser leurs congés. En mars dernier, les policiers d'élite du service de la protection (SLDP) réclamaient un million d'heures supplémentaires à leur direction. [...] Fin 2016, on aura largement dépassé le seuil des 20 millions d'heures supplémentaires dans la police nationale », a estimé un représentant syndical. Elle lui demande donc quelles dispositions il compte prendre pour permettre aux policiers de poursuivre efficacement leur mission de protection de la population française afin que l'état de droit soit respecté sur l'ensemble du territoire national.

Réponse émise le 26 décembre 2017

Les policiers comme les gendarmes assurent chaque jour, avec dévouement, professionnalisme et courage, le respect de la loi et la protection de nos concitoyens, dans des situations fréquemment difficiles et dangereuses, parfois au péril de leur vie. Tout doit être mis en œuvre pour garantir aux policiers et aux gendarmes des conditions de travail satisfaisantes et pour leur donner les moyens de remplir leurs missions dans de meilleures conditions d'efficacité et de sécurité, alors même qu'ils font l'objet de violences et de menaces croissantes. Dans son discours du 18 octobre 2017 aux forces de sécurité intérieure, le Président de la République a fixé les principes et objectifs de la politique de sécurité, qui repose sur des moyens accrus et de nouveaux modes d'action, avec pour objectif de répondre toujours plus efficacement aux défis sécuritaires et aux attentes de la population et de donner aux forces de sécurité intérieure les moyens et les méthodes pour agir encore plus efficacement. La sécurité est donc une priorité du Gouvernement qui, dans un contexte d'indispensable maîtrise de la dépense publique, se traduit par de réelles avancées. Il convient à cet égard de souligner que l'ajustement budgétaire auquel il a dû être procédé à l'été 2017 (annulation de 110 M € de crédits sur le programme 176 « police nationale ») a été tout à fait exceptionnel.Tout a été mis en œuvre dès l'été pour contenir les effets de ces annulations de crédits en opérant les meilleurs ajustements au profit des services opérationnels. Par ailleurs, dès 2018, le budget des forces de sécurité intérieure augmentera de 1,5 % par rapport à 2017, pour atteindre 12,8 Md €. Les moyens exceptionnels consentis ces dernières années dans le cadre de différents plans de renforts sont en particulier consolidés et augmentés. Le seul budget de la police nationale augmentera de 1,9 % par rapport à 2017. Le Premier ministre a en outre décidé que le montant des crédits « police » initialement gelés serait de 3 % en 2018, et non plus de 8 %. Cette différence permettra de débloquer, dès le début de gestion, des montants plus élevés afin de réaliser des travaux immobiliers et de passer des commandes de véhicules plus rapidement. Les crédits d'investissement et de fonctionnement, si indispensables pour le quotidien des policiers, seront en augmentation. Le budget dédié aux équipements atteindra, pour chaque force, près de 150 M € en 2018, gage de policiers et de gendarmes mieux équipés et mieux protégés. Ce budget permettra également de poursuivre la modernisation et l'amélioration des équipements, par exemple des équipements de protection et d'intervention, ou du parc automobile avec la livraison en 2018 de 2 700 véhicules neufs pour la police nationale. Au sein de la police nationale, les crédits d'investissement permettront un effort majeur en faveur des locaux de police, qu'il s'agisse de travaux de rénovation, de réhabilitation ou de constructions neuves, avec un budget « immobilier » de 196 M €, qui doit apporter des améliorations concrètes et directes aux conditions de travail des policiers. Par ailleurs, 10 000 postes de policiers et de gendarmes seront créés durant le quinquennat, avec près de 1 900 recrutements dès 2018, dont près de 1 400 dans la police nationale. Au-delà des moyens humains, matériels, technologiques, un cadre d'action renouvelé est indispensable, plus adapté aux spécificités locales et faisant du renforcement du lien avec la population un enjeu central et permanent. La mise en place prochaine de la police de sécurité du quotidien permettra, avec les élus locaux et l'ensemble des acteurs de la sécurité, d'apporter de nouvelles réponses, au plus près des réalités locales, aux fortes attentes de la population. Cette réforme permettra de déconcentrer davantage les politiques de sécurité, pour promouvoir une police « sur-mesure », de renforcer la coopération avec les autres acteurs de la sécurité, pour une police plus partenariale, de disposer de policiers mieux équipés et plus nombreux, grâce aux efforts budgétaires rappelés plus haut. Préalable à cette réforme, qui sera pensée et élaborée en partant de la base, un large cycle de consultations a été engagé par le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, le 28 octobre 2017, sur le plan national et sur le plan local, avec l'ensemble des acteurs concernés : organisations syndicales de la police et structures de concertation de la gendarmerie, polices municipales, associations d'élus, sécurité privée, etc. Surtout, une consultation individuelle de chaque policier et gendarme a été engagée. De premières expérimentations seront lancées début 2018 dans plusieurs sites présentant des caractéristiques diverses (territoires urbains, périurbains et ruraux). Il est également nécessaire, pour redonner du sens à l'action et pour optimiser le potentiel opérationnel, de supprimer les contraintes administratives qui entravent l'action des policiers et des gendarmes ou les détournent de leurs priorités opérationnelles. Un nouvel élan est de ce point de vue indispensable pour poursuivre la suppression des tâches indues et l'allégement de la procédure pénale. C'est aussi un des gages de succès de la police de sécurité du quotidien, puisque cette action permettra de disposer de policiers recentrés sur leurs missions prioritaires et dotés d'outils juridiques adaptés à la délinquance de masse. Un travail conjoint intérieur/justice a été engagé dans le cadre des « Chantiers de la justice » lancés par le ministère de la justice le 5 octobre 2017. Diverses pistes sont examinées : simplification des cadres d'enquête, oralisation de certaines procédures, allégement du formalisme procédural pour le contentieux de masse, etc. Afin que cette démarche aboutisse à des résultats concrets, des acteurs de terrain (policiers, gendarmes et magistrats) y sont associés. Pour leur donner les moyens d'être plus efficaces sur le terrain et rendre plus effective la réponse pénale, il convient aussi de doter les forces de l'ordre d'instruments adaptés à la réalité du terrain, qui leur permettent d'apporter des réponses rapides et effectives aux infractions mineures et pourtant insupportables aux yeux des Français, notamment des plus fragiles. De nouveaux instruments de réponse pénale vont donc être élaborés, en particulier la possibilité de sanctions immédiates par le biais de la « forfaitisation » de certains délits. Ces travaux tendant à la simplification et à l'amélioration de la procédure pénale ainsi qu'à une plus grande efficacité des peines devraient se traduire par des propositions dès le début de l'année 2018, puis aboutir à un projet de loi pénale qui sera présenté au Parlement au printemps 2018. La réduction des « tâches indues », engagée depuis plusieurs années, se poursuit activement, avec par exemple la suppression des gardes statiques devant de nombreux tribunaux et préfectures et la signature le 28 septembre 2017 d'une circulaire sur la poursuite du transfert de charge des missions d'extractions judiciaires du ministère de l'intérieur vers le ministère de la justice, qui ne laissera à terme que vingt extractions dites vicinales à la charge des forces de l'ordre (extractions induites par la proximité entre un établissement pénitentiaire ou une juridiction et un service de police ou de gendarmerie). Enfin, il convient de souligner qu'au-delà des mesures prises pour améliorer le quotidien de travail des policiers sur le plan matériel (immobilier, équipements de protection, véhicules, outils numériques, etc.), le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur s'investit particulièrement dans les grands enjeux de sécurité, d'hygiène et de santé des personnels, qu'il s'agisse par exemple de la réforme du temps de travail, qui fera l'objet d'une évaluation complète menée tout au long de l'année 2018 sur différents types de services comme sur les différents cycles, en particulier celui dit de la « vacation forte », ou des travaux menés en coopération avec les représentants syndicaux afin d'améliorer encore les mesures permettant de mieux détecter et prévenir les suicides et leurs tentatives.

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