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Marie-France Lorho
Question N° 7889 au Ministère de la justice


Question soumise le 24 avril 2018

Mme Marie-France Lorho interroge M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur la gestion administrative des individus identifiés comme étant « radicalisés ». Récemment, au mois de février 2018, le Premier ministre Philippe a annoncé que l'on dénombre 1 627 islamistes s'étant radicalisés et étant incarcérés. En revanche, pas moins de 635 islamistes radicaux ont été placés en « milieu ouvert », dont 135 répertoriés en tant que terroristes islamistes et 500 condamnés pour infraction de droit commun. De quoi susciter l'angoisse de nouveaux assauts. Bien que le Gouvernement ait annoncé un programme national visant à la « déradicalisation » de ces islamistes à travers le dispositif Rive (Recherche et intervention sur les violences extrêmes), il semblerait que sa réalisation soit sujette à des incertitudes. Il prévoit des entretiens multiples et réguliers entre les islamistes et des éducateurs, psychologues et imams. Un projet pour le moins ambitieux n'ayant même pas été intégré dans le rapport d'information des sénateurs Benbassa et Troendlé au sujet de la réinsertion des djihadistes en France et en Europe. Par ailleurs, cette mesure alternative consistant à placer les détenus en « milieu ouvert » avait conduit à la libération de l'islamiste Adel Kermiche, co-auteur de l'attentat terroriste de Saint-Etienne-du-Rouvray en Juillet 2016. En réaction à cette situation pernicieuse, l'administration pénitentiaire a lancé un appel d'offres pour la « Prise en charge en plateau technique de la radicalisation de personnes en sous-main de justice, prévenues et condamnées, en dehors des établissements pénitentiaires ». L'Association de la politique criminelle appliquée et de réinsertion sociale (Apcars) s'est déclarée compétente pour assumer ce service mais bon nombre d'éléments laisseraient penser le contraire. Non seulement l'Apcars n'est pas véritablement spécialiste des sujets islamistes mais de plus, le ministère ne lui a toujours pas remboursé l'intégralité de ses dettes se chiffrant à la hauteur de 1,7 million d'euros. Cette dette entrave la conduite effective des activités de réinsertion. Entre l'accroissement progressif du nombre d'individus en voie de radicalisation, l'innocuité du dispositif Rive et la stagnation de la réinsertion des islamistes après leur « déradicalisation », Mme Lorho alerte l'opinion publique sur les dangers qui pèse sur la sécurité nationale. Elle l'interroge sur les mesures que le Gouvernement envisage de mettre en place pour y remédier.

Réponse émise le 20 novembre 2018

La situation des personnes suivies dans le cadre de mesures judiciaires en milieu ouvert et impliquées dans des affaires d'association de malfaiteurs liée à une entreprise terroriste ou susceptibles d'être radicalisées rend nécessaire la création d'outils spécifiques de prise en charge renforcée, en complément du suivi assuré par les services pénitentiaires d'insertion et de probation (SPIP), et en tenant compte des besoins identifiés par les magistrats ou par les SPIP suivant les profils suivis. Dans cet esprit, le Gouvernement a mis en place en octobre 2016 un premier dispositif (RIVE : recherche et intervention sur les violences extrémistes) porté par l'APCARS, association socio-judiciaire de réinsertion sociale et d'aide aux victimes qui dispose d'une réelle expérience de prise en charge des publics sous main de justice. Ce projet expérimental avait pour objectif de réaliser un suivi renforcé et pluridisciplinaire de personnes en liberté et faisant l'objet d'une procédure ou d'une peine en lien avec une infraction terroriste, ou identifiées comme radicalisées ; ce dispositif visait le désengagement de la violence extrémiste et la distanciation par rapport à des opinions radicales tout en favorisant la réinsertion sociale ainsi que l'acquisition de valeurs citoyennes en vue d'éviter un passage à l'acte ou la récidive d'un tel acte. Au terme d'un an et demi de fonctionnement, l'impact de l'accompagnement RIVE sur les trajectoires des personnes a été considéré comme positif. Aucune personne suivie n'est retournée en détention ou n'a causé un incident lors de sa prise en charge, les personnes ciblées ont participé aux entretiens et échanges, la très grande majorité se montrant proactives dans l'accompagnement (22 personnes ont été orientées, 3 sont sorties du dispositif à la fin de sa mesure d'aménagement de peine). Sur la base de cette expérimentation, le dispositif a été adapté et étendu pour répondre au besoin exprimé par les magistrats et une nécessité de la prise en charge, en introduisant notamment la possibilité d'hébergement des personnes et la modularité du suivi (jusqu'à 20 h hebdomadaires désormais). La mesure 58 du Plan national de prévention de la radicalisation a prévu en outre d'élargir ce type de prise en charge renforcée à d'autres grandes agglomérations permettant ainsi de couvrir les régions de Paris et Marseille en 2018, puis Lyon et Lille. Enfin, l'Etat n'a, à l'issue de ce marché, aucune dette identifiée vis-à-vis de l'APCARS.

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