M. Jean Lassalle attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur les éléments concordants montrant l'existence de prélèvements forcés d'organes sur des prisonniers de conscience en Chine. En Chine, la pratique de prélèvement d'organes après exécution a commencé au milieu des années 1980. Les associations de défense des droits de l'Homme ont toujours estimé que les prisonniers exécutés étaient la source principale des organes destinés à la transplantation. Cependant, le nombre de ceux-ci ne permet pas d'expliquer l'augmentation colossale du nombre de transplantations observé depuis 1999. En effet, le nombre de centres de transplantations en Chine est passé de 150 à 600 entre 1999 et 2006. D'après trois rapports internationaux accablant (Kilgour/Matas en 2008, Gutman en 2015, Kilgour/Matas/Gutman en 2016), établis à partir d'enquêtes indépendantes, ces pratiques auraient pour première cible les pratiquants bouddhistes du Falun Gong, emprisonnés du fait de la répression sanglante que subit leur mouvement, mais également des groupes minoritaires ethniques ou religieux (tibétains, ouïghours, chrétiens). Ces prélèvements servirent à alimenter une filière nationale de vente d'organes. Ces mêmes rapports montrent que le système carcéral chinois interagit avec les hôpitaux chinois pour organiser l'approvisionnement en organes. Sur la base de ces éléments, le 12 décembre 2013, le Parlement européen a adopté une première résolution contre les prélèvements forcés d'organes en Chine, recommandant aux États membres de condamner publiquement les abus en matière de prélèvements d'organes. En complément de cette résolution en 2016, le Parlement a adopté la Déclaration écrite WD 48 qui demande à chaque État membre de l'Union d'agir contre ces pratiques. Bien que la Chine dit avoir interdit en 2015 le prélèvement d'organes des condamnés à mort sans l'accord préalable de ceux-ci, des interrogations subsistent quant à la réalité des chiffres de transplantations annoncés par le régime chinois, qui masqueraient la poursuite de prélèvements d'organes à grande échelle à partir de donneurs non-consentants. Dans les mêmes temps, plusieurs entreprises pharmaceutiques, parmi lesquelles les géants européens Roche et Novartis, ont été pointées du doigt par des associations de défense des droits de l'Homme comme Amnesty International et par de grands médias européens comme le journal allemand Die Zeit pour avoir réalisé des essais cliniques en Chine dans le domaine de la transplantation et pour avoir signé sans transparence aucune des « partenariats de recherche », largement financés par des centres de transplantation chinois. Ainsi, il lui demande bien vouloir indiquer quelle a été l'action de la France pour s'assurer de la réalité de l'interruption de ces prélèvements non-éthiques et pour garantir que les entreprises pharmaceutiques françaises ne contribuent pas indirectement, par leurs financements, au trafic d'organes humains en Chine.
La lutte contre la traite des êtres humains est une priorité de la France qui entend favoriser une approche multidisciplinaire (justice, forces de police et de gendarmerie, services sociaux et société civile). L'approche française s'appuie sur quatre volets, tels que définis par son plan d'action national et par le plan d'action mondial contre la traite des êtres humains adopté en 2010 par l'Assemblée générale des Nations unies : prévenir, protéger, poursuivre et promouvoir les partenariats de coopération. La Chine a rendu illégal le trafic d'organes en 2007 et a officiellement mis fin aux prélèvements d'organes sur des prisonniers exécutés en 2015. La réforme a permis des avancées positives. Aujourd'hui, le système de transplantation est basé sur des dons d'organes. L'enjeu pour la Chine demeure à présent la pleine mise en œuvre de la loi. La France et la Chine sont parties à la convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée, dite convention de Palerme et à son protocole additionnel visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants. Lors de la 8ème conférence des Etats parties de la convention de Palerme à Vienne en octobre 2016, la France et l'Italie ont présenté et fait adopter une résolution qui a permis de jeter les bases d'un futur mécanisme d'examen de l'application de la convention et de ses protocoles, afin de garantir la mise en œuvre de leurs dispositions par tous les Etats membres. La définition internationalement agréée de la traite des êtres humains contenue dans le Protocole à la Convention de Palerme comprend explicitement le prélèvement d'organes qui doit donc être réprimé par tous les Etats parties. Il en est d'ailleurs de même pour la Convention du Conseil de l'Europe contre la traite des êtres humains à laquelle est partie la France. Au sein de l'Union européenne, la traite des êtres humains, qui intègre la question de la traite aux fins du prélèvement d'organe, fait partie d'une des 13 priorités retenues du cycle politique européen de lutte contre la criminalité organisée (2014-2017), identifiées par EUROPOL. Cette priorité devrait être maintenue dans le prochain cycle (2018-2021). La problématique du prélèvement d'organes et la dimension externe de la traite des êtres humains sont également abordées dans la stratégie de l'UE en vue de l'éradication de la traite des êtres humains 2012-2016, actuellement en cours de révision au sein de la Commission européenne. La France a par ailleurs coparrainé en septembre 2017 une résolution portée par l'Espagne et le Guatemala sur l'adoption de mesures efficaces, le renforcement et la promotion de la coopération internationale concernant le don et la transplantation d'organes pour prévenir et combattre la traite des personnes à des fins de prélèvement d'organes et de trafic d'organes humains. Sans porter d'appréciation sur la nature du mouvement Falungong, la France entend continuer ses efforts en faveur du respect, par la Chine, de la liberté de religion ou de conviction. Elle souhaite, à ce titre, la libération des prisonniers de conscience. De manière générale, la France évoque régulièrement la question des droits de l'Homme en Chine lors des entretiens bilatéraux de haut niveau. Elle exprime ses préoccupations publiquement au Conseil des droits de l'Homme, notamment s'agissant de la situation des droits de l'Homme au Tibet et au Xinjiang.
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