Mme Sandrine Le Feur interroge Mme la ministre des solidarités et de la santé sur le monopole des médicaments à prescription médicale facultative, portant sur de petites pathologies et non remboursables. En France, l'État régule les prix des médicaments remboursables. Les médicaments pour lesquels les laboratoires ne demandent pas de remboursement par l'assurance maladie, ou qui n'ont pas obtenu leur inscription sur la liste des médicaments remboursables, échappent à toute régulation des prix, hormis celle de l'offre et de la demande. Les marges de distribution de ces médicaments sont libres. L'UFC-Que Choisir de Brest a conduit une enquête dans 41 pharmacies du Finistère en novembre 2017. L'étude a mis en évidence de grands écarts de prix relevés entre officines, pour deux médicaments très courants, le Doliprane ou l'Actifed rhume jour et nuit, fréquemment utilisés en automédication. L'écart constaté peut aller de 1 à 2 sur l'Actifed, avec des prix allant de 3,99 euros à 7,70 euros et un prix moyen de 6,09 euros, ce qui le situe au-dessus de la moyenne nationale qui s'établit à 5, 71 euros. Par ailleurs, un rapport de l'inspection générale des finances a également pointé dès 2014 des marges élevées sur le Doliprane. Le rapport prévoyait la fin du monopole sur la vente des médicaments sans ordonnance, qui pourrait se traduire par une libéralisation encadrée de la distribution des médicaments sans ordonnance, c'est-à-dire leur vente sous le contrôle permanent d'un pharmacien en parapharmacie et dans des espaces dédiés en grandes surfaces, bien que pour ce type de produits courants les conditions d'utilisation sont généralement bien connues des consommateurs ou correctement expliqués dans les notices et le rôle de conseil joué par le pharmacien très limité dans les faits, comme l'enquête de terrain l'a révélé. Selon UFC-Que Choisir, cette mesure permettrait pour les consommateurs une économie de plus de 11 % des dépenses de médicaments sans ordonnances, soit 252 millions d'euros par an au niveau national. L'exemple des voisins européens est également éloquent. En Italie par exemple, les supermarchés ont le droit de vendre certains médicaments sans ordonnances depuis 2006 avec pour conséquence notable une baisse de leurs prix de l'ordre de 25 %. L'effet sur les prix de la fin du monopole de ces médicaments de consommation courante étant dans l'intérêt du consommateur, elle lui demande la position du Gouvernement sur ce constat.
La vente de médicaments en grande surface, même sous le contrôle d'un pharmacien, contribuerait à positionner le médicament comme un bien de consommation. Ce serait oublier l'ambivalence propre à la nature même du médicament dont l'utilisation, bien qu'étant destinée à traiter les patients, présente de nombreux risques. En effet, les médicaments peuvent avoir des effets indésirables, des contre-indications, et induire des interactions médicamenteuses. Afin d'éviter les risques de mésusage et d'iatrogénie médicamenteuse, il est donc essentiel qu'ils ne soient pas considérés par la population comme un bien de consommation courante. Au sein d'une officine de pharmacie, les demandes de médicaments à prescription médicale facultative sont le plus souvent adressées à un pharmacien qui connait déjà le patient et ses éventuelles contre-indications, comme les allergies, ou autres traitements en cours. Ainsi, il convient de citer l'exemple du gouvernement suédois qui après 6 ans de mise en vente des médicaments à base de paracétamol en supermarchés, a décidé de faire marche arrière en 2016. En effet, le nombre de patients hospitalisés pour empoisonnement au paracétamol est passé de 529 à 1161 (soit une augmentation d'environ 119%) entre 2009 et 2013, période à laquelle le paracétamol était vendu en supermarché. L'administration suédoise a estimé que « l'accès aux comprimés de paracétamol constituait un facteur de risque considérable ». La vente de paracétamol a augmenté de 60% dans les supermarchés quand elle augmentait de 7% en pharmacie. L'éventuel bénéfice financier lié à l'ouverture du monopole est à nuancer par le coût lié à la prise en charge des effets indésirables des médicaments, telles que les intoxications. De plus, le lien social créé par les officines sur les territoires est essentiel pour certaines populations (personnes fragiles, seules, invalides et/ou dépendantes). Par ailleurs, l'ouverture du monopole officinal aux grandes ou moyennes surfaces pourrait fragiliser l'économie de certaines officines dans des territoires où elles sont indispensables, notamment les territoires présentant une faible densité médicale. Enfin, il n'est pas prouvé que la vente de médicaments en grande surface contribuerait à la diminution de leur prix de vente.
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