Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Jean-Marc Zulesi
Question N° 8093 au Ministère de l'europe


Question soumise le 1er mai 2018

M. Jean-Marc Zulesi alerte M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la situation des « Franco-Américains accidentels ». Ce qualificatif porté par une association créée en avril 2017 s'applique aux personnes nées aux États-Unis mais n'ayant aucune attache dans ce pays, étant rapidement retournées en France. Le principe de citizen based taxation, promulgué le 2 janvier 2015 par décret transposant en droit français la loi dite « foreign account compliance act » (FACTA) s'impose à eux, car le droit américain en matière fiscale ne prend pas en compte la résidence mais la nationalité. Ce texte visait à mieux lutter contre l'évasion fiscale outre-Atlantique, mais il a pour conséquence pour les « Franco-Américains accidentels » de déclarer leurs revenus et le solde de l'ensemble de leurs comptes bancaires annuellement auprès de l'Internal revenue service (IRS), l'administration fiscale américaine. La loi FACTA impose également à l'ensemble des institutions financières dans le monde de communiquer automatiquement à l'IRS un ensemble d'informations relatives aux comptes financiers détenus par des personnes américaines à l'étranger, bien que cela soit contraire au droit à la protection des données personnelles. De fait, les établissements bancaires français transmettent ces informations à l'administration française qui les fait suivre à l'IRS. Cela place certains Franco-Américains dans des situations critiques, ceux-ci se voyant notifier du jour au lendemain par leurs banques une obligation de régularisation vis-à-vis de l'administration fiscale américaine, se retrouvant ainsi soumis à deux législations fiscales différentes. Les assiettes d'imposition diffèrent considérablement entre la France et les États-Unis, notamment dans le cas d'opérations immobilières ou de bénéfices commerciaux. De plus, la procédure de renoncement à la nationalité américaine, qui réglerait le problème de la double imposition, implique une mise en conformité fiscale préalable, procédure particulièrement longue et difficile à réaliser, qui déclenche en amont le paiement d'une taxe. Enfin, les États-Unis d'Amérique font appliquer par la France, et donc de manière extraterritoriale, leurs lois fiscales et ce faisant, mettent clairement en question la souveraineté française. Les coûts de cette mise en place sont exclusivement supportés par la France, ses banques et donc l'ensemble de ses citoyens sans aucune compensation prévue. Une promesse de réciprocité, difficilement crédible, ne peut suffire à justifier de tels coûts. Dans ces conditions, il s'interroge sur la possibilité d'obtenir un traitement dérogatoire pour les « Américains accidentels » leur permettant, soit de renoncer à la citoyenneté américaine par une procédure simple et gratuite, soit d'être exonérés d'obligations fiscales.

Réponse émise le 8 mai 2018

En matière de fiscalité, les Etats-Unis reconnaissent en effet le principe de l'imposition sur la base de la citoyenneté, celle-ci pouvant s'acquérir par la seule naissance sur le sol américain. Les citoyens français qui ont aussi la nationalité américaine sont ainsi tenus, par le droit américain, de procéder à une déclaration de leurs revenus auprès des services fiscaux de ce pays et d'acquitter, le cas échéant, les impôts dus. Il en va d'ailleurs de même pour tous les citoyens américains résidant en France.  Une convention fiscale bilatérale ayant été conclue entre la France et les Etats-Unis en vue d'éviter les doubles impositions, ce n'est que dans les cas où l'impôt français est inférieur à celui dû aux Etats-Unis ou que certains revenus ne sont pas imposés de façon effective en application du droit fiscal français et sont, par ailleurs, taxables selon la législation des Etats-Unis, qu'une imposition complémentaire pourrait être demandée par les autorités fiscales américaines. Le 14 novembre 2013, la France a signé un accord intergouvernemental, dit "accord FATCA", relatif au respect des obligations fiscales concernant les comptes étrangers. Entré en vigueur le 14 octobre 2014, cet accord fixe un cadre pour l'échange automatique d'informations fiscales avec les Etats-Unis et vise à protéger la sécurité juridique des institutions financières françaises. Il a été conclu à la suite de la loi "FATCA" (Foreign Account Tax Compliance Act) que les Etats-Unis ont adoptée en 2010 et qui institue une obligation, pour tous les établissements financiers, de transmettre à l'administration fiscale américaine des informations détaillées sur les comptes détenus directement ou indirectement par des contribuables américains. Dans ce contexte, un collectif s'est formé pour appeler l'attention du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères et du ministère de l'Economie et des Finances sur la situation particulière des "Américains accidentels", c'est-à-dire de citoyens français ayant également la nationalité américaine mais n'ayant pas de liens avec les Etats-Unis. En l'absence de liens concrets avec les Etats-Unis, où ils n'ont pas résidé, et de documents officiels de ce pays, ces personnes peuvent en effet rencontrer des difficultés pour fournir les informations demandées par les établissements financiers français, notamment un numéro d'identification fiscale américain dont l'obtention peut être particulièrement longue. En réponse, le ministère de l'Europe et des Affaires étrangères a sollicité l'attention des autorités américaines sur ces situations. La France plaide en faveur d'une renonciation facilitée à la nationalité américaine pour ces "Américains accidentels", étant entendu que les conditions d'octroi de la nationalité et le principe de l'imposition sur la base de la citoyenneté relèvent de la compétence souveraine des Etats-Unis. Cette question fait également l'objet de discussions au niveau européen, que suit plus particulièrement le ministère de l'Economie et des Finances. Un courrier a ainsi été adressé au Secrétaire au Trésor américain, le 8 mai 2017, par la présidence de l'UE, appelant son attention sur les difficultés concrètes rencontrées par certains citoyens européens ayant également la nationalité américaine. La France souhaite poursuivre le dialogue à ce sujet, en intervenant conjointement avec d'autres pays européens également concernés, pour obtenir que, dans les situations où les liens avec les Etats-Unis sont ténus, la procédure de renonciation à la nationalité soit rendue plus simple et moins coûteuse. Par ailleurs, le gouvernement sera vigilant sur le respect par les banques de leurs obligations à l'égard des personnes de nationalité américaine, afin que le droit au compte leur soit reconnu et soit appliqué de manière effective. La France rappelle à cette occasion qu'il existe une procédure de recours devant la Banque de France permettant de contraindre une banque à accepter l'ouverture d'un compte, l'établissement étant alors désigné par la Banque de France. La France continuera à suivre de près ce sujet et à rechercher des solutions adaptées.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.