M. Patrice Anato attire l'attention de M. le ministre de la cohésion des territoires sur la problématique des campements illicites et des bidonvilles. Le dixième état des lieux national sur les campements illicites et les bidonvilles publié par la délégation interministérielle à l'hébergement et l'accès au logement (DIHAL) à la fin du mois de février 2018 confirme une baisse tendancielle du nombre de personnes vivant dans des bidonvilles. Toutefois derrière cette baisse, il faut souligner que ce sont encore 14 800 enfants, femmes et hommes qui sont recensés comme vivant dans des squats insalubres ou des cabanes de fortune. Sur les 571 campements illicites et bidonvilles qui se trouvent en France métropolitaine, 124 sites se trouvent en Île-de-France dans lesquels on estime le pourcentage de mineurs à 36 %. Le département de la Seine-Saint-Denis est le plus touché par ce phénomène avec une concentration de 13 % des bidonvilles et des campements illicites de la métropole française. Cette actualité tragique fait écho avec les villes de la troisième circonscription de Seine-Saint-Denis : Neuilly-Plaisance où l'Abbé Pierre créa la première communauté Emmaüs de France en 1949 et Noisy-le-Grand où le père Joseph Wresinki fonda ATD Quart-Monde. 64 ans après l'appel du 1er février 1954, beaucoup de choses ont été faites mais c'est encore 14 800 individus de trop qui se retrouvent dans des campements illicites synonymes de misère, de manque d'accès inquiétants aux services d'hygiène et de confort élémentaire. La fin de l'existence de ces campements illicites et bidonvilles est une mesure de santé publique et d'égalité républicaine. Il lui demande donc de bien vouloir énoncer la stratégie du Gouvernement en ce sens et dans quelle mesure les collectivités qui sont en première ligne sur ce sujet sont accompagnées par l'État.
Par l'instruction du 25 janvier 2018, le Gouvernement a fixé un nouveau cadre pour l'action des pouvoirs publics sur les campements illicites et les bidonvilles. Comme souligné dans la question, 14 800 personnes, dont une grande majorité sont ressortissantes de pays d'Europe orientale, ont été recensées dans près de 570 bidonvilles, habitant dans des conditions indignes et dangereuses pouvant aussi engendrer des nuisances pour le voisinage. Malgré des évacuations, cette situation perdure depuis de nombreuses années. Le Gouvernement a décidé de relancer l'action de l'État en affirmant les principes d'humanité et de respect des lois de la République qui doivent la conduire, mais en fixant aussi une exigence d'efficacité, avec un objectif de résorption des bidonvilles. Pour atteindre cet objectif, l'instruction du Gouvernement du 25 janvier 2018 vise au développement de stratégies territoriales partenariales sur les territoires, à l'image de celles qui ont été mises en œuvre avec efficacité par exemple à Toulouse ou à Strasbourg. La nouvelle circulaire demande aux préfets d'engager une action de résorption « le plus tôt possible, si possible dès l'implantation et indépendamment de l'existence ou non de procédures juridiques engagées en vue de son évacuation ». Cette action pourra passer par la sécurisation des conditions de vie, l'encadrement de l'organisation du campement, la mise en place de solutions de sortie des occupants vers le droit commun, et ce jusqu'à la disparition complète du campement. Les solutions de sortie allieront à la fois programmes d'insertion en France dans un cadre contractuel, respect des lois de la République et coopération transnationale avec les pays d'origine des populations. Ces dispositions ne doivent pas faire obstacle à la mise en œuvre d'évacuations décidées sur la base de décisions de justice liées à l'illégalité de l'occupation ou de décisions administratives concernant des campements dangereux. Comme en témoigne la signature de l'instruction du Gouvernement du 25 janvier 2018 par huit ministres (intérieur, justice, Europe et affaires étrangères, cohésion des territoires, solidarités et santé, travail, éducation nationale, égalité entre les femmes et les hommes), les actions devront être globales, c'est-à-dire portant à la fois sur l'accès aux droits (hébergement, logement, soins, école, emploi) mais aussi la protection de l'enfance, les droits des femmes, la lutte contre la délinquance et contre la traite des êtres humains, le respect de l'ordre public et de la régularité du séjour. Elles devront également comporter la prévention des réinstallations et accorder une attention toute particulière à la situation des enfants (respect de leurs droits et de l'obligation scolaire), et inclure des actions liées au suivi médical. Elles devront enfin nécessairement impliquer les collectivités territoriales concernées, dont l'engagement est indispensable pour permettre la mobilisation de dispositifs d'accompagnement vers l'insertion de droit commun. Cette nouvelle instruction du Gouvernement est le fruit d'un travail d'élaboration qui a rassemblé des représentants de collectivités territoriales, des services déconcentrés de l'État, d'associations, des opérateurs, des chercheurs et des acteurs de terrain. Il s'est nourri de l'évaluation des résultats des projets soutenus par l'État dans le cadre de l'application de la circulaire du 26 août 2012. Le suivi de la mise en œuvre de cette circulaire est confié au délégué interministériel pour l'hébergement et l'accès au logement (Dihal) qui a d'ores et déjà engagé la mobilisation autour de ce nouveau texte et a notamment organisé un événement de sensibilisation le 29 mars dernier à l'Assemblée nationale en partenariat avec Unicef France. Il a en outre installé le 20 juin une commission nationale de suivi de la résorption des bidonvilles, composée d'une trentaine de membres représentant l'ensemble des parties prenantes (collectivités locales, préfectures, associations, ministères signataires de l'instruction, parlementaire, autorités administratives indépendantes), et qui a pour mission de suivre la mise en œuvre de l'instruction du Gouvernement du 25 janvier 2018. Par ailleurs, depuis 2013, une enveloppe nationale de crédits issus des programmes 177 (« Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables ») et 135 (« Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat), est consacrée au soutien des actions territoriales de résorption des bidonvilles et campements illicites. Ces crédits d'un montant annuel de 3 millions d'euros en 2017, reconduits en 2018, ont vocation à soutenir la mise en œuvre de la nouvelle instruction du gouvernement du 25 janvier 2018. Ces crédits jouent un effet de levier et de catalyseur et sont orientés vers les territoires où les collectivités territoriales s'engagent dans des stratégies de résorption. La stratégie du Gouvernement vise donc clairement la résorption des bidonvilles et campements illicites, par une approche globale, pragmatique, territoriale et engageant l'ensemble des parties prenantes dans le respect des lois de la République.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.