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Gisèle Biémouret
Question N° 6769 au Ministère des armées


Question soumise le 27 mars 2018

Mme Gisèle Biémouret appelle l'attention de M. le Premier ministre sur la situation dramatique de la guerre au Yémen. Voilà trois ans que ce pays traverse « la pire crise humanitaire du monde » selon l'ONU. Sur une population de 27 millions d'habitants, 19 millions ont besoin d'une aide humanitaire, 8 millions sont au bord de la famine et des milliers de civils sont morts. Alors que des crimes de guerre sont dénoncés par la communauté internationale, la France continue d'autoriser l'exportation d'armes à l'Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis, les deux principaux acteurs de la coalition. Si cela était avéré, ces exportations s'effectueraient en violation du Traité sur le commerce des armes (TCA) et de la position commune de l'Union européenne interdisant les transferts de matériels militaires. Le Parlement européen a adopté, en novembre 2017, une résolution visant à un embargo sur les ventes d'armes à l'Arabie Saoudite. Depuis, plusieurs États ont annoncé qu'ils cesseraient de livrer des armes aux pays engagés dans la coalition, conscients des risques encourus pour la population et de la potentielle complicité des États exportateurs d'armes. Au-delà de la question cruciale de la légalité des agissements de la France, la vie de la population civile yéménite est en jeu. L'opacité des autorisations d'exportations et des systèmes d'octroi des licences rend difficilement possible le contrôle de la légalité des exportations d'armement au regard du droit international. Aussi, elle lui demande, en sa qualité d'autorité délivrant les licences d'autorisation d'exportation de matériels militaires, de mettre fin à la vente d'armes aux pays engagés au sein de la coalition contre le Yémen.

Réponse émise le 16 octobre 2018

La politique menée par la France en matière d'exportation d'armement repose sur le strict respect à la fois, de ses engagements internationaux concernant en particulier la lutte contre la prolifération des armes de destruction massive et la prévention de la dissémination des armements conventionnels, et des embargos sur les armes imposés par les organisations internationales. Dans ce contexte, toute exportation d'équipement sensible requiert une autorisation du Premier ministre accordée au terme d'un examen rigoureux effectué par la commission interministérielle pour l'étude des exportations de matériels de guerre. Présidée par le secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale, cette commission apprécie les projets d'exportation sous leurs différents aspects. Ses avis peuvent être assortis, le cas échéant, de conditions visant à obtenir des engagements sur la destination finale des composants vendus et destinés à être intégrés dans un équipement (preuve d'arrivée à destination, certificat d'utilisation finale), et sur l'absence de réexportation de ces matériels. Par ailleurs, en sa qualité de membre de l'Union européenne, la France fonde l'appréciation de ses opportunités d'exportation sur les 8 critères de la position commune du Conseil n° 2008/944/PESC du 8 décembre 2008 définissant les règles communes régissant le contrôle des exportations de technologie et d'équipements militaires. Ainsi, outre la nature des matériels (équipements complets ou composants, sensibilité, degré de létalité…) et leur destination (utilisation par le pays acheteur ou réexportation), peuvent être cités : le respect des droits de l'Homme dans le pays de destination finale des matériels ; la situation intérieure du pays acheteur ; la préservation de la paix, de la sécurité et de la stabilité régionale ; ou encore la sécurité nationale des États membres et de leurs pays amis et alliés. La France s'est en outre fortement investie dans l'élaboration et la négociation du Traité sur le commerce des armes (TCA), entré en vigueur le 24 décembre 2014, notamment en s'engageant fermement pour le respect du droit international, et tout particulièrement des droits de l'Homme. Notre pays met en œuvre un processus robuste pour le traitement des autorisations d'exportation lui permettant de se conformer aux termes de ce traité. D'une manière générale, la France reconnaît le besoin légitime des États désireux d'assurer la sécurité de leur propre territoire et de combattre le terrorisme. Par ailleurs, les exportations d'armement s'inscrivent dans le cadre d'une relation de confiance nouée dans la durée avec les États qui se sont eux-mêmes engagés à respecter le droit international humanitaire et les droits de l'Homme. Lors de l'instruction d'une demande d'exportation de matériels de guerre, une analyse est donc conduite pour chaque type d'équipement sur la base de critères d'appréciation renforcés conformes au droit international. Seules sont accordées les autorisations qui correspondent à la satisfaction des besoins légitimes des pays concernés et qui ne contreviennent ni aux engagements internationaux de la France, ni aux embargos décidés par les organisations internationales. Enfin, la France reconnaît l'urgence de mettre un terme au conflit au Yémen et soutient donc pleinement les efforts et l'action diplomatique déployés par l'envoyé spécial pour le Yémen, nommé par le secrétaire général des Nations unies, dans le but de rapprocher les parties yéménites afin de poser les fondations d'une solution politique à la crise que traverse ce pays.

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