Mme Emmanuelle Ménard interroge M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur le rôle des organisations non gouvernementales (ONG) dans le flux migratoire qui submerge l'Europe. Selon les derniers chiffres de l'Organisation internationale des migrants, plus de 110 000 migrants sont arrivés en Europe par la mer depuis le premier janvier 2017. Avant d'atteindre le sol européen, 2 360 immigrés sont déjà morts au cours des différentes traversées. Face à cet afflux toujours plus important d'immigrés, certaines ONG sont suspectées d'outrepasser leurs prérogatives en se transformant en véritables « passeurs » au nom des droits de l'Homme. L'association allemande Jugent Rettet va jusqu'à accuser certaines d'entre elles, comme Médecins sans frontières (MSF), de « favoriser l'immigration clandestine ». Cette polémique n'est pas nouvelle puisque, déjà en 2016, l'agence Frontex accusait les ONG qui travaillent en Méditerranée de « collusion » avec les passeurs et les contrebandiers. Le journaliste Duncan Robinson relatait quant à lui que « des indications claires [ndlr : avaient été données aux migrants par les passeurs] avant le départ sur des directions précises dans le but d'atteindre les bateaux des ONG ». Frontex avait réitéré explicitement ses accusations dans un rapport publié en janvier 2016 du « premier cas rapporté où des réseaux criminels ont introduit clandestinement des migrants sur des bateaux d'ONG ». L'agence Frontex a également souligné que des opérations de secours sont parfois organisées grâce aux lumières des bateaux d'ONG, qui serviraient de repère aux embarcations. En outre, la même agence a révélé que les ONG naviguent souvent « trop près des côtes libyennes ». À quoi les organisations humanitaires répondent qu'elles sont « là où il y a des besoins », selon un quotidien britannique. Elle l'interroge donc sur les dispositions qui seront prises au niveau européen et national pour faire la lumière sur ces accusations et sanctionner, si nécessaire, les ONG qui alimenteraient les réseaux d'immigration clandestine.
Alors qu'en 2015, environ un million d'entrées irrégulières avaient été enregistrées dans l'UE, les mesures adoptées en Méditerranée centrale et la poursuite de l'application de la déclaration conjointe UE-Turquie ont permis finalement que le nombre total des entrées irrégulières pour l'année 2017 s'établisse à 204 000, ce qui témoigne de la capacité européenne à reprendre le contrôle de ses frontières. Parallèlement, les mesures adoptées ont permis une diminution certes insuffisante, mais néanmoins importante du nombre de disparitions en Méditerranée. La spécificité des arrivées de migrants et réfugiés par voie maritime, sur des esquifs impropres à la traversée de la Méditerranée et très souvent en détresse, complique le travail de contrôle de cette frontière extérieure, les arrivants devant dans la plupart des cas être secourus, en application des règles internationales de sauvetage en mer. Il ne peut être exclu que la présence de certains navires d'ONG, comme de tout bateau circulant en Méditerranée, ait pu être instrumentalisée par des trafiquants percevant cette présence comme un encouragement à embarquer des migrants vers l'Europe. L'adoption par les autorités italiennes en août 2017 d'un code de conduite à destination des ONG a permis une régulation de l'activité de ces dernières en Méditerranée centrale. Ce code permet en effet une coordination renforcée de l'action des ONG avec les autorités italiennes, en particulier judiciaires et policières, qui peuvent accéder sous certaines conditions aux navires affrétés par les ONG afin d'y conduire des enquêtes sur les trafics de migrants et la traite d'êtres humains. Les ONG ayant refusé de signer ce code de conduite ne peuvent débarquer dans les ports italiens et ont suspendu leurs opérations en Méditerranée centrale. Les chefs d'Etat et de gouvernement italien, allemand et espagnol et la Haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, réunis à Paris le 27 août 2017 dernier à l'initiative du Président de la République, ont soutenu ce code de conduite et ont appelé les ONG actives dans la zone à y adhérer. Cette coopération est aujourd'hui remise en question par la décision du gouvernement italien de fermer les ports italiens aux bateaux d'ONG ayant secouru des personnes en détresse en Méditerranée centrale.
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